Lignine Duress

Exposition

Photographie

Lignine Duress

Passé : 18 avril → 23 mai 2015

Le titre de l’exposition fait référence à une photographie présentée dans l’espace sous verrière, qui montre un arbre fendu après le passage d’un ouragan. La matérialité de l’arbre est exhibée, les fibres à l’aspect élastique se détachent de la plaie béante. La force de la tempête a fendu le bois, mélange de lignine1 et de cellulose. La fabrication du papier — un élément central pour Wolfgang Tillmans dans l’exploration de son medium — nécessite des doses variables de cellulose et de lignine. Or le papier durable et de haute qualité ne contient pas de lignine.

L’exposition présente deux manifestations radicalement différentes de matérialités photographiques imprimées sur le même papier d’archive durable avec des encres identiques quasi-permanentes. Tillmans continue à centrer sa pratique de l’exposition autour des questions de perception de la durabilité de l’image encadrée et de la fragilité de l’image sans cadre. Les impressions jet d’encre non encadrées sont physiquement vulnérables, mais elles sont protégées par le droit accordé au collectionneur de les réimprimer grâce à des données qui lui sont remises au moment de l’acquisition. Les photographies encadrées sont protégées physiquement mais le collectionneur ne peut reproduire l’œuvre sans l’aval de l’artiste. Cette dualité, contradiction entre le désir d’immédiateté et la longévité, sont des problématiques récurrentes dans le travail de Wolfgang Tillmans.

Les espaces principaux de la galerie réunissent six grandes photographies issues de deux groupes d’œuvres qui sont liés mais dont les concepts diffèrent et sur lesquels Tillmans a travaillé au cours de l’année 2014.

Toutes deux ont pour point de départ sa découverte de la brève coexistence d’une constellation de technologies numériques et analogiques. La télévision mal réglée de sa chambre d’hôtel à Saint-Pétersbourg était un produit de la première génération d’écrans plats qui n’avait pas la même vitesse de défilement de l’image et utilisait encore des signaux analogiques. Son appareil photo numérique haute définition a pu capturer le changement rapide de l’image télévisuelle à une vitesse impossible à atteindre il y a encore quelques années lorsque des bandes diagonales sombres apparaissaient sur ce type de photographies. À l’occasion de trois visites en 2014, Wolfgang Tillmans a exploré le potentiel de ce téléviseur, et en a tiré des images qui résultent d’une installation technique spécifique mais reflètent aussi plus globalement les modes de communication et le monde qui nous entoure. Si ces photographies peuvent submerger le visiteur au premier abord, leur énergie picturale génère une incroyable stimulation visuelle.

Apparemment en noir et blanc, les pièces sont en fait extrêmement colorées. L’oeil du spectateur soumis aux changements de couleurs qui s’opèrent à la surface de l’image n’a plus ses repères. L’image qui semble être en noir et blanc est en fait composée de nuances intenses de rouge, de vert et de bleu.

Les photographies Sendeschluss / End of Broadcast n’ont pas de signal reconnaissable. Elles représentent un état d’entropie qui pourrait inclure toute l’information superposée au même moment. Le titre évoque le moment, où pendant des années, tard dans la nuit, la coupure du signal marquait la fin du programme officiel.

On peut se souvenir avec nostalgie de cette époque, mais cette coupure pouvait aussi résulter de la censure ou de la violence.

À la fois générique et très spécifique, Sendeschluss / End of Broadcast résonne avec l’ensemble de l’œuvre de Wolfgang Tillmans qui aborde la question fondamentale de la création de nouvelles images dans un monde déjà visuellement saturé. Avec la technologie numérique, la quantité d’informations présente dans une photographie est quasiment infinie et semble suggérer plusieurs couches de lectures possibles d’une même image.

Les photographies de Weak Signal représentent à l’inverse un téléviseur en train d’essayer de décoder un signal faible et qui tente de montrer cette image avec en bruit de fond le son écrasant de parasites électromagnétiques statiques. S’il est impossible de comprendre de quoi il s’agit, il est néanmoins évident qu’il y a réception et émission. Il n’est pas précisé si ce malentendu est intentionnel ou accidentel.

Wolfgang Tillmans explore depuis longtemps les limites du processus photographique, utilisant diverses sources lumineuses, substances chimiques et techniques pour approfondir la question de la représentation au moyen de stratégies non-figuratives. Dans la lignée des séries abstraites Freischwimmer, Silver, Lighter, Blushes, et Greifbar, ces nouvelles œuvres sont également proches de son Memorial for the Victims of Organized Religion, une installation de photographies à première vue noires qui démontre qu’il est difficile de distinguer ce qui est proposé au spectateur de ce qu’il imagine voir.

encounter propose l’image de jeunes pousses dans un pot qui ont été accidentellement à moitié recouvertes pendant une longue période. Privées de lumière, elles continuent néanmoins de pousser et conservent leur couleur verte, quittant leur état naturel de « photogrammes ».

Wolfgang Tillmans est né en 1968 en Allemagne. Il vit entre Londres et Berlin. Il est lauréat de plusieurs prix, dont le prestigieux Turner Prize au Royaume-Uni, et cette année le prix Hasselblad. Ses œuvres sont présentes dans les collections de musées internationaux, parmi lesquels le MOMA à New York, le musée Ludwig de Cologne, la Tate Modern à Londres ou le Centre Pompidou à Paris. Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions depuis les années 1990. Ses dernières expositions personnelles ont eut lieu en 2012 à la Kunsthalle Zürich, au Moderna Museet de Stockholm, au MAM de Sao Paulo et au Museo del Banco de la Republica de Bogota ; en 2013, au K21 de Düsseldorf ; en 2014 au Philadelphia Museum of Art, et à la Fondation Beyeler de Bâle. Ses prochaines expositions incluent le Musée National d’Art Moderne d’Osaka (25 juillet — 23 septembre 2015) et le Hasselblad Center, Göteborgs Konstmuseum en Suède (1er décembre 2015 — 14 février 2016).

1 La lignine est un des principaux composants du bois, avec la cellulose et l’hémicellulose. Ses principales fonctions sont d’apporter de la rigidité, une imperméabilité à l’eau et une grande résistance à la décomposition.

  • Vernissage Samedi 18 avril 2015 18:00 → 21:00
03 Le Marais Zoom in 03 Le Marais Zoom out

10, rue Charlot

75003 Paris

T. 01 42 77 38 87 — F. 01 42 77 59 00

www.crousel.com

Filles du Calvaire

Horaires

Du mardi au vendredi de 10h à 18h
Les samedis de 11h à 19h

Abo original

L’artiste

  • Wolfgang Tillmans