Micky Clement — Waiting Period

Exposition

Photographie

Micky Clement
Waiting Period

Passé : 7 janvier → 13 février 2016

Sans hommes et sans visage, les paysages surnaturels de Micky Clément ont aboli l’humanité pour mieux la faire exister. Avec ce sentiment que la présence humaine est partout et nulle part. Sans lui donner corps, c’est le pouls du monde que saisit le photographe. 


Micky clement waiting period n wp 004 medium
Micky Clément, Micky Clement, Waiting Period N°WP-004, 2016 Tirage Fine Art — 120 cm × 180 cm _ Edition de 3 Courtesy of the artist & Galerie Derouillon, Paris

Waiting Period, série photographique de Micky Clément, émane d’une expérience circonscrite dans un espace-temps. Un peu comme dans un scénario, l’action se situe à Miami, au crépuscule. Là, le photographe a élu son point d’attache et saisi chaque nuit, le vent violent dans les hauteurs des palmiers. Rejouant à son tour la figure romantique de l’homme face à la nature, inquiétante et fantastique. Se lever sur une terre inconnue, avant que le soleil n’inonde de sa lumière une ville pleine de clichés, ce fut le désir de celui qui voulait éviter à tout prix de consigner une énième fois, comme tant d’autres l’avaient fait, des clichés vivants ; symboles d’une opulence, fastes urbains, cylindrées rutilantes, femmes peroxydées assommées et défigurées par leur richesse. Il fallait, à rebours, écorner et détourner le mythe. Trouver un coin de nature dans la ville. Lui donner des contours inconnus. Planter un décor. Il n’eut pas à le fabriquer et tomba nez-à-nez avec lui au petit matin dans cette nuit noire et pleine qui convoque puissamment le cinéma de David Lynch et possède une teneur dramatique saisissante. Cinématographiques, ces images ont également un vêtement pictural. Ses grands formats, notamment, laissent apparaître de larges aplats qui rappellent de loin en loin la technique du sfumato avec ici ou là des zones floues, vaporeuses, lisses et transparentes qui appellent une réalité peinte. En toile de fond, les habitants jamais figurés encore enfouis dans leur sommeil, le son des iguanes, et ces bourrasques de vent avant l’orage qui font danser les palmes. Capter ce flux, comme le cinéma l’aurait fait implique un temps de pose long pour rendre la beauté assourdissante et fascinante des mouvements, brusques, précipités et imprévisibles d’une nature prête à sortir de ses gonds. Il faut attendre là, seul, avant que n’éclate et ne gronde la tempête qui ruinerait la prise. Et espérer que le peu de lumière de cette matière noire dense et opaque qu’est la nuit, entre dans le capteur. Une minute vingt… Nous sommes à Miami, mais ces palmiers pourraient avoir poussé et surgi ailleurs. Le sol, ici, est devenu ce vaste hors-champ qui destine ces arbres, privés de racines, à rejoindre l’universel.

Léa Chauvel Levy
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