Claude Closky — Inside a Triangle
Exposition
Claude Closky
Inside a Triangle
Passé : 10 septembre → 7 octobre 2011
À la différence du road movie, l’image reste fixe, et contrairement aux œuvres de Richard Long, personne n’a fait un seul pas. Chaque page d’_Inside a Triangle_ téléporte le lecteur sur un nouveau chemin d’un nouveau pays. Ce livre d’artiste de Claude Closky contient 100 photographies de routes, sentiers, pistes, trottoirs et promenades du monde entier. Tous, étroits ou larges, sont rectilignes. Ces photographies ont la particularité de se superposer exactement l’une à l’autre. Le chemin forme invariablement un triangle isocèle, dont la base occupe toute la largeur du cadre inférieur, tandis que le sommet — le point de fuite — coïncide avec le centre du cadre supérieur. Le ciel étant exclut, le haut de ce cadre fait office d’horizon. Présentée seule sur la page de droite, l’image est légendée du lieu de la prise de vue, page de gauche.
Tous les paysages de cet ouvrage sont des détails de photographies trouvées sur Internet. Closky les a sélectionnées puis rigoureusement recadrées. À voir une telle quantité de photographies prises du milieu d’une route droite, on peut s’interroger. Pour faire ces images, il faut se placer comme un obstacle au milieu de la voie au risque de se faire renverser. C’est de la photo amateur par excellence. Dans l’histoire de la photographie-sans-qualité dans l’art, rares sont les artistes qui se sont aventurés jusque là. Ces images, à l’instar des blogs de voyage où elles ont été publiées, semblent ne rien vouloir dire d’autre que « Kilroy was here » : J’étais là. A l’instar de ce graffiti autrefois très répandu, ces blogs exhibent l’abscisse et l’ordonnée visuelles attestant de la présence d’un individu voué à retomber dans l’anonymat — la signature de tout le monde et de personne.
En recadrant cette centaine de photographies de paysage, Closky les a réduites à leur plus simple expression pour leur faire dire autre chose. Le monde est mis à plat. Les routes sont plates, les pages sont plates, les triangles sont plats. On ne peut s’empêcher de comparer les variations entre ces axes de circulation et leurs environnements, mais l’attention finit par évacuer le paysage, qu’il soit rural ou urbain. Invariablement on extrait le triangle que l’objectif photographique a dressé sur la route. C’est l’histoire du long ruban plat, qui, quelque soit le lieu, se transforme en triangle sous vos yeux, donnant ainsi l’illusion de refermer l’infini.
Claude Closky recourt souvent aux images, aux textes ou aux formats archétypaux. Souvent, l’artiste recadre ces documents pour les réorganiser et les reprendre. Avec Inside a Triangle_, Closky navigue aux frontières de la photographie en ligne. Cet ouvrage, autonome, n’est pas sans lien avec son blog Screen—Shots, où il poste chaque jour une photographie « prise » par lui dans ses voyages sur Google Street View — cette recréation du monde en trois dimensions à partir de photographies —, qui revisite le genre de la re-photographie.
Les pages d’_Inside a Triangle sont imprimées sur une face d’une longue bande de papier, pliée et reliée à la japonaise. Entre le premier et le dernier paysage de l’ouvrage le cercle se referme. Depuis Bragadiru, en Roumanie, jusqu’à Bến Tre, au Vietnam, nous cheminons d’allées étroites et sombres à des autoroutes, en passant par des pistes enneigées. Devant nous se trouvent des tunnels, des sillons agricoles, des allées de cimetière. Nous progressons de passages balisés en routes boueuses, puis revenons dans de petites ruelles pavées, cette fois inondées d’une lumière radieuse. Quoi de plus beau qu’une route baignée de soleil.
Horaires
Du jeudi au samedi de 14h à 18h
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