Jean-Charles Eustache — Car le temps est proche
Exposition
Jean-Charles Eustache
Car le temps est proche
Passé : 14 avril → 27 mai 2023
La galerie Claire Gastaud est heureuse de présenter dans son espace parisien, du 14 avril au 27 mai 2023, l’exposition monographique de l’artiste Jean-Charles Eustache dont le commissariat a été confié à Jean-Charles Vergne, directeur du FRAC Auvergne. Est présenté un ensemble d’une vingtaine d’œuvres récentes spécialement réalisées pour l’exposition qui esquisse des narrations potentielles dans l’univers si particulier de l’artiste : peintures à l’acrylique sur panneau de bois de petit format dont l’étonnante matité ainsi que le traitement diffus de ses couleurs leur confèrent un aspect minéral et onirique.
Jean-Charles Eustache est né en 1969, il vit et travaille en France. Il est diplômé de l’Ecole Supérieure d’Art de Clermont Métropole en 2004. Il s’est employé, durant ses études, à bâtir une œuvre picturale dont les premières orientations ont servi de socle à tout ce qui a suivi dans les années suivantes. Les premières œuvres étaient déjà des paysages chargés d’atmosphères mystérieuses, des étendues parcourues de constructions abandonnées, d’architectures sans qualité, d’ambiances qui vacillaient entre une perception romantique du monde et une charge sombre qui n’était pas sans évoquer alors la peinture d’Edward Hopper ou les films de David Lynch.
« Les peintures figuratives — appelons-les ainsi par commodité — réunies dans l’exposition organisée à la galerie Claire Gastaud représentent des visions, inspirées des souvenirs et des rêves entêtants de l’artiste, également empruntées au champ de la littérature apocalyptique (Dante, E.A. Poe, Cormac McCarthy) ainsi qu’aux annonciations sombres ou aux révélations épiphaniques qui frappent enfants et bergers dans les récits religieux. » ainsi que des œuvres moins narratives, s’apparentant à des grilles, des gaufrages : « Lorsqu’il réalise des surfaces dont l’agencement pourrait s’apparenter à des grilles méticuleusement ordonnées, Jean-Charles Eustache ne fait pas des peintures abstraites, à supposer qu’une chose comme l’abstraction puisse exister ailleurs que dans les visions éthérées des rêves et des révélations. Au contraire, il rend compte dans ces fresques miniatures d’un moment intime et tout à fait réel, dédié à l’observation de murs et de façades caressés par la lumière du soleil. » Jean-Charles Vergne, Directeur du FRAC Auvergne En 2021, la Galerie Claire Gastaud de Clermont-Ferrand et le FRAC Auvergne ont organisé une double exposition dédiée aux peintures de Jean-Charles Eustache — intitulée From dark to dusk et From dusk to dark — à l’occasion de laquelle a été coédité une monographie de l’artiste.
Les œuvres de Jean-Charles Eustache sont régulièrement présentées dans différents lieux d’art contemporain : Galerie Claire Gastaud, Clermont-Ferrand ; FRAC Auvergne, Clermont-Ferrand ; Manifesta Lyon, Lyon ; Grand Palais, Paris ; Fondation Vuitton, Paris ; Centre d’Art Contemporain, Meymac ; Musée d’art moderne et contemporain des Sables-d’Olonne, Sables-d’Olonne ; Fondation d’entreprise Ricard, Paris ; Centre d’art contemporain Le Creux de l’Enfer, Thiers ; Kunstraum/Bethonien, Berlin.
La peinture n’est pas une image, c’est une évidence, et le rappeler n’est pas inutile car la beauté ne naît pas des images mais de la surface, de la profondeur, de l’intonation, de la lumière, de la délicate attention qu’une composition adresse à celles et ceux qui en sont les destinataires. Les images ont une surface mais cette surface s’abîme dans l’image comme un navire au fond d’un océan. Nous sommes des marins impuissants sous un déluge, nous ne voyons plus les vagues et cherchons en vain la profondeur alors que nous sommes déjà noyés au fond des eaux : c’est la raison pour laquelle il est si difficile de regarder correctement les œuvres qui s’emploient à mettre les images par-dessus bord, à bâtir les radeaux de fortune de notre regard. Jean-Charles Eustache est peintre et, en tant que tel, il ne produit aucune image car ses peintures n’ont à offrir que leur surface, absolument mate, absolument lisse, absolument profonde, digne d’un peintre primitif italien vouant un amour inconditionnel à ses étendues. Ses tableaux, à peine plus grands que la main qui les a enfantés, ne sont ni figuratifs ni abstraits et lorsqu’ils montrent des situations ou des scènes, ils demandent à être regardés comme des peintures et uniquement de cette manière.
Les peintures figuratives — appelons-les ainsi par commodité — réunies dans l’exposition organisée à la galerie Claire Gastaud représentent des visions, inspirées des souvenirs et des rêves entêtants de l’artiste, également empruntées au champ de la littérature apocalyptique (Dante, E.A. Poe, Cormac McCarthy) ainsi qu’aux annonciations sombres ou aux révélations épiphaniques qui frappent enfants et bergers dans les récits religieux.
Cieux consumés par des embrasements faibles, monts surnaturels et prodigieux miraculeusement sortis de contrées désolées, soulèvements telluriques vers le firmament, arche obscure ceinturant les frondaisons impies de provinces maudites, ne sont finalement que les signes de l’inexistence de ces images dans le monde. Ces visions oniriques hallucinées ne vibrent que d’un hypothétique réel et dévoilent de fait la falsification des images dont elles sont les récipiendaires. Ces peintures s’offrent au regard qui sait voir, de la même manière que les spectres — fantômes et couleurs — ne se livrent qu’à celles et ceux dont les yeux écarquillés savent lire entre les lignes de brume des nuits de lune gibbeuse.
Lorsqu’il réalise des surfaces dont l’agencement pourrait s’apparenter à des grilles méticuleusement ordonnées, Jean-Charles Eustache ne fait pas des peintures abstraites, à supposer qu’une chose comme l’abstraction puisse exister ailleurs que dans les visions éthérées des rêves et des révélations. Au contraire, il rend compte dans ces fresques miniatures d’un moment intime et tout à fait réel, dédié à l’observation de murs et de façades caressés par la lumière du soleil. La durée s’est étirée, étiolée à mesure que se délitait la flamboyance du soleil vers ses derniers vacillements de bougeoir. La lumière et ses modulations ont lentement révélé les reliefs et les creux de la pierre, donnant une consistance de craie meuble à la surface observée, donnant une consistance aux heures et à l’insaisissable extinction du jour, faisant éclore l’imperceptible bleuissement de la surface de pierre effaçant peu à peu son léger rose églantine pour se teinter d’une couleur vespérale. Il déclarait à propos de ces peintures : "C’était l’été. Un bleu cristallin embrassait tout le ciel. J’observais, par la fenêtre de ma chambre, la lente évolution du soleil sur les murs de l’immeuble d’en face. Les ombres dérivaient paresseusement d’un angle à l’autre du bâtiment. Alors que j’assistais à ce silencieux ballet, j’avais la conviction que je jouissais d’un instant privilégié.
Je prenais toute la mesure du troublant pouvoir qu’exerçait la lumière sur les objets, comme sur notre mémoire.
J’avais pleinement conscience d’une temporalité élastique. Cette sensation de dilatation du temps m’amenait à une forme de disponibilité, de joie intérieure. D’une certaine manière, il me semblait que des lieux longtemps oubliés refaisaient surface."
Jean-Charles Vergne, commissaire de l’exposition
Jean-Charles Vergne est directeur du FRAC Auvergne, commissaire d’expositions et auteur. Il a conçu des expositions et des livres consacrés à Jean-Charles Eustache, Dirk Braeckman, David Lynch, Katharina Grosse, Luc Tuymans, Raoul de Keyser, Gregory Crewdson, Albert Oehlen, Marina Rheingantz, Miryam Haddad, Charles Pollock, Richard Tuttle, Darren Almond, David Claerbout, Claire Chesnier, Agnès Geoffray, Shirley Jaffe, Gert & Uwe Tobias, Marc Bauer, Pius Fox, Ilse D’Hollander, Mireille Blanc… Il est le commissaire de l’exposition itinérante consacrée à Gregory Crewdson depuis 2022 (Gallerie d’Italia, Turin, 2022 — Rencontres photographiques d’Arles, 2023…) et à Lucas Arruda en 2024 (FRAC Auvergne, CCC-OD, Musée Soulages). Il est l’auteur des 3 saisons des podcasts Cartels sur l’art.