El fantasma de Tennessee
Exposition
El fantasma de Tennessee
Encore 29 jours : 23 mai → 26 juillet 2025
Carte blanche à Ana Mendoza Aldana
El fantasma de Tennessee, une exposition collective sur la mélancolie à partir de trois œuvres de Tennessee Williams et leur adaptation filmique.
Toi, je te bois cul sec.
Je te lèche, je te mange. Je t’engloutis. Mon ventre est tendu
comme un tambour,
mes yeux peinent à contenir les larmes
de mon plaisir. Tu me pénètres
jusqu’à la moelle. Je te possède, je te recouvre. Je
te conserve. Sous une cloche de verre, je te tiens, je te digère. Je t’assimile, tu deviens moi.
Avec les artistes : Nicole, Ella C Bernard, Omar Castillo Alfaro, Cécile Bouffard, Pierre Dumaire, Laura Huertas Millán, Liz Magor, Rafael Moreno, Hatice Pinarbasi, Jean-Charles de Quillacq, Caroline Rose Curdy
La mélancolie
La mélancolie est le refus de lâcher prise. Elle est une résistance au deuil et à l’oubli. La mélancolie est l’impossibilité d’oublier ce que nous ne savons pas toujours nous- mêmes avoir perdu, ce que nous refoulons ou ce qui nous manque : les sédiments, “les restes archéologiques, pour ainsi dire, du chagrin non résolu1”. Elle est la ténacité de la mémoire, même imparfaite ou recomposée, parfois à l’aide de la fiction.
La mélancolie conserve ce qui n’est plus. Elle est aussi fine que la couche de poussière qui se dépose avec le temps sur les photographies et les objets délaissés, et aussi forte et résistante que les fils argent d’une toile d’araignée.
La mélancolie est un refuge.
Vorace comme un fauve ou comme une plante carnivore, elle dévore le temps et s’acharne à convoquer le passé dans le présent. Elle entrave tout autant qu’elle nourrit la création. Elle peut être le creux de la vague avant sa remontée ou son écume lorsqu’elle se brise.
La mélancolie, comme le suggèrent de récentes publications2, peut être liée aux histoires de migration, à la solitude de nos environnements urbains où les liens se sont effilés, aux luttes de classes, à la discrimination raciale et aux expériences des minorités sexuelles et de genre. Elle est le spectre hérité de la colonisation et du capitalisme, et colle comme une ombre à celles et ceux qui ne savent plus très bien où sont plantées leurs racines.
La mélancolie est une absence omniprésente qui nous hante, un fantôme. Et ensuite ? Pour éviter l’abîme de la solitude, de la dépression et de la perte de sens, pour se refuser aux griffes de nos démons intérieurs, nous devons apprendre à négocier et à vivre avec ce fantôme.
El fantasma de Tennessee réunit onze artistes internationaux autour de trois pièces de théâtre phares du dramaturge américain Tennessee Williams. L’exposition se déploie dans l’ensemble de la galerie Marcelle Alix à Paris dont les différents espaces convoquent respectivement Suddenly Last Summer (1957), A Streetcar Named Desire (1947) et The Glass Menagerie (1944).
Ana Mendoza Aldana
Ana Mendoza Aldana est curatrice, critique d’art et poète. Elle pense et organise des expositions intellectuelles et sensibles depuis plus de douze ans prenant souvent pour point de départ la littérature. Elle accorde une place particulière aux questions et pratiques féministes et queer, ainsi qu’à la peinture. Depuis fin 2022, elle mène une recherche sur la mélancolie. Elle développe une forme de critique d’art empruntant ses jeux typographiques, ses formes musicales et narratives à la poésie.
1 “What Freud here calls the ‘character of ego’ appears to be the sedimentation of those objects loved and lost, the archaeological remainder, as it were, of unresolved grief”. Judith Butler, “Melancholy gender—refused identification”. Psychoanalytic Dialogues, 5(2), 165–180.
2 Qu’elles s’attachent aux questions coloniales et raciales, de classe, de minorités ou de genre, plusieurs études prennent pour référence la mélancolie pour étudier comment l’expérience de perte informe une vision et une connaissance du monde. Parmi quelques-unes: Melancholy gender—refused identification (1995) de Judith Butler, déjà cité ; Melancholy Order. Asian Migration and the Globaliza- tion of Borders (2008) de Adam McKeown ; El indio melancólico y temeroso. Representaciones de alteridad en dos textos de indias, Perú colonial siglos XVI-XVII (2014) de Germán Morong Reyes ; Melancolía de izquierda (2019) de Enzo Tra- verso ; Endless Mourning: Racial Melancholia, Black Grief, and the Transformative Possibilities for Racial Justice in Education de Justin Grinage (2019) ; Melan- cholia of Class : A Manifesto for the Working Class (2021) de Cynthia Cruz.
Les artistes
- Omar Castillo Alfaro
- Rafael Moreno
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Jean-Charles de Quillacq
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Laura Huertas Millán
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Liz Magor
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Cécile Bouffard
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Hatice Pinarbasi
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Nicole
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Ella C Bernard
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Pierre Dumaire