Martha Araújo
Entre 1982 et 1987 Martha Araújo réalise une série d’« objets performatifs », sorte de vêtements que le public est invité à revêtir. Pour comprendre la dimension politique de ses œuvres, il faut garder à l’esprit qu’elles ont été conçues et confectionnées à une période de profondes transformations dans la manière dont les gens comprenaient la socialisation, alors méthodiquement réprimée par les régimes politiques autoritaires en Amérique latine. Mais il est également important de ne pas omettre une approche plus intime, celle de la relation à l’ « Autre », comme une manière de réaffirmer notre individualité et notre indépendance. Selon les propres mots de l’artiste, l’action dans la série Habito/Habitante suscite une « recherche pour la réussite utopique. Un exercice de transcendance. » L’acte de se libérer soi-même, de s’envoler et d’échapper aux contraintes est une action extrêmement symbolique mais aussi physiquement marquante. Pour Martha Araújo, le corps est un moyen de résistance, capable de raconter une histoire que les monuments sont incapables d’incarner.
La pratique de Martha Araújo redécouverte aujourd’hui, émergea à un moment très complexe de l’histoire brésilienne : elle débute à la toute fin d’une longue dictature pour se développer au cours des premières années d’une très jeune démocratie. De façon puissante et poétique, son travail exprime le désir de liberté après des décennies de répression. Dans la perspective plus spécifique de l’histoire de l’art, l’œuvre de Martha Araújo s’inscrit dans une phase de développement fondamental pour la consolidation de l’art brésilien de la seconde moitié du XXème siècle, dont des artistes tel·le·s que Hélio Oiticica, Lygia Clark et Lygia Pape peuvent être considéré·e·s comme les initiateur·rice·s.
— Martha Araújo