Gilles Barbier — Entre, dans, derrière, sous, sur...
Exposition
Gilles Barbier
Entre, dans, derrière, sous, sur...
Passé : 11 septembre → 31 octobre 2020
L’art de Gilles Barbier c’est à la fois un mot sur le bout de la langue, une idée derrière la tête, un clair-obscur entre deux éclaircies. Il n’y a pas de « fenêtre ouverte sur le monde », métaphore allouée à la peinture depuis qu’Alberti a oublié de refermer la sienne ; chez Gilles Barbier il y a une lucarne dans un cosmos aussi singulier qu’infini, une pensée qui conduit à un système aussi formidable que généreux pour ré-enchanter le monde.
Pour sa douzième exposition personnelle à la galerie, Barbier réalise une série de dessins dont les titres commencent par des prépositions : Entre, dans, derrière, sous, sur… Laisseraient-elles penser l’art et le monde dans tous les sens ? Né au Vanuatu, Gilles Barbier est fasciné depuis l’enfance par les « dessins de sable ». Ces dessins traditionnels prennent forme à mesure qu’une histoire est racontée et leur écriture se lit dans toutes les directions. Une « préposition » est un mot-outil servant à lier syntaxiquement un mot à celui qui le précède, dans une relation de subordination. La position, c’est important, explique Gilles Barbier. Entre, dans, derrière, sous, sur… sont autant de déplacements de l’artiste autour du motif enfoui dans un système complexe ; comme une vague qui malaxe tout dans un flux continu, un maelström.
Gilles Barbier semble préoccupé par l’aspect lisse de la couche laissée par le réel à la surface du monde. Alors il décide de l’écorcher, la trouer — comme une orange qui une fois épluchée dévoile le réseau dense et complexe de la pulpe qui explose soudain sous la pression du presse-agrume. Pour autant, chez Gilles Barbier, il n’y a pas d’orange mais une banane ! L’esprit de la glisse, cet effet de surprise qui vous prend par dessous (voire par derrière), capable de vous renverser en l’espace d’un instant, bouleverser les pensées, rapprocher les contraires, et penser le monde Vu d’en bas. Quoiqu’il en soit, l’arrière-plan sexuel flotte Entre, dans, derrière, sous, sur…
C’est grâce aux mots cachés derrière la pensée artistique que surgit la cosa mentale, ce dessein qui éclate enfin et perd son -e en chemin. Gilles Barbier aime l’idée d’une « corbeille mentale » prête à réceptionner le flot intarissable d’idées qui se glisse dans ses images.
Les « machines à produire » de l’artiste débordent souvent et mettent en mouvement une pensée libératrice, matière sans limite, à l’image de ces câbles entremêlés derrière lesquels surgissent des étincelles hic-nunc, dessous-dessus et devant-derrière. Ces câbles sont ceux de l’intelligence artificielle, cette I.A. qui envahit le monde… jusqu’à étouffement ? L’idée de réseau circule partout, entre, dans, derrière, sous, sur… ces grandes compositions : le papier devient la surface d’expression d’une exploration sous la peau des choses. Le motif perd de sa figuration et libère le geste de Gilles Barbier : « La page est ma plage ». Il tisse l’essence et les sens des images, extraites de la vie et des replis les plus intimes de la mémoire. Comme Entre les plis (les souvenirs), la langue s’est glissée dans toutes les strates de l’œuvre de Gilles Barbier.
Agate Bortolussi
Horaires
Tous les jours sauf le dimanche de 10h à 17h