Benoît Le Boulicaut
Benoît Le Boulicaut est artiste, designer graphique et chercheur. Il aborde la question des savoirs à partir d’une posture de fan et considère l’idolâtrie comme un médium à part entière. Ses objets de recherche donnent lieu à des performances, des conférences, des publications ou encore des œuvres plastiques. Dans son travail l’histoire du féminisme, du structuralisme et de la psychanalyse côtoie la présence d’actrices américaines comme Dakota Johnson ou Gwyneth Paltrow, ainsi que des figures historiques telles qu’Eve Adams, Michel Foucault ou Monique Wittig. Il utilise principalement les séries télévisées à succès à l’image de Sex and the City pour leur abondante iconographie et leur place centrale dans la culture contemporaine. Elles lui permettent d’amorcer des démonstrations critiques et théoriques à la frontière entre philosophie, histoire de l’art, études culturelles et théories queer. Il vient récemment d’écrire un mémoire intitulé A Storm In A Teacup (2021) sur l’histoire du thé et les relectures féministes et politiques que l’on pourrait en faire.
Comment s’articule ton travail entre le design graphique, la peinture et la performance ?
Mon travail se structure vraiment comme une pratique de recherche globale avant tout. Je collectionne des images ou des livres, des théories, des choses qui m’obsèdent visuellement et ensuite elles trouvent toujours un moyen de sortir quelque part dans ce que je fais. Ce qui va changer c’est les gens que ça va toucher, avec le design graphique je m’adresse à plus de monde par exemple, parce que c’est plus numérique. Et puis le choix du médium va aussi induire quelque chose d’autre. La peinture par exemple célèbre les images et les concepts que j’utilise. La performance, elle, me permet de les expliquer plus longtemps à l’oral et rendre le tout plus lisible.
Peux-tu nous parler de la mise en page, du choix des couleurs et des différentes formes de lettres dans le design graphique de l’exposition ?
Pour Les Sillons #1 c’était très clair dès le début qu’on allait jouer avec plusieurs typos différentes. Je collectionne des polices d’origines diverses (1800 au total) et j’ai eu envie d’en faire un collage. Chaque typo appartient à une époque différente, il y a de l’enluminure et du victorien par exemple. Tout le travail, ça a été de créer une harmonie entre elles vu qu’elles sont toutes très fortes individuellement. Et pour « calmer » l’identité on est vite parti sur un dégradé (une forme que j’adore), pour rendre le tout plus cohérent. En ce qui concerne la mise en page c’est à la fois un bazar et en même temps c’est très rangé au fond, je trouve, tout est à sa place. Dans ta création, tu te réfères à la fois à la culture populaire et à la théorie critique contemporaine.
Comment ces éléments cohabitent-ils dans ta pratique ?
Ils cohabitent de manière assez naturelle je pense. Au début, c’était drôle d’associer Sex and The City et des livres de psychanalyse par exemple, les gens comprenaient pas trop ce que je voulais dire. Mais ensuite je me suis rendu compte que justement grâce à la performance je pourrais expliquer ce que deux objets radicalement opposés avaient à se dire. Et ils cohabitent de manière égale, l’objet théorique n’est pas « supérieur » à l’objet « populaire », ils dialoguent ensemble, ils nous apprennent quelque chose. Par exemple dans L’Ironie du philosophe Vladimir Jankélévitch il y a un passage descriptif qui ressemble énormément au personnage de Bridget Jones et ils se rencontrent presque par accident. Et ensuite ils en deviennent pour moi comme inséparables.
La Ferme du Buisson, texte et entretien publiés à l’occasion de l’exposition Les Sillons
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