Bettina Samson — Fedor Poligus — Les preuves du feu

Exposition

Photographie, sculpture

Bettina Samson
Fedor Poligus — Les preuves du feu

Passé : 26 février → 30 avril 2011

Bettina Samson développe une pratique telle une mosaïque complexe dont les formes prennent souvent leur source dans une histoire non linéaire que l’artiste aime à documenter : il en résulte un ensemble dense et complet où les éléments se répondent les uns aux autres, comme autant d’indices imprévisibles.

Pour L’éclat (2011), elle a agrandi et façonné en céramique émaillée d’infimes échantillons d’iridium. Recouvertes d’un lustre en platine, ces sculptures révèlent une apparence séduisante qui contrebalance la violence que génère pourtant l’iridium dans le monde naturel. Si ce métal, très dur, est effectivement quasi absent de la surface de la Terre, on le retrouve notamment sur les météorites. L’iridium est le principal marqueur ayant permis de déterminer que la disparition des dinosaures serait peut-être due à un impact météoritique : on retrouve des traces de ce minerai dans les couches géologiques Crétacé-Tertiaire, concomitantes de l’extinction massive et subite d’espèces animales et végétales.

Les formes proposées par Bettina Samson, inspirées de fragments réels, s’inscrivent dans les recherches récentes de l’artiste sur l’événement de la Toungouska, une explosion de grande magnitude survenue dans les terres reculées de Sibérie centrale. Le 30 juin 1908, l’entrée d’une météorite dans l’atmosphère provoqua une onde de choc sans précédent, détruisant la taïga sibérienne sur un rayon de vingt kilomètres et causant des dégâts matériels sur près de cent kilomètres. En raison des aléas de l’histoire tourmentée de la Russie de ce début de siècle, la première expédition scientifique ne parvint sur les lieux qu’en 1927, recueillant les témoignages des autochtones toungouses, dont probablement le chaman Fedor Poligus, qui attribuaient cette explosion aux esprits.

Il n’est pas étonnant qu’un tel événement suscite l’intérêt de Bettina Samson dont l’œuvre confronte constamment différentes strates temporelles et différentes sédimentations de signification. Entre science et magie, faits avérés et supposés, elle conçoit sa pratique comme un étroit assemblage d’éléments épars lui permettant d’explorer différents aspects d’un même et unique contenu. Ici, elle entreprend l’iridium à la fois comme preuve archéologique, scientifique, et comme témoin d’un événement mystérieux.

Il en est de même avec la série de photographies noir et blanc de grand format constituant Comment, par hasard, Henri Becquerel découvrit la radioactivité (2008-2009). Obtenus par l’exposition du papier photographique à de la pechblende, le principal minerai d’uranium naturel, ces tirages réactivent ici le processus — accidentel — avec lequel le physicien Henri Becquerel s’aperçut que l’uranium émet son propre rayonnement, sans excitation de la lumière.

En juxtaposant cette série de photographies avec les sculptures de L’éclat, Bettina Samson met en exergue un jeu d’analogies pour le moins troublantes : l’uraninite brûle l’émulsion photographique tout comme le minerai d’iridium se forme dans la combustion. En outre, les deux minerais auxquels font directement référence ces œuvres possèdent chacun en eux le risque, ou le souvenir, d’une potentielle explosion. À la manière d’un chaman, Bettina Samson joue avec les éléments célestes (l’étymologie du mot iridium vient d’ailleurs du latin iridis — « arc-en-ciel ») et les forces de la nature, et met à l’épreuve du feu deux matériaux, générant ainsi des preuves tangibles de phénomènes pourtant indicibles.

Avec avec le soutien de la CNAP (aide à la première exposition), Ministère de la culture et de la communication

Marc Bembekoff
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