Alain Clément — 2009-2010

Exposition

Lithographie / gravure, peinture, sculpture

Alain Clément
2009-2010

Passé : 16 septembre → 23 octobre 2010

Je ne sais pas si désormais Alain Clément est plus sculpteur que peintre ou graveur. Il s’est longtemps limité à la peinture, au dessin et à la gravure, à la surface plane qu’il parcourait de volutes et arabesques dans un effort pour embrasser à la fois la surface et un divers de sensations colorées : entre expressionnisme et recherche décorative, entre sentiment et construction, avec des parentés chez Matisse et Léger. La part d’expression personnelle était forte, qu’il s’agisse d’évoquer des émotions ou de revenir sur les inspirations fortes de la tradition (Delacroix, l’expressionnisme allemand, Léger). Depuis une bonne décennie se sont ajoutées des sculptures, certaines plutôt des reliefs à accrocher comme des peintures, d’autres pleinement des sculptures dans l’espace, parfois même monumentales. Il s’agit de sculptures de peintre, colorées et flamboyantes le plus souvent. Le geste et les lignes sont sortis du plan.

Sculptures de peintre peut sembler désobligeant par rapport aux « sculpteurs — sculpteurs », mais l’artiste y trouve au moins un énorme avantage : il peut se dispenser (et nous dispenser) de se donner la migraine à réfléchir sur l’essence de la sculpture. La sculpture, c’est la peinture poursuivie par d’autres moyens… En retour, l’expérience de l’espace a dépouillé en partie le geste pictural de sa qualité subjective et expressive. Comme si le passage par l’extérieur avait filtré les émotions. Les peintures sont paradoxalement devenues plus planes, plus denses et plus serrées avec leurs rubans de couleur s’organisant en plans simples. Au fur et à mesure de ces inflexions, Alain Clément a fait naître un univers personnel, détaché des changements de tendances mais pas bloqué de manière anxieuse sur la production d’une image facile à identifier. Cet univers est formel ; il a une cohérence forte à travers des variations fortes elles aussi. On y trouve la présence d’une volonté expressive qui cherche à rassembler et mettre ensemble, composer, vécus des émotions, vécus des formes et vécus des prédilections artistiques. Quelque chose apparaît qui n’est ni lisible sentimentalement (« voyez ce que je sens »), ni fortement référencé (« voyez d’où je viens »), ni déchiffrable comme message (« voyez ce que je veux dire »). Dans le caractère visible et énigmatique, il y a juste une affirmation d’art. Ce qui n’est plus si commun.

Yves Michaud

Perpétuant le rythme triennal de présentation de ses dernières œuvres à la galerie baudoin lebon, Alain Clément inaugure la saison 2010-2011. Gouaches sur papier, montages avec photographies, huiles sur toile et sculptures en tôles d’acier, murales ou en ronde bosse, déclinent la démonstration d’une pratique sans discours, dans l’évidence du faire et du voir.

Le dessin sert de pierre d’angle à l’œuvre nouvelle. Des lignes souples, rubans de gymnastique, traversent le champ de la peinture, y retournent pour s’y boucler ou s’y tendre. De l’ancienne manière, on retrouve la superposition mais moins d’enchevêtrement. Le trait est vigoureux, son graphisme sert autant la composition que la luminosité. La confusion fond/forme chère à l’artiste triomphe dans ces lacis et se joue entre crayon, fusain, griffures, traits de pinceau et plans tramés, opaques ou translucides. Quelques tracés à la bombe floutent les rapports. Le regard force, l’attention se concentre. La peinture emprunte au vocabulaire photographique et l’œil perd ses repères.

Pour les peintures sur toile tout autant que celles sur papier, les couches de peinture/couleur, les écrans tramés, les fins lacets creusés dans le frais, traversent les plans, les interpénètrent. Et c’est encore une fois l’ambivalence des genres : une peinture au goût d’instantané photographique, une sculpture d’un trait de crayon, un dessin lentement monté couche après couche, a fresco. La gamme colorée reste sur les couleurs habituelles de l’artiste : blanc, rouge, bleu, noir dans une déclinaison franche. On trouve toutefois quelques tons rompus très denses et d’autres inattendus dans la palette de l’artiste, plus osés, souvent très gais.

Au début des années 90, Alain Clément, alors qu’il commence à travailler la sculpture, teste aussi dans son atelier quelques peintures sur des photographies, des portraits grands formats qu’il rehausse de larges traits colorés. Le motif est tour à tour accentué, nié, dissimulé par la peinture, traité à la fois comme sujet et comme objet. Il pousse aujourd’hui plus loin son expérience photographique. Équipé depuis peu d’un appareil numérique, tout est prétexte à cliché. Il use du déclencheur comme d’un regard-crayon-prise de note. Le regard d’un peintre, celui d’un sculpteur. Les fragments de sculptures, de corps, d’architectures, groupés par deux ou trois sur des gouaches sur papier, combinent espace réel/espace fictif. Ce sont les photographies qui rendent tangibles, nommables, les espaces gouachés.

La singularité de l’œuvre d’Alain Clément repose sur les rapports étroits qu’il tisse dans des allers-retours constants entre peinture et sculpture, rapports enrichis de la pratique de la gravure à laquelle il réserve toujours un soin particulier. À l’instar du dessin, elle lui permet de faire le point dans ses recherches liées à l’espace par une attention reportée sur le travail de la ligne. Le paradoxe court toujours qui prétend par cet exercice faire de l’espace bidimensionnel de la feuille de papier ou de la toile le terrain d’expérimentation de l’espace sculpté… Quand Alain Clément faisait ses reliefs muraux peints, il parlait de couleur en volumes, elle en perturbait les plans. Aujourd’hui, c’est toujours à la peinture qu’il confie ce rôle mais dans sa dimension graphique.

Valeurs, traits, lignes, rubans et trames travaillent l’espace, le nient, le forcent, le creusent, dans une œuvre profuse, dépassant les problématiques formalistes et affirmant le pouvoir expressif et polysémique de la peinture.

  • Alain Clément Vernissage Mercredi 15 septembre 2010 à 18:00
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42 rue de Montmorency

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T. 01 42 72 09 10 — F. 01 42 72 02 20

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