L’Asile des photographies

Exposition

Photographie

L’Asile des photographies

Passé : 13 février → 11 mai 2014

« En 2010, nous avons été invités à travailler par Le Point du Jour et la Fondation Bon-Sauveur sur les archives de l’hôpital psychiatrique de Picauville, dans la Manche, à une quarantaine de kilomètres de Cherbourg. Cette invitation faisait suite à une demande adressée par la Fondation au Point du Jour : les vieux bâtiments de l’hôpital seraient bientôt détruits ; il fallait, d’une manière différente, conserver la mémoire du lieu. Première originalité du projet, c’est une institution médicale qui avait sollicité une institution culturelle installée sur le même territoire. Nous ne savions pas précisément ce que nous trouverions mais on nous avait indiqué qu’un service audiovisuel animé par un infirmier passionné, Léon Faligot, disposait de films et de photographies anciennes ; parallèlement, nous aurions libre accès aux archives écrites de l’hôpital, et notamment aux dossiers médicaux datant parfois d’avant la Seconde Guerre mondiale. En découvrant les centaines d’images, des années 1930 à nos jours, conservées dans ces nombreux cartons, pochettes, classeurs, nous avons eu immédiatement le sentiment d’être tombés sur un trésor oublié. »

— Mathieu Pernot et Philippe Artières

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Mathieu Pernot, Le Dortoir des agîtés, Hôpital de Picauville (Manche), 2010 © Mathieu Pernot

Depuis une quinzaine d’années, Philippe Artières et Mathieu Pernot ont abordé, l’un en historien l’autre en artiste, des objets semblables à travers des formes qui tiennent de l’inventaire et de la mise en scène. C’est cette proximité de pratiques, devenue au fil du temps amicale, qui a conduit Le Point du Jour à leur proposer de travailler ensemble sur les archives de l’hôpital de Picauville. En 2004, Mathieu Pernot demande à Philippe Artières un texte destiné à accompagner les images de Hautes Surveillances (Actes Sud). Montrant l’intérieur vide de la prison comme une scène de théâtre et des proches qui s’adressent aux détenus depuis l’extérieur en hurlant, ces séries rendent compte de l’ordre carcéral mais aussi des libertés, infimes, prises par ceux qui y sont soumis.

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Mathieu Pernot, Inventaire, Hôpital de Picauville (Manche), 2010 © Mathieu Pernot

Évidemment importante dans le travail de Philippe Artières, l’archive est aussi présente dans celui de Mathieu Pernot. Pour son livre Un camp pour les bohémiens (Actes Sud, 2001), il a travaillé sur les carnets anthropométriques des nomades du camp de Saliers, à côté d’Arles, créé par le régime de Vichy. Dix ans plus tard, Philippe Artières explorera ces mêmes archives départementales des Bouches-du-Rhône pour l’exposition _Du bateau à la cité, l’enfermement à Marseille XVIIIe-XXe siècles_. L’attention aux systèmes répressifs n’exclut pas un intérêt commun « pour une histoire de l’ordinaire », selon le sous-titre de Rêves d’histoire — Pour une histoire de l’ordinaire de Philippe Artières (Les Prairies ordinaires, 2006).

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Mathieu Pernot, Ancien bloc opératoire, 2010 © Mathieu Pernot

Ce livre raconte sa pratique vagabonde des archives et les objets à la frontière du politique et de l’intime qu’elles suggèrent au chercheur.

Le Grand Ensemble (Le Point du Jour, 2007) de Mathieu Pernot pourrait être un de ces objets. Le photographe y mêle ses images d’implosions d’immeubles en banlieue à des cartes postales de ces quartiers au temps de leur splendeur. Agrandissant les personnages minuscules et associant les brefs messages présents sur les cartes, il rappelle cette humanité oubliée du fonctionnalisme architectural et du « renouvellement urbain ».

Les deux derniers livres de l’artiste et de l’historien révèlent à nouveau, sous de grandes questions politiques, le parcours d’individus anonymes. Dans Les Migrants (GwinZegal, 2012), Mathieu Pernot évoque la situation de migrants en montrant les restes de leur campement et des cahiers manuscrits dans lesquels ils racontent leur vie, plutôt qu’en réalisant un reportage traditionnel. Dans Vie et mort de Paul Gény (Le Seuil, 2013), Philippe Artières préfère, lui, le récit à l’étude pour enquêter sur l’assassinat d’un de ses aïeux jésuite par un « fou » à Rome dans l’entre-deux-guerres. Chacun de ces livres opère un usage croisé de l’image et du texte qui n’est ni illustration ni commentaire. Ils font émerger un sujet hors de l’autorité d’un discours scientifique ou de l’affirmation d’un style artistique. Ils laissent place à l’imaginaire pour comprendre les faits.

C’est à nouveau cette voie, documentaire et allusive, qu’ont empruntée Philippe Artières et Mathieu Pernot dans L’Asile des photographies.

Mathieu Pernot a, entre autres, exposé à la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (2009), au musée Nicéphore-Niépce (2007) et aux Rencontres d’Arles (2007, 2002 et 1997). Il est l’auteur de dix livres depuis Tsiganes (Actes Sud, 1999).

Directeur de recherches du CNRS à l’EHESS, Philippe Artières a publié La Vie écrite. Thérèse de Lisieux (Les Belles Lettres, 2011), D’après Foucault. Gestes, programmes, luttes, avec Mathieu Potte-Bonneville, (Les Prairies ordinaires, 2007) et Le Livre des vies coupables. Autobiographies de criminels, 1896-1909 (Albin- Michel, 2000). En 2013, il a dirigé, au Point du Jour, La Révolte de la prison de Nancy — 15 janvier 1972.

Philippe Artières et Mathieu Pernot ont ensuite collaboré à deux autres livres expositions collectifs consacrés à l’enfermement : Archives de l’infamie. Michel Foucault, un musée imaginaire. (Bibliothèque municipale de Lyon/Les Prairies ordinaires, 2009); L’Impossible photographie, Prisons parisiennes 1851-2010 (Musée Carnavalet/Paris-Musées, 2010).

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Les artistes

  • Mathieu Pernot
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