L’esprit du temps

Exposition

Photographie

L’esprit du temps

Passé : 21 mai → 20 juin 2011

Il n’y a pas si longtemps, Jean-Louis Garnell composait un Triptyque (2007) bleuté, musical, estival, entre-deux. Dans un parc en Allemagne, c’étaient, l’année d’après, deux Enlèvements (2008), qui manifestaient sous un jour violent, dans un sous-bois sombre, acide, l’ambiguïté de l’élan, emportement, ravissement. Il est le même qui autrefois agençait des Suites, Découpes ; déployait ce qui avait Commencé en hiver, advenait Par le noir ; ou constituait cet univers en soi, Morimondo. Le même qui, sans cesser de penser que parfois « Une image ne suffit pas », mais en appelle d’autres (ce qu’il enseigne), aujourd’hui choisit de montrer de nouvelles images singulières. Dont il n’est pas interdit de penser que, autonomes, elles peuvent pourtant former, à l’occasion, un ensemble. Ce printemps. Ce sont un objet noir, composition froide, compacte, au contraire de celle à côté : un autoportrait laiteux, un peu flou, comme s’il regardait la scène qui suit, jeu de cartes éclairé à la bougie, peu nostalgique, impromptu — plus d’électricité, comment distraire les enfants adolescents ? ; avant la cascade de fleurs sur une branche de cerisier. Au fond, point d’orgue, deux couleurs pour une ombre, autoportrait encore, saturées, jaune jour, bleu de nuit. Puis, face aux images du premier mur, les trois dernières : une forêt d’hiver, à la fois antée, claire, profonde, hospitalière ; un dernier autoportrait, tourmenté, les yeux clos, étrange, en Chinois ; et ce cadre vide, comme lévitant, pour le dessin de son ombre portée sur le mur. Je n’ai pas parlé de technique : il va de soi que le photographe maîtrise son médium ; en chaque image et dans leurs rapprochements son art sert au mieux ses images. Mais au-delà, le rapport de l’artiste aux objets qu’il élit — personnes, nature, scènes quotidiennes ou mises en scène, intérieurs, détail —, la façon qu’il a de les montrer, comme autant d’évidences gardant leur subtilité, directement ou bien jouant, s’émerveillant des jeux de la lumière, des heures et des saisons, de la lune…, tout cela tient d’un rapport au monde, à la vie qui le traverse, et avec lui sa photographie.

Vie que nous traversons à notre tour, en témoins attentifs autant qu’il a su l’être, perceptif, réflexif. De cette attention constante — une façon d’être et de savoir où en sont les autres, le monde —, le photographe ne tire aucune image qui serait un arrêt du temps, qui fixerait quoi que ce soit — comment ? Il prélève, sans ôter à son contexte, un visage, un nocturne, des arbres… dont on ne saurait oublier ce à quoi ils appartiennent encore, à quoi déjà ils sont retournés, intacts. Nous voyons ces images neuves qui entrent en contrepoint, qui rendent ce printemps, auquel elles n’ont pas été dérobées. Rien ne saurait l’être à ce qui va de l’avant, nous transporte, s’écoule. En voici les traces, qui conservent un peu de son aura fugace, intense. Chacune bat son rythme, nous rappelle ce que nous vivons, qui a sa qualité. Tout cela fait de Jean-Louis Garnell un métaphysique.

Anne Bertrand
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L’artiste

  • Jean-Louis Garnell