Peintures récentes
Exposition

Peintures récentes
Dans 7 jours : 12 septembre → 9 novembre 2025
« Peintures récentes » est la sixième exposition de Matthieu Palud à porter ce titre. La formule, laconique, a le mérite de ne rien dire a priori de ce que les toiles représentent ou expriment. Elle pose simplement une unité relative de temps — quelques mois, une année tout au plus — qui sépare la production de l’exposition, et de lieu : la toile. Par phases répétées, parfois espacées, la peinture accompagne le présent, sans nécessairement créer d’habitudes formelles. Mieux, le « récent » semble toujours laisser libre cours au « nouveau », et il arrive régulièrement qu’on ne reconnaisse pas la peinture de Matthieu. Il y a eu des toiles qui figuraient, avec un certain réalisme, les ombres et lumières de détails domestiques (les premières que j’ai vues), suivies d’autres, très psychédéliques, schématiques, fluorescentes. Peut-être faut-il préciser que Matthieu n’a pas fait d’école d’art ; j’aime penser que cet autodidacte le libère de tout programme que la peinture se chargerait d’exécuter, et lui permet de faire toujours différemment la même chose.
Cette fois-ci, ce sont trois scènes d’intérieur (dont une nature morte) et trois portraits qui sont montrés. À bien y regarder, les portraits semblent aussi domestiques (capturés devant une fenêtre ou sur un fond muet), et il se dégage de l’ensemble une impression resserrée, pour ne pas dire confinée. C’est un monde d’intérieurs sans échappées : les rideaux sont tirés, les perspectives fermées. En même temps, cet intérieur dépouillé contient l’essentiel : quelques fruits, des figures amies et la peinture elle-même. Car, à la différence des expositions éponymes précédentes, les « peintures récentes » de cette exposition sont à la fois présentées et représentées. L’une des toiles exposées figure en effet trois tableaux posés au pied d’une fenêtre, celle de la chambre de Matthieu. Les trois sont très colorés et différents les uns des autres : l’un figure un logo vert « pom », l’autre est rayé, et le dernier, plus liquide, semble couvert de flaques de couleurs. À l’arrière-plan de la nature morte repose également un petit tableau abstrait. Ces quatre peintures, Matthieu les a produites « pour de vrai », mais a décidé de ne pas les exposer, du moins pas en dehors de l’espace de l’appartement/tableau. Elles n’ont rien à voir avec la manière plutôt réaliste, bistre et sèche avec laquelle il a représenté l’intérieur qui les abrite.
À ma connaissance, c’est la première fois qu’il met en abyme la coexistence de ses différentes manières de faire, donnant à ce nouvel ensemble une tonalité plus réflexive (voire analytique) : la peinture est mise en perspective, les intérieurs (non habités) et les figures (non contextualisées) sont séparés. Pas de réelle continuité non plus entre les trois portraits : les hommes que Matthieu a peints ont chacun leur touche, comme si leur allure appelait à chaque fois une nouvelle approche de la représentation, ou un héritage différent de la figuration. À plusieurs égards, je pense à la peinture du XVIIᵉ siècle : Vermeer, par ses effets de fenêtres et de tableau dans le tableau ; Zurbarán, avec ses capuches sculpturales qui rabattent l’ombre sur les visages. La peinture n’est jamais récente ; celle de Matthieu Palud se transforme complètement puis se resserre, passe le temps et s’en abstrait, parfois.