Anne-Charlotte Yver — Leaking Point

Exhibition

Architecture, installation, sculpture, mixed media

Anne-Charlotte Yver
Leaking Point

Past: January 11 → March 8, 2020

Pour sa première exposition aux Tanneries, Anne-Charlotte Yver (née en 1987 à Saint-Mandé, vit et travaille à Paris) investit la Grande Halle afin d’y déployer une structure filiforme teintée d’étrangeté dont l’apparence minimaliste n’a d’égal que la ramification gigantesque. Sourde et infra-visible prolifération, elle dessine une figure latente, hybride et ambigüe, entre biologie et machinerie.

Réflexion plastique aux confins de l’architecture, du cinéma et de la littérature, Leaking Point s’inscrit dans la continuité des processus de recherche, de production et de mises en récit que développe Anne-Charlotte Yver, dont les structures-créatures font figure d’anthropophages ; se nourrissant les unes des autres à travers des effets de résonance, de métamorphoses et de mutations.

Ainsi le spectre d’_Ulalume_ — présentée en 2017 au Château de Lajone (Quattordio, Italie) — plane-t-il sur la proposition faite aux Tanneries. Loin, cependant, de ne demeurer que le souvenir d’un corps étranger, Leaking Point devient un corps en mutation. Installation in situ issue d’une micro-résidence que l’artiste a effectuée tout au long du mois décembre 2019 dans la Grande Halle, Leaking Point épouse les volumes et les strates, de matériaux et d’histoire, de cet espace emblématique des Tanneries.

Faite de tubes de plexiglas articulés les uns aux autres à l’aide de jointures en inox, l’installation d’Anne-Charlotte Yver est ancrée dans une esthétique du passage et de la continuité — horizontale comme verticale — mais aussi de la trace. Quant au travail sur sa mise en lumière, il n’est pas sans rappeler l’expressionnisme des origines du cinéma fantastique dont l’artiste partage l’intérêt pour la (trans)formation imag(in)ée des corps, entre figurations et défigurations.

Véritable casse-tête chinois d’une élégance rare, cette construction tubulaire à la rigueur tortueuse est bâtie sur plusieurs niveaux, à la faveur de l’ouverture des cuves sous-jacentes qui composent l’espace. Alternance de vides et de pleins, de plongées abyssales, d’affleurements et d’émergences quasi aériennes, ce circuit en apparence fermé reste ouvert — comme un laboratoire en attente — sur d’autres possibles et à l’avènement de phénomènes qu’il semble contenir en puissance et dont on ne sait pas s’ils se transformeront en actes au cours de l’exposition.

Il en va ainsi de la présence de l’eau du Loing dont le cours embrasse les Tanneries et vient alimenter les cuves de la Grande Halle quand son niveau monte trop vite. Les parties immergées de Leaking Point pourraient donc se voir modulées sous l’effet d’événements météorologiques extérieurs. De tels phénomènes — non-maîtrisables — viendraient potentiellement accentuer la présence de l’eau dans l’exposition, déjà visible dans la progression mise en place par l’artiste dans l’écoulement du circuit : les tubes de plexiglas les plus proches de l’entrée de l’exposition contiennent uniquement l’eau de ladite rivière quand, sous l’effet d’un processus de sédimentation-coagulation fictif, les plus éloignés présentent également des accumulations de fragments de latex.

Des phénomènes naturels viendraient donc apporter leur contribution à l’aspect surnaturel qui émane de l’organisme tout autant élaboré que fantasmé par Anne-Charlotte Yver. À l’image de la créature à laquelle le docteur Frankenstein donne vie dans le roman éponyme de Mary Shelley, l’installation _Leaking Point _est faite de composants à la fois mécaniques et organiques dont l’association au sein d’un même dispositif fait corps ; en-deçà et au-delà d’une tension intrinsèque entre la fluidité du circuit élaboré, la rigidité de sa structure en plexiglas et inox et l’élasticité du latex dont les morceaux, disposés çà et là, rappellent des lambeaux de peau — charriant par-là même, sous une forme presque hantée, des fragments de l’histoire industrielle de la Grande Halle des Tanneries.

Reposant sur une forme de latence, Leaking Point est une œuvre dans laquelle viennent suinter passé, présent et futur, réalité et fantasme, émergences et résurgences, mécanicité et organicité, maîtrise et aléa, et dont les fuites potentielles s’organisent en échappées belles. À travers elle, Anne-Charlotte Yver semble parvenir à télescoper dans une même structure le laboratoire, l’expérimentation et la créature qui en est le résultat, à travers une (con)fusion, un entremêlement, voire une contamination des contenus et des contenants. De leur mise en tension — entre stabilité graphique et architecturale de la structure et instabilité matérielle des éléments qui l’habitent ou la gagne — émerge une puissance poétique qui interroge les notions d’humanité et de monstruosité à partir d’une expérience sensible et sensuelle de l’espace qui n’est pas sans convoquer une forme de néo-romantisme futuriste.

La production du projet Leaking Point a reçu l’aimable soutien de la Compagnie vinicole de Bourgogne

Communiqué de presse de l'exposition / Les Tanneries — CAC, Amilly
  • Opening Saturday, January 11, 2020 3:25 PM → 7 PM
En région Zoom in En région Zoom out

234, rue des Ponts

45200 Amilly

T. 02 38 85 28 50

www.lestanneries.fr

Opening hours

Wednesday – Sunday, 2:30 PM – 6 PM

Admission fee

Free entrance

Free Entry

The artist