Arnaud Labelle-Rojoux — L’oignon fait la sauce

Exposition

Techniques mixtes

Arnaud Labelle-Rojoux
L’oignon fait la sauce

Passé : 9 décembre 2011 → 14 janvier 2012

Arnaud Labelle-Rojoux, carême-prenant.

L’expression vient à l’esprit pour désigner la dimension carnavalesque de son œuvre. Pas plus que le « parodic’ »1 ne se réduit pour Arnaud Labelle-Rojoux à une simple satire, le carnaval n’est entendu ici comme la somme de potacheries immédiates ; ni encore comme le dénominateur thématique commun, de près ou de loin, d’un certain nombre de ses pièces (ainsi commence-t-il pourtant la liste de ses motifs favoris : clown, dieu, masque, mort, diable, sorcière…). Il faut l’entendre au contraire dans son sens le plus profond et subversif2, celui d’un renversement des valeurs, traditionnellement circonscrit à une période limitée de l’année, mais qui semble chez lui être à l’œuvre en permanence ; être même ce sur quoi l’œuvre tient.

Il y a dans cette pratique du retournement des relents surréalistes : le gant retourné d’ALR serait alors sa fascination pour l’envers des choses, le refoulé individuel ou collectif, la part maudite de l’histoire de l’art ; sa revendication de la subjectivité ; ou son goût pour le renversement des évidences — car si l’habit ne fait pas le moine, l’oignon fait la sauce. Il y a sans doute aussi une forme de persistance du principe d’équivalence Dada. Oui = Non, disait Ribemont-Dessaignes. Ici haut = bas, sacré = profane, intime = public, positif = négatif ; et voilà Gilbert & George transformés en de blancs caniches (Gilbert & George, 2005), et un célèbre boys band transfiguré en triple apparition de Beuys (Beuys Band, 1997). Mais ALR avoue tant de références qu’il déjoue la menace de l’enfermement dans un modèle formateur. En fils de bonne famille, il n’échappe pas à une culture bourgeoise. Il ne la renie pas non plus, mais, non sans violence ni sans une certaine jouissance dans l’avilissement, la mâtine de références triviales, vulgaires, voire trash. La médiocrité est au bout de la voie, qu’il envisage gaiement : c’est sa voie du pire, la seule pour dépasser le goût, le bon goût comme le sien propre.

A Gombrowicz il emprunte la formule : « Toute forme est limitation et mensonge », et l’on voit dans son approche de l’art toute l’énergie de cette « immaturité » revendiquée. Elle s’opère dans une mise en question permanente des valeurs de l’art. Veillant à ne pas se laisser enfermer, le sens glisse, échappe toujours dans la multiplicité des registres, des références, des mediums, des associations qui traversent son œuvre. A défaut de pouvoir être « inculte », son immaturité à lui sera hypercultivée, presque hypermnésique, mais aussi résolument subjective :

« Je revendique une subjectivité irrécupérable, parce que totalement irrationnelle, à la limite de l’idiotie. »3

Smile, it’s art!

1 Arnaud Labelle-Rojoux, L’art parodic’, Paris, Java, 1996.

2 Celui que lui donne Mikhail Bakhtine dans son ouvrage consacré à L’œuvre de François Ra-
belais et la culture populaire au Moyen Âge et sous la Renaissance. Paris, Gallimard, 1982.

3 Arnaud Labelle-Rojoux, entretien avec Eric Mangion, On va encore manger froid ce soir, cata-
logue de l’exposition au MAMAC de Nice, Paris, Semiose / Loevenbruck, 2008, p. 127.

Jeanne Brun
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