Dominique Petitgand — L’oreille interne (The inner ear)
Exposition
Dominique Petitgand
L’oreille interne (The inner ear)
Passé : 23 mars → 18 mai 2013
L’exposition comporte trois œuvres, deux installations sonores et une œuvre texte.
Les installations sonores Je siffle (2013) et Au bord du quai (2011, 2013) prennent place dans les deux grands espaces principaux de la galerie, tandis que Mes écoutes (2004, 2013), série de textes sur écran vidéo, occupe la petite alcôve. Les deux installations sonores laissent les deux espaces vides, sols et centres inoccupés, seuls les haut-parleurs occupent la périphérie des murs. Elles requièrent un auditeur mobile, à la recherche des sons, de leurs apparitions, de leurs déplacements — d’un haut-parleur à l’autre — les sons perçus dans la distance ou à proximité. Les installations se jouent de l’acoustique particulièrement réverbérante, l’espace est nu, brut, les sons résonnent, chaque courte séquence est suivie de son écho. Les sons se cognent aux murs, rebondissent, nous trompent quant à leur provenance.
Je siffle, diffusée sur cinq haut-parleurs à cheval sur les deux espaces principaux, fait entendre un pointillé quasi musical, une succession filée, entrecoupée de silences, de fragments d’un long sifflement effiloché. Long sifflement brisé à la recherche de sa propre mélodie, discours musical primitif improvisé — à l’enregistrement, relu et corrigé au montage — sans pensée ni intention ni préparation ni construction préalables, mais tout de même pensée musicale en direct, se générant d’elle-même, avançant au gré de bribes mélodieuses, de notes suspendues, d’amorces, de retenues, de répétitions, d’hésitations, de retours, de variations. Pensée musicale, discours sans paroles ni langage, degré zéro de la composition, les séquences sifflées sont diffusées, l’une après l’autre, sur les cinq haut-parleurs, passant de l’un à l’autre, comme le ferait une personne se promenant dans la galerie, sans logique autre que le cheminement intérieur.
Au bord du quai est, elle, localisée sur deux haut-parleurs fixés à l’un des murs du second espace, elle fait entendre une série d’enregistrements, au bord du quai, de passages de trains sans arrêt, avec la sensation qu’on te coupe la tête, séquences abrasives, ponctuées, lancées, retenues, par des sons percussifs ultra courts assimilables à des manipulations d’objets en verre. Ces séquences micro-architecturées, entrecoupées de très longs silences, semblent intervenir presque par hasard, au beau milieu des séquences de l’autre œuvre, qu’elles viennent perturber, réveiller, parasiter.
Les deux œuvres sonores présentées dans l’exposition sont donc exposées en quinconce, au niveau temporel, spatial aussi — puisque l’une mord sur l’espace de l’autre — les deux installations sonores apparaissent comme temporellement infinies.
Mes écoutes est une œuvre muette. Accroché au fond de l’alcôve, un écran vidéo diffuse l’un après l’autre, le temps nécessaire à la lecture de chacun, une suite de 136 textes courts, en lettres blanches sur fond noir. C’est un projet que j’ai commencé en 2004, l’ensemble exposé est la version la plus récente à ce jour.
Chaque texte décrit comment dans ma propre vie j’écoute, je suis l’auditeur qui dit je, une situation miraculeuse, un comportement habituel, un souvenir, un état, en mémoire ou décrit sur l’instant, chaque texte comporte un titre, est en même temps autonome et partie constituante d’un tout. Cette présentation de longue durée sur écran apparaît sans début ni fin, et s’adresse, à la différence des installations sonores qui requièrent un auditeur mobile, à un lecteur immobile, assis sur un banc.