Les origines de l’estampe en Europe du Nord — 1400-1470
Exposition
Les origines de l’estampe en Europe du Nord
1400-1470
Passé : 17 octobre 2013 → 13 janvier 2014
L’apparition de l’estampe en Occident constitue un phénomène majeur de l’histoire et de l’histoire de l’art. À partir de 1400, artistes et graveurs expérimentèrent diverses techniques permettant par l’impression d’une matrice gravée et encrée sur un support de créer et de diffuser des images multipliables à l’identique. À travers un choix de 83 œuvres, l’exposition montre la diversité des thèmes illustrés. Support et instrument de la dévotion du temps, la gravure a aussi servi des sujets plus audacieux, comme celui du désir charnel ou des scènes de genre dont la teneur nous apparaît aujourd’hui encore bien familière.
Si les estampes circulèrent très vite partout en Europe, les régions germaniques en furent le foyer principal, bien avant que cette invention ne fût transposée dans le domaine de l’impression des textes par Gutenberg vers 1450. L’exposition traite de l’apparition de ce phénomène en l’étudiant sur une période de 70 ans, jusqu’au début de la carrière de Martin Schongauer, graveur rhénan qui changea fondamentalement le statut de l’estampe au sein des arts. En réunissant pour la première fois deux fonds majeurs en France et en Europe — la collection de la Réserve du département des Estampes et de la Photographie de la Bibliothèque nationale de France et la collection Edmond de Rothschild du département des Arts Graphiques au musée du Louvre — elle met en lumière les différentes étapes de l’évolution de l’estampe, ses acteurs et ses modalités de production, ses rapports avec les autres arts et ses usages.
Expérimentation technique
En moins de soixante-dix ans, les graveurs mirent au point les deux grandes techniques qui restent encore aujourd’hui celles employées par les artistes, la gravure en relief sur bois — ou xylographie — et la gravure sur métal. Les premières estampes naquirent donc dans un contexte de bouillonnement expérimental incroyable, dont l’exposition souhaite rendre compte en montrant ensemble des œuvres fort différentes par leur esthétique. Le succès de ces images multiples fut assurément au rendez-vous, comme en témoigne la large circulation de motifs passant de la xylographie à la gravure sur métal, la copie de thèmes populaires, comme celui de la Crucifixion ou encore des astuces techniques permettant de produire à partir d’une même matrice différentes saintes en série. Cette expérimentation s’explique sans doute par la grande liberté qui caractérise le métier de graveur. Peu de sources permettent de connaître l’identité et la réalité sociale des praticiens de la gravure au XVe siècle, mais il est assuré que, contrairement aux autres corporations — sculpteurs, peintres, enlumineurs etc. — les graveurs ne furent pas soumis à des règles et un numerus clausus régissant leur métier.
Fonctions et usages
La demande en images était en effet forte et la gravure a parfaitement répondu à ce nouveau besoin, suscité par la dévotion du temps. L’immense majorité des gravures produites pendant cette période l’était dans un but de prière. Les communautés monastiques le comprirent d’ailleurs, puisqu’elles commandèrent des planches à des graveurs pour leur propre besoin, ou à des fins de catéchèse pour les laïcs dont elles avaient la charge. Mais certains usages plus étonnants existaient : la carte à jouer ou la carte de vœu… Quelques scènes plus profanes ou plus grivoises également, furent abondamment diffusées par la gravure sur métal, où l’on se plaisait à représenter la guerre entre les deux sexes ou à ridiculiser les moines…
L’unique et le multiple
Si l’estampe rompt avec l’économie de l’unique qui caractérisait jusqu’alors l’art du Moyen Age, elle n’est pas étrangère à l’art du manuscrit, bien au contraire. De nombreuses gravures étaient collées par leurs acheteurs dans des manuscrits comme images de protection. Cette réalité est aujourd’hui largement oubliée, car les estampes furent souvent sorties des manuscrits qui les abritaient au XIXe siècle pour être vendues aux collectionneurs et aux institutions. Elles pouvaient également constituer l’illustration principale de manuscrits peu onéreux, souvent écrits en langue vernaculaire, ou servir d’ornement d’appoint dans un livre. Le caractère hybride de telles productions caractérise bien le tournant culturel et technologique que connut le XVe siècle, où les images gravées puis les textes imprimés furent élaborés à quelques décennies de distance, instaurant une nouvelle ère qui perdurera encore bien des siècles en Occident.
Commissaire de l’exposition : Séverine Lepape, conservateur, responsable du service de l’estampe ancienne et de la Réserve, département des Estampes et de la Photographie, Bibliothèque nationale de France.
Aile Sully, 2e étage, salles 20-23
Horaires
Tous les jours sauf le mardi de 9h à 18h
Nocturne les mercredis, les vendredis jusqu’à 21h30
Lundi, jeudi, samedi, dimanche : fermeture des salles à partir de 17h30
Tarifs
Plein tarif 22 €
D’octobre à mars : le premier dimanche de chaque mois, l’accès aux collections permanentes est gratuit pour tous.