Eric Baudart
Délicatement transposées, c’est la matérialité déplacée des œuvres d’Eric Baudart qui leur donne une résonance contemporaine. Plastique peigné au miel, papier millimétrique, ruban adhésif — tous les jours, les ustensiles banals sont rincés de la contextualisation quotidienne et réaménagés pour créer des œuvres qui gloussent sur le bord de l’artifice.
Vivant et travaillant à Paris, Baudart poursuit une pratique qui évolue à partir du readymade de Duchamp, tout en déclinant à la fois de celui-ci; les œuvres ou les situations proposées ne sont pas de simples objets trouvés, mais plutôt des matériaux reconfigurés et réaménagés, composés et réchoréchotés qui ont été soigneusement assemblés ou moulés pour monter un délicat ballet de formes et de couleurs.
L’œuvre Cubikron 2.0 (2013), par exemple, se dresse comme un plinthe rectangulaire clair: un témoignage des adages de l’Antiquité, mais, en même temps une sorte d’affront à sa matérialité de marbre d’origine. Conçu en plastique peigné au miel, le médium défie les gravitas de l’original, tout en offrant les propriétés de la ligne et de la lumière oscillante. L’humour, et sa présence naissante, est d’ailleurs souligné par la fiction du titre, qui d’une part dérive des cubicos latins et d’autre part des kybiks grecs, tous deux signifiant « avoir trois dimensions ». Baudart a effectivement créé son propre contemporain; une création qui peut non seulement résister aux épreuves du temps — et peut-être même plus longtemps que dans sa conception originale — mais aussi une formation qui doit être considérée et observée non pas comme un support, mais comme un objet à part entière.
L’artiste s’intéresse également au processus; comment au-delà du matériau, ses propriétés et sa signification originale ainsi que l’utilisation peuvent être reconfigurés ou représentés par une manière de pratique. Scotch (2013), présente une photographie imprimée sur du papier de traçage posé sur du plastique alvéolateur. Au premier aperçu, on n’est pas pris par cette manière quasi-scientifique de l’expérimentation mais, au lieu de cela on est fixé sur le résultat, les teintes tonales roses douces, qui sont équilibrées par une juxtaposition abstraite de lignes ondulantes. Ce n’est qu’après avoir pris en compte le titre et l’esprit d’Eric Baudart que l’on pense à la marque de ruban adhésif, que l’on retrouve si souvent dans les salles de classe ou les différents ateliers. Cependant l’artiste a, par un processus de création, distrait le spectateur de la source utilitaire du matériau, en s’appuyant plutôt sur ses différentes possibilités esthétiques.
Baudart le démontre, la perception d’un objet peut totalement changer en vertu de sa présentation. L’œuvre Vinci (2013), est un paillasson brun détrempé et texturé, mais, lorsqu’il est transposé sur le mur et enfermé dans un cadre métallique, le spectateur est attiré par ses propriétés esthétiques. Le titre, qui fait référence à l’un des plus grands esprits artistiques et scientifiques du XV-XVIème siècle transmet à nouveau un sens du jeu, c’est finalement l’altération du contexte qui teste les limites de l’objectivation.
Eric Baudart
Contemporain
Techniques mixtes
Artiste français né en 1972 à Paris, France.
- Localisation
- Paris, France
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