Hrafnkell Sigurösson — Unfolding Landscapes

Exposition

Photographie, vidéo

Hrafnkell Sigurösson
Unfolding Landscapes

Passé : 4 décembre 2010 → 15 janvier 2011

À certains voyageurs du Grand Tour, le passage des Alpes inspirait une terreur fâcheuse. Entre les villes distinguées de l’Europe du Nord et les contrées pittoresques de l’Italie méridionale se dressaient des barricades d’abîmes et de sommets fracturés. Ce paysage de ruine irrationnelle offusquait leurs sens raffinés. Pour s’épargner la vue de cette horreur, ils avaient coutume de tirer les rideaux de leur carrosse quand ils traversaient la haute montagne.

Ce montage touristique de l’odieux semble s’appliquer aux nouvelles œuvres de Hrafnkell Sigurösson. Le dispositif formel de ses photographies, qui rappelle celui des retables et que Sigurösson a déjà utilisé dans le passé, établit une sorte de dichotomie entre les deux images, lesquelles acquièrent le statut de tropes culturels, images qui, tour à tour, dissimulent l’autre avant de lui céder la place. Dans ses dispositifs doubles antérieurs, Sigurösson cachait un panorama immaculé de l’hiver islandais derrière un gros plan de décharge, et semblait les associer par des séries d’opposition : le naturel contre l’artificiel, le sacré contre le profane, le bénéfique dissimulant le maléfique.

Dans une certaine mesure ces nouvelles œuvres surmontent la dimension morale inhérente à ce travail (il serait inexact de laisser entendre qu’il existait une hiérarchie précise.) Un paysage d’hiver sous un vaste ciel bleu s’ouvre et s’efface devant une éruption tumultueuse. Deux facettes de la nature et deux images islandaises par excellence. Pourtant, contrairement à celle du Grand Tour, cette vulgarité de la nature, qu’est le volcan Eyjafjallajökull, est perçue avec un étonnement mêlé de crainte respectueuse. La réaction universelle à l’éruption de l’Eyjafjallajökull au printemps 2010 fut un moment sublime, la puissance et la grandeur du volcan ont été ressenties partout dans le monde. Le volcan a provoqué le chaos général en clouant les avions au sol. Il a été, pour l’essentiel, une terreur invisible, mais qui a donné une échelle d’humilité au monde.

Mais dans ce travail, nous voyons l’explosion et les émissions de très près ; en effet, l’éruption précédente plus modeste du Fimmvöröuhals, juste à côté de l’Eyjafjallajökull, est devenue en quelque sorte un site de pèlerinage. Venus en voiture, les gens marchaient et grimpaient pour s’approcher de cette manifestation phénoménale de la nature, un voyage que Sigurösson lui-même a fait. Cependant, ces photographies n’ont pas été prises par lui. Il a préféré utiliser un stock de photos commerciales du paysage et du volcan. On peut voir dans cette décision un retour aux années de formation de sa pratique artistique, quand il utilisait des images trouvées sous la forme de cartes postales et des diapositives achetées dans des magasins de souvenirs.

Les images sont spectaculaires malgré leur banalité, c’est toute une part de la conscience visuelle, dans la codification des cartes postales, les encarts de magazines, affiches, etc. Sigurösson accepte et atténue cet aspect par la disjonction qu’opèrent les images extérieures. Les compositions se répètent, avec des effets de glissement et d’écho, comme si l’on voyait le moment précis ou l’image est mécanisée. La main de l’artiste, de l’homme, est explicite.

Les voyageurs du Grand Tour choisissaient de fermer les rideaux devant l’horreur de la montagne, Sigurösson nous donne la même possibilité. Il nous invite implicitement à choisir et à changer la scène qui s’offre à nous. Il nous tente avec une interprétation morale d’une hiérarchie entre les images, mais il la laisse en suspens ou imparfaite. À mesure qu’on ouvre et referme l’œuvre, l’absolu recule ; l’homme est le pivot du sens. Aussi belles que soient les images nous les comprenons comme des objets culturels, comme le philosophe grec antique Protagoras, l’a remarqué, « l’homme est la mesure de toutes choses » .

Gavin Morrisson

La vidéo

La vidéo 7 × 7 est basée sur des images tournées en extérieur dans les montagnes de l’est de l’Islande. Sigurdsson a organisé une performance avec quarante-neuf hommes, vêtus de combinaisons de travail orange avec des capuches, debout sur une grille dans le paysage d’hiver. Balançant le poids de leur corps d’un pied à l’autre, ils créent une chorégraphie simple, soutenue par une bande sonore rythmique créée par E. Gudmundsson, qui évolue du bruit ambiant des pieds tapant dans la neige à un battement numérique. La caméra est généralement placée au milieu du groupe, montrant des plans rapprochés des dos des hommes en mouvement. Le vêtement orange remplit si bien l’écran qu’il y a peu ou pas d’image figurative à laquelle se raccrocher. De temps en temps, une vue large prise depuis une grue montre la scène en entier. Cependant, le spectateur ne voit jamais les acteurs individuellement ; cette masse d’hommes anonyme est seulement vue par derrière. La source de ce travail provient d’un récit local sur le seul plus grand projet de construction dans l’histoire de l’Islande, une centrale électrique hydraulique qui à obligé des centaines de travailleurs immigrés étrangers à rester dans ces montagnes arides pendant des périodes prolongées. Le rituel manifestement futile, mais pourtant strictement organisé, reflète un glissement dans le rapport de l’homme avec la nature. L’expérience solitaire de l’individu romantique, un sujet classique dans l’histoire de l’art, est remplacée par l’impassibilité du groupe homogène. Ce travail à été montré de différentes manières, toujours sous la forme une projection sur grand écran, mais avec des miroirs disposés dans l’espace, de sorte que l’image soit multipliée.

  • Vernissage Samedi 4 décembre 2010 à 18:00
Galerie Gabrielle Maubrie Galerie
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04 Beaubourg Zoom in 04 Beaubourg Zoom out

24, rue Sainte Croix de la Bretonnerie

75004 Paris

T. 01 42 78 03 97 — F. 01 42 74 54 00

www.gabriellemaubrie.com

Hôtel de Ville

Horaires

Du mardi au samedi de 14h à 19h

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L’artiste

  • Hrafnkell Sigurösson