Les tiroirs du temps de Jacques Roubaud — Exposition collective

Exposition

Techniques mixtes

Les tiroirs du temps de Jacques Roubaud
Exposition collective

Passé : 30 janvier → 3 juillet 2021

Galerie martine aboucaya paris exposition jacques roubaud 1 1 grid Les Tiroirs du temps de Jacques Roubaud — Galerie Martine Aboucaya La galerie Martine Aboucaya présente une exposition articulée autour de la figure du poète, écrivain et mathématicien Jacques Rouba... 1 - Pas mal Critique

1/ D’abord, deux livres

Martine Aboucaya et Yvon Lambert sont heureux d’annoncer la parution de deux livres de Jacques Roubaud réunis sous le titre générique CoVaRu, Compositions, Variations, Ruminations (plus ou moins Oulipiennes). Ces ouvrages sont les premiers des cinq volumes suivants :
I. Mètres, Rimes, Formes
II. Expositions, Célébrations, Fabrications
III. Sextines, Quenines, Cousines
IV. Pan-Perdut
V. Tridents (2014-2015)

Ils contiennent une partie des recherches souvent inédites et souvent introuvables de Jacques Roubaud sous contrainte(s), ainsi que des réflexions sur des sujets favoris, tels la Mémoire et le Temps.

Pour chacun d’eux, il existe 40 exemplaires numérotés et signés par l’auteur, enrichis de marque-pages spécialement conçus pour ce projet de Charles Sandison, Peter Downsbrough, Robert Barry, Claire Morel, Angela Detanico & Rafael Lain, Valérie Mréjen, Daniel Gustav Cramer, Christian Boltanski, Merlin, Jason Dodge et Dominique Gonzalez-Foerster.

2/ De Jacques Roubaud

Compositeur de poésie, retraité de la mathématique, collectionneur de bibliothèques et homme de mémoire, Jacques Roubaud est un lecteur insatiable et sa volonté de donner à lire est infinie.

Dans un des chapitres de CoVaRu 2, intitulé Sphère de la mémoire, Roubaud s’appuie sur un certain Mr Goodman pour alimenter ses démonstrations et cheminements. Par un temps radieux et dans un endroit magnifique, Mr. Goodman réunit quelques savants pour une conversation magique autour de la Mémoire. Ce corpus renoue avec la manière, elle-même héritée des Anciens, des penseurs anglais du XVIIIe siècle : des voix conversent et une arborescence de lectures s’offre à nous. L’ordre des prises de parole suggère un exercice d’écriture à contrainte. Sont ici tour à tour convoqués philosophes, présocratiques, logiciens, néo-platoniciens, plus divers auteurs de traités sur la mémoire, un historien et quelques poètes. Le contenu des dialogues ne serait-il pas alors accessoire ou illusoire, l’essentiel étant la production ou reproduction d’une forme ? Sphère de la mémoire fait suite aux Echanges de la lumière (1990), et aura des suites traitant quant à elles du Nombre, du Temps et de la Mort.

Même s’il est impossible de débusquer toutes les pensées ainsi détournées, Il est tentant de chercher en quoi consistent leurs contributions et de tâcher d’identifier une partie des sources où puisent librement les voix. On constate alors un singulier travail de patchwork : Roubaud peut aussi bien réunir dans une même bouche fictive des pensées de plusieurs origines que diffuser dans le texte, en les distribuant à plusieurs voix, les réflexions d’un même auteur. Peu importe qui parle, du moment que se dégagent en s’opposant des visions du monde propres aux idéalistes spiritualistes (de Pythagore aux néoplatoniciens) ou aux empiristes anglais (Hobbes, Locke, Hume…) ou encore aux sceptiques, de Sextus Empiricus à des logiciens modernes comme Wittgenstein. Sans oublier la vision des poètes, entre la voix ancienne du Japonais Kamo no Chomei, dont Roubaud a traduit certains poèmes, et celles de Robert Desnos et Roubaud lui-même. Avec la complicité de Mr. Goodman, l’auteur distribue ses indices avec précision dans CoVaRu.

En fait, Nelson Goodman (1906-1998) était logicien, philosophe des sciences et du langage et collectionneur d’art américain. Il a profondément renouvelé par ses travaux les débats sur l’expérience esthétique, abordant la « vérité » de la fiction. Il est connu pour sa réflexion sur le problème de l’induction et a développé, dans la tradition de la logique cognitive, un paradoxe célèbre — The grue paradox — pour lequel Goodman invente l’adjectif « vleu » (grue en anglais) signifiant « vert jusqu’à une certaine date T et bleu ensuite. » On peut résumer sa réflexion par « l’incertitude de toute certitude » dans la connaissance (ou par « la certitude d’incertitude ») : « On ne peut être sûr de rien, ni même du fait qu’on ne peut être sûr de rien ». Ce questionnement de nos vérités nous place ainsi face à l’imprévisible. L’Art échapperait-il à ce principe d’incertitude ?

3/ Et une exposition

Nourri-pêle mêle des libertés — de pensées et de vies — abordées dans ces livres, le projet d’exposition Les Tiroirs du Temps se met naturellement en place et se construit autour des arts de mémoire et des contraintes. Il a pour lexique la perception, l’observation, la contemporanéité, le temps (précis ou élastique), l’éternité peut-être, l’équilibre, la mémoire personnelle ou collective, nos histoires singulières, le déjà-vu (que Freud citait comme déjà-rêvé) et fait donc la part belle à l’illusion dans une approche scientifique, un peu fantastique, fantaisiste, poétique et inventée.

Utilisant librement les arborescences narratives chères à Roubaud et aux siens, l’exposition présentera pour la première fois des fac-similés d’archives roubaldiennes autour desquelles seront réunis des artistes grandement liés à l’écriture, au protocole, à la fiction et à l’enchantement.

A nouveau, les temps à venir étant bien incertains, nous devons envisager que l’exposition pourrait durer plus longtemps que prévu. Elle est donc pensée pour se creuser, se répéter, se décliner, se transformer… Abordons-la comme un projet ludique et secret dans lequel nous allons tenter de (re)trouver les chemins du temps partagé. Compte tenu de ce que nous venons tous de vivre, 2021 nous oblige à de nouvelles perspectives et changements : A la façon des salons du passé, des rencontres et des évènements divers seront organisés. Cela prendra la forme de conversations et d’échanges, dans le respect des normes sanitaires. Des interventions récemment filmées de Jacques Roubaud seront projetées en séances régulières. Nous aurons également accès à un cycle de projection de films de fiction ou de documentaires choisis par Orson Roubaud, grand ami du poète. Line Herbert-Arnaud nous parlera par exemple d’escamotage et Iordanis Kerenidis évoquera l’intelligence artificielle dans différentes interventions dont la première est déjà annoncée pour le 32 février.
Il sera bien sûr recommandé de réserver ou de prendre rendez-vous.

Galerie Martine Aboucaya Galerie
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5, rue Sainte Anastase

75003 Paris

T. 01 42 76 92 75 — F. 01 42 76 92 60

www.martineaboucaya.com

Saint-Sébastien – Froissart

Horaires

Du mardi au samedi de midi à 20h

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Les artistes

  • Giulio Paolini
  • Hans Peter Feldmann
  • Jason Dodge
  • Daniel Gustav Cramer
  • Susanna Fritscher
  • Michael Snow
  • Robert Barry
  • Charles Sandison

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