Ephemera et Paroles
Exposition
Ephemera et Paroles
Passé : 12 février → 23 mars 2019
mfc-michèle didier remet à l’honneur l’œuvre exceptionnelle de Christian Marclay, “Ephemera”, en lui consacrant une exposition en lien avec l’œuvre de Saâdane Afif, “Paroles”.
Depuis plus de 35 ans, Christian Marclay compose une œuvre plastique mettant la musique au cœur de son processus de création.
Né en 1955 en Californie et suisse d’origine, Marclay revient aux États-Unis en 1977, à une époque où une grande partie de l’expérimentation musicale, notamment la musique No Wave et Punk Rock, ont une forte influence sur le monde de l’art. Cette période marquera son travail, se situant à ce point de rencontre et d’influence entre la musique expérimentale et l’art : Christian Marclay aborde la musique en tant qu’artiste visuel.
Il créé son premier groupe The Bachelors, Even, en hommage à Marcel Duchamp et plus particulièrement à La Mariée mise à nu par ses célibataires, même, 1915-1923, se produisant également avec John Zorn, explorant le rapport entre le son et sa visualisation, entre performances, concerts et installations.
C’est durant cette première grande période d’expérimentation que débute son utilisation des platines vinyles et sa pratique des collages sous différentes formes, questionnant, tout comme les cultures rock et punk, l’usage marchand du disque et des industries culturelles.
Marclay assemble ainsi des pochettes d’albums, donnant lieu à des collages rappelant le jeu de cadavre exquis des surréalistes. Sa pratique de l’emprunt, de l’échantillon, l’inscrit dans la filiation de Dada et de Marcel Duchamp et relève de la démarche émancipatrice de Fluxus.
Nous avons eu le plaisir de produire en 2009 le collage Ephemera, composé de 28 folios.
Cette œuvre exceptionnelle est issue de l’accumulation de notations éclectiques et musicales glanées çà et là dans diverses publicités, illustrations, menus, emballages de bonbons, etc. Ces ephemeras ont été assemblés, puis photographiés et reproduits en une suite de 28 folios comme autant de collages. À partir de cet ensemble, Christian Marclay a créé une partition musicale destinée à être interprétée.
Représenter le son, lui donner une forme visuelle, est une entreprise vouée à l’échec. La partition échappe à cet écueil puisqu’elle ne constitue que le support matériel de la lecture, du jeu, ou du chant.
Il s’agit de décoder un langage. Par extension, et de manière délibérément ambiguë, une partition peut servir de représentation de la musique.
Les motifs kitsch d’Ephemera offrent ainsi une vue désarmante : apparaissent des éléments injouables, comme des clés de G perdues dans le vide, ou des portées dont les lignes errent et se perdent… Le collage opéré par Marclay permet de redonner un nouveau sens à ces éphémères.
Bien que The Clock (2010) soit souvent citée comme l’œuvre majeure de Christian Marclay, c’est bien la musique qui traverse toute son œuvre. Afin de remettre en perspective le caractère musical du travail de Christian Marclay, nous avons souhaité présenter Ephemera en corrélation avec l’œuvre de Saâdane Afif, Paroles.
Partitions, instruments, enregistrements, concerts et posters constituent également une part importante du vocabulaire artistique de Saâdane Afif. Qualifié de « post-conceptuel », son travail explore les notions d’interprétation ou d’échange et prend de multiples formes (performances, objets, sculptures, textes, affiches, néons). L’exposition est pour lui un prétexte de production ou d’activation. Il transfère sur les murs ses textes et statements à l’aide d’un système de lettres adhésives.
Depuis 2004, Saâdane Afif passe commande à des artistes, des écrivains, des compositeurs, des critiques d’art, de paroles de chansons inspirées de ses œuvres pour ensuite les exposer à leurs côtés. Cette démarche permet une véritable continuité, laissant peu de place au caractère figé des œuvres passées : se situant au cœur d’un réseau d’échanges, ces dernières revivent sous forme de chansons.
Un processus permettant à l’artiste d’associer d’autres personnalités à l’élaboration de son travail, proposant une réflexion sur l’œuvre elle-même afin de mettre en valeur l’idée qu’elle ne se construit jamais de façon isolée : “c’est une méthode qui permet de créer des mutations dans le travail en permanence, de faire muter des formes. Elles mutent, elles ne sont pas transformées. Je peux auto-citer mon travail et ça ne s’assèche pas, parce qu’il y a toujours un apport de l’autre.”
Paroles a donné lieu à un ouvrage regroupant 191 textes écrits par plus de 100 auteurs au court des 15 dernières années, publié à l’occasion de l’exposition éponyme du Wiels à Bruxelles en 2018.
Nous présenterons pour cette exposition les Paroles de Tacita Dean, André Magnin, Jonathan Monk, Emilie Pitoiset, Michael Riedel, Anri Sala et Sarah Ancelle Schönfeld, interprétées par des musiciens ou chanteurs lors de trois concerts qui se dérouleront durant le cours de l’exposition.
Les œuvres de Marclay et Afif ont pour point commun de ne pas se laisser enfermer en un seul objet ou une seule forme, laissant place à une oralité et une musicalité qu’elles peuvent évoquer où à laquelle elles se destinent.
Ephemera et Paroles explorent l’interprétation découlant des rencontres avec une œuvre, rappelant la citation de Marcel Duchamp: « c’est le regardeur qui fait l’œuvre ».
Alors que Paroles est une œuvre résultant de commandes auprès de différents auteurs, cette nouvelle exposition la présente sous une nouvelle dimension : celle-ci devient matière et prétexte à une nouvelle interprétation d’Ephemera.
C’est cette liberté inhérente aux processus de création de Marclay et d’Afif à laquelle nous souhaitons rendre hommage à travers cette exposition et l’organisation de trois concerts exceptionnels, interrogeant par là-même les rapports que la musique entretient avec les arts plastiques.
Trois concerts se dérouleront durant le cours de l’exposition :
— Le jour du vernissage, samedi 9 février, de 19h30 à 20h, avec la soprano Eléonore Lemaire accompagnée du percussioniste Richard Dubelski;
— Le vendredi 22 février, de 19h30 à 20h;
— Le dernier jour de l’exposition, le samedi 23 mars de 19h30 à 20h, avec l’artiste Emilie Pitoiset accompagnée du musicien Shantidas Riedacker.
Horaires
Du jeudi au samedi de 14h à 18h
Sur rendez-vous