Przemek Matecki
Né en 1976, Przemek Matecki vit et travaille à Varsovie.
Dans sa recherche il s’empare d’images tirées de magazines sur papier glacé, dont il fait la matière première pour la construction d’identités hybrides tour à tour humoristiques ou monstrueuses. Ses interventions picturales radicales n’hésitent pas à flirter avec la pornographie, le gossip mondain et le kitsch, mettant sans cesse à l’épreuve les automatismes de lecture et de vision de la culture contemporaine.
Son travail est régulièrement exposé lors d’expositions collectives et personnelles en Pologne et à l’étranger: à la BWA Gallery de Zielona Góra (2013), à la Raster Gallery (2013; 2009; 2007) et au CSW Ujazdów Castle (2012) de Varsovie, à la foire Art Berlin Contemporary (2011) et à la galerie Carlier/Gebauer (2010; 2008) de Berlin, à Hollybush Gardens (2008) de Londres, entre autres.
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“J’appelle mes travaux sur papier “croquis à l’huile”, même s’il ne s’agit pas de croquis au sens littéral du terme, puisque je ne les transfère pas sur toile. C’est de ces croquis que je “prélève” mes sources. Les images qui en résultent sont très universelles — tout ce dont vous parlez est dedans : l’appropriation, la correction, le vandalisme. Je cherche à créer des pièces qui me satisfont dans la manière la plus simple possible : souvent, renverser quelque chose me suffit.”
“Tout ce que j’aborde, je le traite de façon abstraite: les images dont je me sers sont souvent très connues et reconnaissables, mais leur sens, leur contenu immédiat et l’histoire qu’elles racontent ne m’intéressent pas. Je ne m’en soucie pas : il s’agit là d’un piège visuel. Je n’essaie pas de deviner ce qu’un visiteur peut penser lorsqu’il voit Marilyn Monroe. Il la voit, c’est tout. Dans mon travail, au contraire, j’essaie sans cesse de me libérer, de libérer la peinture et les images. Ce renvoi automatique d’une image à un objet ou à une personne doit pouvoir être renversé : en simplifiant, il doit par exemple être possible de peindre une tâche abstraite et d’y voir un cerveau humain, ou autre chose. L’art doit être universel.”
“La construction de ces travaux part d’une impulsion : sans élan créatif les magazines ne sont rien d’autre que des magazines. C’est cette impulsion à la création qui me permet de les utiliser pour faire de l’art. La première chose c’est de prendre de la distance par rapport à ce que l’on voit. Pendant des années j’ai fouillé dans les poubelles : je ne cherchais rien en particulier, mais j’ai beaucoup trouvé. J’ai crée de l’art à partir de ça. Quant à mon monstre, c’est MOI-MEME, mes réactions par rapport à ce que je vois. La destruction et la stratification des images sont le reflet de ce qui se passe sans cesse dans ma tête, dans mon estomac, jour et nuit.”
“Le temps est l’un des facteurs qui influencent le plus notre réception de l’art : je deviens de plus en plus conscient de la signification du temps. Les journaux et les magazines sont l’un des signes les plus évidents d’une époque, ils sont le portrait ostensible de notre civilisation — de comment on s’habille, de que l’on mange et ce dont l’on discute. Les preuves en sont innombrables et se retrouvent partout — dans la poubelle, dans les cafés et les librairies. Certaines personnes les jettent, d’autres les collectionnent, d’autres recoupent et conservent les pages ou les articles les plus marquants. D’autres encore se torchent le cul avec. Il s’agit là d’un matériel très versatile et d’un signe très important des temps. J’aime la nature quotidienne des magazines, leur préservation illusoire du temps, comme l’éclat d’un flash s’arrêtant ici et là.”
“Je travaille seul, complètement seul. Je veux que mes travaux soient assez universels pour que les autres puissent en tirer quelque chose — les carrés, les rectangles avec lesquels l’on bâtit une maison, par exemple. Notre rencontre a été inattendue, c’est pourquoi elle m’a tout de suite intéressé. Pendant quelques années j’ai collaboré avec quelques collègues peintres : la création “random” de tableaux à plusieurs mains est fascinante, car elle présente beaucoup d’écueils contre lesquels on peut buter.”
“J’ai toujours utilisé des images détournées ou retouchées, comme par exemple avec la série des paysages 3D. Ce travail sur les cartes postales est passé par différentes phases et a débouché sur la série Ecrans de veille, de grands formats imprimés sur toile et recouverts de résine et de paillettes. Le titre Ecrans de veille fait bien sûr référence aux images générées automatiquement par les ordinateurs en veille, mais c’est aussi une allusion au surréalisme, au sommeil hypnotique et à l’écriture automatique pratiqués par ce mouvement.”
“Je suis un peintre et, comme beaucoup d’autres artistes, je suis attiré par l’éclat des images, par ce moment où, par une étincelle de la pensée, un tableau et une image prennent forme. La genèse de ma pensée sur les images est plutôt longue et laborieuse : concrètement, il s’agit de travailler sur les images tout en en restant extérieur, dans une position qui me permet de voir et de sentir davantage. Souvent, toutefois, je me concentre tellement sur une peinture que je deviens une partie d’elle : les travaux que je peins sont alors concentrés sur la surface et la couleur. Les actes de diversion sont pour moi une manière de dépasser les pratiques de l’avant-garde et leur héritage, auquel je suis profondément lié. Cela dit, tout mon art est en essence le fruit de ma personnalité, il suit le fil d’une inspiration que je ne peux pas influencer et qui est partiellement inconsciente. Dans mon travail, la création d’une nouvelle image implique toujours la destruction de celle que je connaissais déjà : je travaille en marge des images ou directement sur elles. Comme me disait récemment un ami peintre, il faut haïr la peinture pour peindre des œuvres importantes.
“Beaucoup de croquis préparatoires pour ce projet se basaient sur l’idée de détacher les œuvres d’art des murs, en dessinant une architecture appropriée pour ces travaux. L’idée était de rapprocher le visiteur des œuvres, pour qu’il soit amené à se concentrer sur chaque pièce et non sur l’exposition et le lieu dans son ensemble. C’est en contournant chaque coin que l’on découvre de nouveaux travaux : c’est un peu comme feuilleter les pages d’un magazine. Ainsi, chaque visiteur peut dessiner dans sa tête son image personnelle de notre travail, tandis que l’espace façonne une scène ouverte, évoquant l’idée d’un mouvement continuel.
“J’ai choisi d’utiliser ces images ambivalentes comme métaphore et symbole de notre condition actuelle: les fausses colonnes qui rythment l’espace évoquent alors une forêt urbaine dans laquelle les œuvres se rencontreraient comme lors d’une rencontre inattendue dont l’histoire reste encore à écrire.”
Extrait d’une interview réalisée à l’occasion de l’exposition “isn’t it good to be lost in the woods”, en présence de Pierrre Ardouvin et Przemek Matecki, Viviana Birolli pour Progress Gallery, 2013
Przemek Matecki
Contemporain
Collage, dessin, peinture
Artiste polonais né en 1976 en Pologne.
- Localisation
- Varsovie, Pologne