Conversation : De quelques mouvements
Rencontre
Conversation : De quelques mouvements
Passé : Samedi 17 septembre 2016 à 15:00
Avec Amandine Dabat, Pierre Daum, Tran Minh Duc et Trinh Van Thao
De 1862 à 1954, la France a engagé une politique de prise de possession (ou de « mise sous protection ») en Asie du Sud-Est intégrant ainsi la totalité du Cambodge, du Laos, du Viêt-Nam et une partie de la Chine orientale à son empire colonial.
La première rencontre du programme Anywhere But Here à Bétonsalon — Centre d’art et de recherche propose de présenter les déplacements de quelques individus liés à l’histoire de l’Indochine en mettant en avant la manière dont ces trajectoires intimes entre l’Asie du Sud-Est et la France permettent de percevoir dans leurs complexités les politiques de développements et de préservation du régime colonial, et en creux le développement clandestin de certains mouvements anticoloniaux.
Le prince Canh, Nguyen Phuc Canh (1780-1801), est une figure fondamentale de l’histoire des relations entre le Viêt-Nam et la France. Envoyé, à l’âge de cinq ans, en mission à Versailles accompagné d’une délégation afin de convaincre Louis XVI de soutenir sa dynastie, son voyage va bouleverser l’échiquier politique de la région et les liens naissants entre la France et le Viêt-Nam.
Intervenant : Tran Minh Duc (1982, Hô-Chi-Minh-Ville, Viêt-Nam) est un artiste vietnamien. Il s’intéresse au passé, à ses modes fragmentaires de diffusion et à la manière dont il interagit avec le présent. Dans sa pratique, il cherche également à examiner le caractère de la vie urbaine vietnamienne. Pour ce faire, il étudie les interactions entre les sphères collectives et individuelles, entre les idées du local/intérieur et de l’étranger/extérieur. Invité par Bétonsalon — Centre d’art et de recherche en résidence à Paris dans le cadre de l’exposition Anywhere But Here, Tran Minh Duc s’intéresse aux détails non explorés de la visite du jeune prince Canh en France.
L’Empereur Hàm Nghi (咸宜, 1871, Huế — 1944, Alger), appelé “Prince d’Annam” pendant son exil, qui utilisait son prénom “Tu Xuân” comme nom d’artiste, régna sur le Viêt-Nam pendant un an, en 1884-1885. Après trois ans de résistance anticoloniale, il est capturé et envoyé en exil en Algérie par l’État Français en 1889, à l’âge de dix-huit ans. À Alger l’administration française lui permit d’être formé aux beaux-arts par un professeur de peinture, agrément qui devint une pratique centrale dans sa vie.
Intervenant : Amandine Dabat est Docteur en Histoire de l’art, diplômée de l’Université Paris-Sorbonne (Paris IV). Sa thèse a pour sujet la vie et l’œuvre de l’empereur vietnamien Hàm Nghi (1871-1944). Amandine Dabat est également titulaire d’un Master en Etudes vietnamiennes de l’Université Paris-Diderot (Paris VII). Au cours de son doctorat, elle a effectué plusieurs séjours de recherche au Viêt-Nam et en Algérie, pour une durée totale de deux ans. Elle est l’auteur d’une dizaine d’articles et a participé à plusieurs colloques et conférences internationaux. Elle a enseigné durant un an à l’Université de Hanoi (Viêt-Nam).
Tran Duc Thao (1917, Hanoi- 1993, Paris) fut l’un des plus grands philosophes marxistes contemporains vietnamiens. Admis à l’École normale supérieure d’Ulm, il est brillamment reçu agrégé de philosophie. Élève de Cavailles, il est considéré comme l’un des meilleurs spécialistes de la phénoménologie et de E. Husserl après la publication de son livre Phénoménologie et matérialisme dialectique (Paris, 1950). Chef de file de la diaspora vietnamienne durant l’occupation allemande en France, il retourna dans son pays peu après le début de la guerre d’Indochine pour rejoindre la lutte anti coloniale en faveur de l’indépendance nationale. Critique marxiste et traducteur de Hegel et de K. Marx en langue vietnamienne, il a été l’objet de la répression du parti communiste durant la campagne des Cent Fleurs (1956-1957).
Intervenant : Trinh Van Thao (1938, Sud Viêt-Nam) a fait l’essentiel de ses études supérieures en France (Sciences Po, Dr d’état ès lettres à La Sorbonne). Il enseigne la sociologie et l’histoire contemporaine dans les universités françaises (Amiens, Lille, Aix Marseille, collège international de philosophie à Paris) et étrangères (Brésil, Canada, Japon…). Professeur émérite à AMU.
En 1939 avec l’entrée en guerre, ordre est donné à l’administration indochinoise d’envoyer plus de 20 000 hommes en métropole, non pas pour servir de soldats mais d’ouvriers dans les usines d’armement. Regroupés sous l’autorité de la M.O.I. (la Main d’ Œuvre Indigène, dépendant du Ministère du Travail), ils sont désignés sous l’appellation d’« ouvriers non spécialisés » (ONS). À la suite de la défaite de juin 1940, ces travailleurs sont loués à des entreprises pour un salaire équivalent au dixième de celui d’un ouvrier français. En Camargue, une partie d’entre eux contribuèrent à la mise en place et au perfectionnement de rizières — culture aujourd’hui toujours implantée dans cette région.
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Intervenant : Journaliste, ancien correspondant de Libération, actuellement reporter au Monde diplomatique, Pierre Daum mène des enquêtes historiques sur le passé colonial de la France, au Viêt-Nam et en Algérie. En 2009, il publie Immigrés de force (éd. Actes Sud), qui révèle au grand public l’histoire enfouie des 20 000 « travailleurs indochinois » de la Seconde guerre mondiale. Son livre est adapté au cinéma en 2013 (Công Binh, la longue nuit indochinoise, de Lam Lê), puis à la télévision en 2015 (Riz amer, d’Alain Lewkowicz).
9, esplanade Pierre Vidal-Naquet
Rdc de la Halle aux Farines
Face aux Grands Moulins de Paris sur le campus de l’Université Paris 7 – Denis Diderot
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T. 01 45 84 17 56
Horaires
Du mardi au samedi de 11h à 19h
Tarifs
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