Cléa Coudsi & Eric Herbin
Démarche générale
Nous partageons depuis 2002 un espace de travail commun. A l’origine de nos installations, la récupération et la récolte d’objets, de sons, d’images. Au départ de la pratique artistique : chiner, glaner. Le procédé affectionné : le collage. La méthode mise en œuvre : le bricolage à partir d’objets tombés sous la main.
Les artistes : des collectionneurs, des archéologues.
Nous collons donc des éléments disparates — du texte, de l’image vidéo, des objets, de la photo, des sons, des voix… Ces éléments ne sont pas seulement juxtaposés. Ils construisent une nouvelle réalité. Prélevés sur le réel, ce sont des archives témoignant d’un monde en bouleversement permanent : archives du monde du travail, de paysages en transformation, de musiques populaires, de correspondances… Des lieux, des phénomènes, des objets qui nous entourent. La forme que présentent ces derniers, l’usage qui en est fait et les fonctions qu’on leur trouve président à la conception des installations.
Traverser des territoires : des trames d’histoires.
Bien des choses (installation sonore, 2006) : de courtes correspondances ont été inscrites à des époques quelquefois lointaines au dos des cartes postales. Leurs provenances sont diverses mais elles ont toutes la même région pour destination. Réunies sur une même surface, elles racontent la même histoire d’une région, même s’il s’agit en même temps d’histoires éclatées.
La traversée engage aussi l’idée de temps.
Chaque élément des installations nommées ci-dessus est une cristallisation, une matérialité du temps. Le temps se débite en morceaux ensuite combinés entre eux. Le temps est manipulé à loisir, découpé à l’aide d’une scie. Les éléments disjoints sont à nouveaux rassemblés avec un fer à souder, un tube de colle… Le temps se plie et se déplie, se fractionne et se redéploie dans l’espace.
Remémorer, redire ce qui a été traversé.
Black sound (installation sonore, 2008). Rappeler ce qui a été inscrit sur les morceaux de charbon, au fil du temps géologique comme par les gestes des mineurs. Plasticités et densités diverses. Charbons grattés par des aiguilles, griffés à travers les différentes strates du temps. Lectures de paysages.
Richard G Woodbridge, dans un texte qu’il a consacré à l’archéologie acoustique, imagine le rappel « depuis le passé de véritables sons, voix, musiques, enregistrés accidentellement par des peuples (ou des événements) anciens sur la « surface » ou dans la substance d’une grande variété d’objets… ». Les aiguilles traversent les strates de temps et d’histoires.
Rappeler, redire, refaire, rejouer, retourner… Traverser des mondes pour en créer de nouveaux.
Doucement, les aiguilles creusent le charbon, « gravent » les gaillettes de Black sound. Des nouveaux sons, de nouveaux rythmes. Le présent inscrit à son tour sa présence sur le minéral.
Le paysage est en transformation. Black sound : l’histoire géologique se poursuit sous nos yeux.
Sillonner et traverser des pratiques, des façons de faire, des gestes.
L’installation Other side, break (installation sonore, 2008) cite sur des plans visuels ou sonores, les techniques et les matériaux utilisés par les Djs. Qui plus qu’un Dj aime chiner, récupérer, manipuler ?
Le véhicule de l’installation Other side, break parcourt un circuit constitué par la juxtaposition de fragments de disques vinyles. Au passage, ce véhicule lit et donne à entendre ce qui avait été gravé sur les sillons. Traverser renvoie à la vitesse, à la cadence. Le son des microsillons, amplifié, varie en fonction de l’intensité lumineuse du lieu.
De la même façon, les histoires inscrites sur les cartes postales de Bien des choses s’effacent au fur et à mesure de leur exposition et des manipulations dont elles font l’objet. Les véhicules circulant sur Other side break ont un nom : Vinyl Killer. Ils usent et finiront par effacer les microsillons. Des empreintes de doigts des spectateurs recouvre petit à petit la surface blanche des enveloppes de l’installation Où maintenant.
Dans toutes ces installations, une même histoire se raconte : celle d’un temps qui se poursuit au présent.
Ce qui nous intéresse depuis longtemps : le temps quotidien des hommes. Un temps rassemblé. Un temps sensible. Un espace organisé comme l’est la mémoire.
Cléa coudsi et Eric Herbin
Cléa Coudsi & Eric Herbin
Contemporain
Installations, nouveaux médias, photographie, sculpture, techniques mixtes
Groupe d’artistes française.
- Localisation
- Lille, France
- Thèmes
- Acoustique, experimentation, frontières, humain, hybrides, société