Laurent Montaron
Exposition
Laurent Montaron
Passé : 17 mars → 30 avril 2011
La troisième exposition individuelle de Laurent Montaron à la galerie rassemble deux nouvelles œuvres et Phœnix, une installation précédemment montrée à la Kunsthaus Baselland, à Bâle, à l’occasion de l’exposition monographique de l’artiste en 2010.
Phœnix (2010), est une installation constituée de plusieurs plaques de contreplaqué reposant sur des briques rouges, formant un plateau s’apparentant à une scène, sur laquelle repose un phonographe1 à cylindre de cire de marque Phénix. Lorsque l’appareil est activé, il diffuse la voix enregistrée d’une personne parlant en langues2.
Thomas Edison a été le premier à déposer un brevet pour le phonographe en 1877. Il était atteint d’une surdité grandissante et avait imaginé le phonographe pour immortaliser « les derniers mots des mourants ». Avec le phonographe, nous avons pu conserver la mémoire de voix que nous ne pouvions imiter. Son apparition — contemporaine de la découverte de l’inconscient — a permis, pour la première fois, d’entendre sa propre voix. Dans l’installation, le phonographe prend la place du souffleur et rappelle la formule du théoricien des médias Friedrich Kittler dans son ouvrage Grammophon Film Typewriter3: « comme le chariot de l’âme dans Phèdre de Platon, les médias sont des véhicules de transcendance.4 »
« Mon intention n’était pas seulement de mettre en image ces questions relatives à l’apparition des médias — bien que je croie en partie que celles-ci se posent aujourd’hui de la même manière qu’ elles se posaient, il y a 100 ans — mais aussi de faire de l’expérience de la disparition une part de l’œuvre. Comme plusieurs autres de mes pièces, à mesure qu’on écoute, le support s’abîme et l’on participe à la disparition du son. Le spectateur reste en quelque sorte comme le seul dépositaire de la mémoire de l’œuvre.5 »
Lent portrait de Sainte Bernadette (2011), est un film 16 mm projeté au ralenti, sans fin. Il consiste en une lente mise au point allant de la bouche vers les yeux de la sainte. Le corps incorrompu de Sainte Bernadette est figé depuis qu’elle s’est éteinte en 1879 à Nevers, où elle repose désormais. Pour les besoins du procès en canonisation, son cercueil sera ouvert trois fois et son corps retrouvé intact. Bernadette a été béatifiée le 14 juin 1925 et canonisée le 8 décembre 1933.
Minolta Planetarium MS-15 (2011) est une photographie grand format prise à l’intérieur d’un planétarium dans la ville de Memphis aux Etats-Unis. On y perçoit le ciel étoilé devant lequel finit par apparaître au premier plan la machine qui projette l’image des étoiles.
Ces trois pièces forment ici un ensemble qui permet d’appréhender plusieurs aspects du travail de l’artiste. Notamment l’intérêt qu’il porte à l’histoire contemporaine des médias, depuis l’apparition des techniques de représentation mécanisée à la fin du XIXème siècle jusqu’aux différentes formes actuelles de médias numériques. Leur avènement a transformé nos représentations et notre conception du monde. En modifiant l’établissement de nos systèmes de connaissance, ils ont aussi bouleversé nos croyances et, avec elles, l’image du Moi. Si l’image photographique a modifié la perception de l’espace, c’est au travers de l’enregistrement, de la manipulation et de la reproduction de l’image, du son et de la voix, que le temps, lui-même, a changé.
Le travail de Laurent Montaron s’attache aux paradoxes qui accompagnent notre conscience de la modernité et avec eux, aux outils qui façonnent nos représentations en y révélant parfois la part de croyance irraisonnée qui y est attachée.
1 Le phonographe permet d’enregistrer des sons ou un bruit grâce à un stylet solidaire d’une membrane de mica qui est mis en mouvement lorsqu’une vibration active le diaphragme situé à l’embouchure d’un cornet et grave les sonorités sur le cylindre. Dès que l’enregistrement est terminé, la gravure peut être lue. L’aiguille, faisant vibrer le diaphragme, transforme le sillon gravé en sons. La disparition définitive des cylindres de cires interviendra en 1929. Le terme « phonographe » a été par la suite progressivement utilisé pour faire allusion aux machines servant à écouter des disques.
2 Le «parler en langues» est une glossolalie. C’est une forme de prière à haute voix dans une langue inconnue de celui qui la parle. Le phénomène est rapporté dans la bible, dans les Actes des Apôtres ; Actes X, 34-48 : « … Ils les entendaient parler en langues et magnifier Dieu ». Il est notamment pratiqué par les églises méthodistes.
3 Friedrich A. Kittler, Grammophon Film Typewriter, Brinkmann & Bose, Berlin, 1986.
4 « Like the chariot of the soul in Plato’s Phaedrus, media are vehicles of transcendence or flight apparatuses into the great beyond. » Friedrich A. Kittler, op. cit., p. 13.
5 Extrait de l’entretien avec Daniel Baumann à paraître dans le catalogue Laurent Montaron aux presses du réel — Collection de l’Institut d’Art Contemporain, Villeurbanne/Rhône-Alpes.
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Vernissage Jeudi 17 mars 2011 18:00 → 21:00
12, rue de Picardie
75003 Paris
T. 01 42 77 02 77 — F. 01 42 77 02 72
Horaires
Du mardi au samedi de 14h à 19h
Et sur rendez-vous
L’artiste
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Laurent Montaron