Ethan Murrow — Hankering for the Past

Exposition

Dessin

Ethan Murrow
Hankering for the Past

Passé : 17 décembre 2015 → 20 janvier 2016

J’ai grandi dans le petit état du Vermont, à la campagne, au nord-est des Etats-Unis. Un raccourci du français vert de montagne, il s’agit d’un endroit réputé pour ses très belles terres agricoles, sa forêt luxuriante et ses villes pittoresques. Chacun a coutume de se pâmer devant cet Etat que l’on trouve magnifique car il apparaît tel que dans le passé. Nombre de ses vieilles maisons et anciennes granges ont été joliment restaurées et retrouvé leur aspect d’origine. La nostalgie est célébrée avec une idéalisation du 19ème siècle liée à l’époque coloniale et ses idéaux agraires en matière de propriété et nationalisme. Je ne suis pas sûr qu’aucun d’entre nous aurait aimé vivre dans une ferme au 19ème siècle, avec quelques moutons broutant sur des sols rocailleux, froids et déboisés. C’est pourquoi le terme nostalgie s’applique parfaitement à cet Etat : la vérité est arrangée afin de nous apparaître plus agréable. Oui, je suis complice de tout cela. Ma famille a emménagé dans cet Etat afin d’y exploiter une ferme dans les années soixante-dix. Certes, c’était assez fantastique de grandir dans cet environnement, il ne s’agissait pas de casser de la roche ou de s’occuper de la traite de minuit. Ce récit arrangé s’appuie en effet sur de bonnes raisons. L’Etat a besoin de revenus, l’histoire apporte du répit et du réconfort, particulièrement aux visiteurs et l’on a pris l’habitude de croire en ce récit. Ainsi, j’ai pris moi aussi l’habitude de ce retour en arrière toujours sélectif — la vie en rose.

Nous pouvons nous arranger avec la nostalgie et rejeter les faits qui nous dérangent en les transformant en notions romantiques mais à la fin de la journée, nous en sommes tous au même point qui consiste à utiliser cette méthode pour gérer nos rêves et nos attentes. Ne se contenter que de la vérité n’est humainement pas possible, nous avons besoin de nous déconnecter de la peine occasionnée par une histoire désordonnée et ses invraisemblances. En réalité, les êtres humains sont très doués pour éviter de faire face à la réalité. Ainsi, nous racontons des histoires, élaguons en conservant ce qui nous plaît et en nous débarrassant des conflits désagréables. La moitié de moi en a terminé avec cette vérité arrangée car je sais que nous devons croire en nos ancêtres et notre passé afin d’être en mesure de travailler ensemble. L’autre moitié de ma personne, en pensant à cette ferme de mon enfance et les mensonges qui vont avec, veut y mettre le feu.

La nostalgie est une réparation artisanale. C’est une opération consistant à se rétablir. L’époque de la guerre froide ressort des profondeurs de l’océan et l’on en tire une histoire arrangée par ses récipiendaires. La nostalgie est en même temps une commodité et un pouvoir et elle a la capacité de cacher dans les archives les faits brutaux de la réalité racontés par quelques uns sur l’histoire d’une majorité.

Ces dessins sont imprégnés d’idéaux et de stéréotypes, des sauvetages imparfaits et des réparations laborieuses du passé. Ils sont intégrés dans des scénarios de réhabilitation où sont gérés le déroulement et l’issue dans un enrobage de luxe et des héros flamboyants. Ils sont enveloppés dans une hésitation fourbe et un simulacre de négociation tandis que l’ancien rencontre le nouveau et que l’affrontement commence. Ce ne sont avant tout que des versions car l’histoire n’est que ça.

  • Vernissage Jeudi 17 décembre 2015 à 18:30
La Galerie Particulière Galerie
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16, rue du Perche

75003 Paris

T. 01 48 74 28 40

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