Eija Liisa Ahtila — Potentiality For Love

Exposition

Vidéo

Eija Liisa Ahtila
Potentiality For Love

Passé : 2 mars → 11 avril 2018

« L’humain s’est accompli en échappant ou en réprimant, non seulement son origine animale naturelle, la biologie et l’évolution, mais plus généralement, en transcendant les limites de la matérialité et de l’incarnation. »

Cary Wolfe, What is Posthumanism?, University of Minnesota Press, 2009, citation choisie par E.-L. Ahtila

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La Galerie Marian Goodman présente une nouvelle exposition de l’artiste finlandaise Eija-Liisa Ahtila à Paris. L’artiste montre sa toute dernière œuvre chorale intitulée Potentiality for Love (2018) qui se compose de trois éléments répartis entre les deux niveaux de la galerie.

Au rez-de-chaussée, une œuvre combine une image en mouvement et un aspect sculptural rendu par la superposition de vingt-deux modules LED. Ahtila a délibérément choisi une technologie datée, afin que l’image soit confuse et abstraite dans sa proximité mais devienne intelligible à partir d’une certaine distance. Sur cette construction, on peut voir une figure humaine féminine flottant en apesanteur dans la Voie lactée. A mesure qu’elle s’approche du spectateur, celle-ci prend des proportions monumentales et finit par lui adresser silencieusement un geste ample, accueillant et bienveillant.

Par cette embrassade géante et universelle, Ahtila évoque le lien maternel, celui qui lie deux mammifères au tout début de la vie. Cette expérience réveille le souvenir d’une unité archaïque, mais aussi la nostalgie de sa disparition. Pour l’artiste, ce lien primitif imprime en chacun de nous l’expérience paradoxale de la fusion et de l’altérité. Ce souvenir d’unité réactive le désir de recréer une proximité tout aussi intime avec les êtres aimés ; un désir voué à rester irréalisé, latent, qui demeure surtout à l’état de potentiel.

Ahtila donne à ce propos une dimension plus globale encore : de quel potentiel d’empathie l’humanité est-elle capable à l’attention de l’espèce humaine mais aussi des autres espèces ? Notre capacité à aimer est-elle limitée ou peut-elle se déployer à l’endroit de tout le vivant ? Ahtila invite à réévaluer notre relation à l’environnement, ses ressources et la vie qui le peuple.

Les autres éléments présentés au niveau inférieur de la galerie prolongent cette réflexion et proposent une expérience troublante. Sur une grande projection, au fond de la salle, apparaît l’image silencieuse de Jenny, une chimpanzé, juchée sur un tabouret, de dos. Elle semble ne pas faire attention à qui la regarde. En jetant seulement quelques coups d’œil par-dessus son épaule, elle préserve une intimité que le regard humain ne saurait percer. Son attitude posée, entre pudeur et mise à distance, souligne d’autant plus la situation du spectateur, ici devenu voyeur. Surgissent alors une série de questions sur notre propre animalité, et la façon dont l’altérité se construit ou non dans un rapport d’égalité. Ahtila interroge : quels sont les ressorts profonds qui font que l’humanité scinde le vivant entre le « nous » et le « eux » ?

Enfin, deux sculptures proposent une expérience totalement inédite. Eija-Liisa Ahtila s’est fondée sur des savoirs issus de la recherche en neurosciences et des thérapies mises en œuvre pour soulager les patients souffrant de douleurs de membres fantômes. La stratégie de ces dispositifs est de leurrer notre perception et notre cerveau. Sur des tables en bois, Ahtila a positionné deux moniteurs LED, comme le seraient deux miroirs appartenant au dispositif thérapeutique habituel. Le spectateur s’assoit à l’une des tables et se place de sorte qu’un de ses avant-bras soit dissimulé par l’image apparaissant sur le moniteur. Sa main, restée visible, peut mimer le mouvement que l’on peut suivre à l’écran. Au bout d’un moment, on oublie presque son propre membre caché et l’image vue sur le moniteur devient notre nouvelle réalité, une sorte de greffon numérique… La seconde table convie à une expérience encore différente en masquant cette fois nos deux mains afin que l’attention se concentre exclusivement sur l’image montrée à l’écran. Là encore surgit un prolongement improbable de soi.

Depuis 2005, Eija-Liisa Ahtila travaille sur des thèmes liés à la question de l’éco-cinéma, ou comment appréhender et représenter le monde à la lumière du réchauffement climatique et des autres crises écologiques. Son œuvre confronte la puissance créatrice de la biosphère, des écosystèmes à celle de l’humain. S’inscrivant dans la reconnaissance des droits aux autres êtres vivants, elle s’intéresse également à ce qui fait sens dans des thèmes plus larges tels que le colonialisme, la foi ou le posthumanisme.

Avec Potentiality for Love, Ahtila s’inscrit dans l’actualité avec une pertinence salutaire. Sans être prescripteur, son regard est résolument transversal, interrogeant la place de l’homme dans son environnement naturel, social et géopolitique, à un moment où ces thèmes appellent des réponses toujours plus urgentes. Dévoilée au Musée Serlachius à Mänttä-Vilppula en Finlande début février 2018, Potentiality for Love sera également présentée dans le cadre de la 21e Biennale de Sydney du 16 mai au 11 juin 2018 puis au Musée M de Louvain en Belgique du 18 mai au 16 septembre 2018.

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A PROPOS DE L’ARTISTE

Eija-Liisa Ahtila est née en 1959 à Hämeenlinna en Finlande. Elle a étudié l’art au London College of Printing et à l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA). En 2017 son œuvre Ecology of Drama a été successivement présentée à l’Australian Centre for the Moving Image (ACMI) à Melbourne, au Salon Dahlmann à Berlin, à la Galerie Marian Goodman de New York, au Museo de Arte Contemporáneo à La Corogne..

Son travail a été exposé dans de nombreux musées et fondations dans le monde : Musée Guggenheim de Bilbao, Oi Futuro à Rio de Janeiro, Albright Knox Art Gallery à Buffalo, The Israel Museum à Jerusalem, Lehmbruck Museum, Kiasma Museum of Contemporary Art à Helsinki , Moderna Museet à Stockholm, DHC/Art Foundation for Contemporary Art à Montreal, K21 Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen à Dusseldorf, The Museum of Modern Art à New York, parasol unit for contemporary art à London, Museo d’Arte Moderna e Contemporanea à Bolzano, Dallas Museum of Art, Zurich Kunsthalle entre autres. En France le Jeu de Paume lui a consacré une rétrospective en 2008 et le Carré d’art — Musée d’art contemporain de Nîmes une grande exposition personnelle en 2012.

  • Vernissage Vendredi 2 mars 2018 18:00 → 20:00
03 Le Marais Zoom in 03 Le Marais Zoom out

79, rue du Temple

75003 Paris

T. 01 48 01 70 52 — F. 01 40 27 81 37

www.mariangoodman.com

Rambuteau

Horaires

Du mardi au samedi de 11h à 19h

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