Patty Chang — Minor

Exposition

Vidéo

Patty Chang
Minor

Passé : 19 novembre 2011 → 14 janvier 2012

J’ai tourné Minor en 2009 et 2010 dans la province du Xinjiang, dans l’ouest de la Chine. Dans cette installation vidéo, je traite de notions aux propriétés indéfinissables aussi diverses que l’histoire, le langage, les formations géologiques et l’adolescence.

Le film m’a été originellement inspiré par Le Lac errant (1930) de Sven Hedin, un géographe et explorateur suédois qui visita la région au début du 20e siècle. Son récit rend compte de son expédition infructueuse, financée par le gouvernement chinois et qui avait pour but de faire revivre l’ancienne Route de la Soie et de la transformer en autoroute. Il chercha aussi à cartographier le lac errant Lop Nor, vaste étendue d’eau saumâtre aujourd’hui presque asséchée et qui avait pour particularité que ses rives se déplaçaient constamment. Minor examine d’abord les manières floues et éphémères par lesquelles culture et paysage sont liés.

Minor retrace mon voyage dans les pas de Sven Hedin à la recherche de ce lac en plein désert, « perdu » pour les explorateurs depuis plus d’un siècle tant sa position s’était déplacée. Incapable de trouver mon chemin vers le site du lac désormais évaporé, j’ai construit la vidéo comme une suite de multiples actions de performance qui lient les thèmes de la communication, du corps (collectif et individuel), du paysage et du mouvement. J’ai tourné le film quelques mois après les émeutes à Ürümqi, capitale du Xinjiang, lors desquelles la minorité ouïghoure, musulmane et d’origine turque, et la population Han d’origine chinoise s’affrontèrent à cause des tensions croissantes créées par des disparités économiques et politiques. Ces émeutes firent plus de 200 victimes.

Pour Minor, j’ai travaillé avec des non-acteurs chinois et ouïghours pour créer des sculptures éphémères manipulées par le vent. Notamment je leur ai fait tresser des foulards pour écrire des mots sur des camions transportant du coton ou je leur ai demandé de faire voler des parachutes militaires dans le désert.

Dans un projet précédent Condensation of Birds, 2006, j’avais déjà fait voler un parachute. À Pékin, avant de partir pour le Xinjiang, j’ai pensé à cette idée de points mouvants et que j’aimerais explorer ce que nous croyons savoir avant que les choses perdent tout sens ou rompent leurs amarres. Dans Minor, c’est Munire, une adolescente ouïghoure qui dirige le parachute. Entre nous, le langage est devenu important. Pour les Ouïghours, le chinois est une langue étrangère. Nous nous sommes rencontrés dans cet état de gêne linguistique dans un pays contesté.

Je voulais aussi introduire dans mon film l’économie locale, basée sur le coton, qu’on transporte sur des camions. J’ai demandé à Munire si elle voudrait écrire un mot dans sa langue en tressant des foulards et elle m’a d’emblée répondu : « Ouïghour ». Comme c’est un mot long, je lui ai demandé de penser à un plus court qui pourrait tenir sur un camion et elle m’a dit : « loup », l’animal qui représente les Ouïghours dans leur récit mythique de la Création. Et nous avons tressé le mot dans les cordes qui tiennent le coton sur les camions. Quand ils sont remplis, ces camions ressemblent à des nuages en cage.

Ces actions en collaboration créaient un espace de dialogue. La vidéo passe de cadrages serrés, caméra à la main où j’affirme ma subjectivité — à des plans larges du paysage, pour faire alterner une réponse incarnée et émotionnelle à cette communication forcément lacunaire et une réflexion distanciée sur ses conséquences. Dans Minor, comme dans tout mon travail, je m’implique dans des histoires à propos de mythologies et de constructions symboliques. C’est au-delà de notions comme la fiction ou son contraire. Pour moi, le documentaire, c’est l’espace de la performance.

Galerie Gabrielle Maubrie Galerie
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24, rue Sainte Croix de la Bretonnerie

75004 Paris

T. 01 42 78 03 97 — F. 01 42 74 54 00

www.gabriellemaubrie.com

Hôtel de Ville

Horaires

Du mardi au samedi de 14h à 19h

L’artiste

  • Patty Chang