Mathieu Pernot — Les Migrants

Exposition

Photographie

Mathieu Pernot
Les Migrants

Passé : 8 septembre → 20 octobre 2012

Mathieu pernot la traversee 2 grid Entretien — Mathieu Pernot Invité au Jeu de Paume et à la Maison rouge, Mathieu Pernot revient avec nous sur les généalogies de ses nombreux travaux. L’occasion de cerner les démarches d’un photographe qui s’inscrit dans la pure tradition documentaire tout en y injectant de nouveaux codes, très personnels.

Une image se trouve à l’origine de ce travail : une photographie entrevue dans un magazine associatif qui montrait quatre corps allongés à même le sol dans une forêt du nord de la France. La légende indiquait qu’il s’agissait d’afghans, probablement épuisés, qui se reposaient à l’abri des regards indiscrets. C’était une image violente, une photographie de guerre. Les corps semblaient morts et leur façon d’occuper l’espace évoquait la figure tragique du charnier.

C’est cette image que je suis allé chercher dans la « jungle » de Calais où les migrants séjournaient dans l’attente d’un hypothétique passage en Angleterre. Une image que je n’ai pas réussi à retrouver mais qui a finalement produit deux séries de photographies.

En 2009, j’ai photographié cette forêt comme un paysage à la fois éprouvé par le climat et traversé par une histoire. Les traces de cabanes et les restes de sacs de couchage en constituaient les signes les plus visibles. Peu de temps après, j’ai réalisé à Paris des photographies de migrants afghans en train de dormir, le matin très tôt, dans le temps que je disposais entre le lever du jour et la présence des policiers venus les évacuer. Les sacs de couchage abandonnés de la forêt étaient à nouveau habités par des corps que je ne pouvais qu’imaginer.

En 2012, j’ai rencontré Jawad et Mansour, tous les deux afghans réfugiés à Paris. J’ai confié à Jawad des cahiers d’écolier pour qu’il y écrive le récit de son voyage de Kaboul à Paris. À chacune de nos rencontres, il me donnait quelques pages de son histoire qu’il me traduisait. J’y voyais le journal d’une épopée moderne, l’histoire en négatif de notre mondialisation. Mansour m’a quant à lui prêté les cahiers qu’il utilisait pour ses cours de français. Des mots et des phrases de première nécessité étaient traduits en Farci. Un langage de la survie, une littérature de l’urgence. Je n’ai rien changé à ces cahiers, à la brutalité du texte et à l’aller retour que la traduction permettait d’établir entre sa vie d’avant et celle d’aujourd’hui.

Mathieu Pernot
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