Jean-Luc Blanc
La matrice du projet artistique de Jean-Luc Blanc s’articule selon un protocole immuable qui donne à ses œuvres un caractère ambigu. Tout comme ses dessins, les peintures qu’il réalise à partir de 2000 reposent sur une pratique de la réappropriation : dans un premier temps, l’artiste collecte un corpus d’images trouvées, issues de différentes sources visuelles (cinéma, revues, articles de presse, cartes postales, publicités ou dernièrement des peintures sur visage de Serge Diakonoff). Il en repeint ensuite les motifs sur une toile de grand format en les isolant.
Là où Picabia restait fidèle aux photographies dont il s’inspirait, J.-L. Blanc les recharge, les représente : « Ma passion me porte vers ces images déjà constituées que j’organise d’une manière très disparate pour leur trouver une autre respiration, une autre voix. » La part cinématographique de ses œuvres lui permet de créer son propre langage : tel un cinéaste, il recadre ses sujets, le plus souvent en plan rapproché. Ainsi, le portrait d’un jeune homme en pull à col roulé issu d’une publicité pour une banque des années 1970 est entièrement retravaillé afin de lui conférer une atmosphère tout autre que celle de l’image d’origine. En ajoutant des cernes au visage de cet homme, le peintre lui a octroyé une dimension vampirique, renvoyant entre autre à l’esthétique des films expressionnistes allemands. De la sorte, les toiles agissent sur le spectateur, tout comme J.-L. Blanc a besoin que les images agissent en lui. Ce sont avant tout des regards — on pourrait presque dire des regards-caméra — qui nous apostrophent et nous fixent. Si proche et pourtant si lointain… L’œuvre de J.-L. Blanc souligne la tension entre une technique parfaitement maîtrisée et le caractère énigmatique que cette représentation renvoie au spectateur. N’y reconnaît-on pas d’ailleurs des images déjà vues, mais que l’on n’arrive cependant pas clairement à identifier ? L’apparente simplicité des saynètes, l’ordinaire des personnes portraiturées ne permettent pas, d’emblée, de capter la longue maturation qui les a vus naître. Un ailleurs, un univers indicible véhiculent une autre signification dont les traces se dévoilent parcimonieusement. Ces éléments épars d’une fiction se construisant au fur et à mesure composent un ensemble au charisme troublant relevant d’une étrange banalité. Il y aurait ainsi chez J.-L. Blanc un « secret à révéler derrière chaque image ». Et c’est au spectateur de se laisser prendre aux jeux du langage et de l’esprit.
Jean-Luc Blanc
Contemporain
Dessin, peinture
- Thèmes
- Cinéma, fiction, figuration, imagerie populaire, mass-culture, perception, portrait