Deishû Ni Hasu, un lotus dans la boue
Exposition
Deishû Ni Hasu, un lotus dans la boue
Passé : 16 avril → 20 mai 2010
À la fois ornement et offrande, le lotus est une fleur spirituelle (symbole du Bouddha, entre autre) et philosophique (car rhizomatique). En lui, la cause y apparaît en même temps que l’effet ; la graine en même temps que la fleur. Plus étrange encore que le nénuphar une autre fleur aquatique qui se contente de flotter à surface des lacs, des étangs ou des bras morts de rivières, la fleur de lotus, mûe par une singulière aspiration, s’élève et fleurit au-dessus des eaux dormantes. Elle puise son énergie dans le limon et la boue (qui en Asie représente les troubles, les passions et les souffrances), les transformant en une ineffable et exquise beauté.
De la boue au sublime, donc. Avec ici comme principe de conversion et de transmutation, l’art du Manga1 ; l’art des « images dérisoires », des « images aux traits libres », des « images au gré de la fantaisie ».
Le Manga tel que nous le connaissons aujourd’hui est autant un enfant de la tradition artistique japonaise que du trauma de la guerre et de la bombe atomique. Son premier maître est Tezuka et son premier héros Astroboy ; un enfant-robot conçu par un savant rendu inconsolable par le décès de son propre fils. Il construira aussi une petite fille-robot prénommée Uran (diminutif d’Uranium) et un autre garçon appelé Cobalt (matière servant elle aussi à fabriquer des bombes). Des enfants-machines dotés de super-pouvoirs, destinés à sauver l’humanité, portant le même nom que les matières radioactives qui dévastèrent Hiroshima et Nagasaki…
Phénomène sans équivalent aujourd’hui, le Manga est devenu tout à la fois une culture, un monde et une industrie dont les histoires et les personnages sont déclinés en publications, films, jeux vidéos et produit dérivés. C’est aussi un véritable gisement que de nombreux artistes aujourd’hui ne se privent pas d’exploiter.
Féodalité, science-fiction ou vie quotidienne, cyborgs, créatures magiques ou simples personnages, pulsion bestiale, sentimentalité et héroïsme de pacotille : par-delà l’aspect convenu et codé des différents types de mangas définis selon leur lectorat (Shönen pour les garçons, Shöjo pour les jeunes filles et Seinen pour les adultes), il existe des ouvrages expérimentaux et inclassables qui tiennent plus d’une expérience profonde que d’un banal divertissement. N’en déplaisent aux détracteurs des Mangas, ces livres sont « dangereux », car ils constituent autant de seuils, de portes et de conduits menant à des univers visionnaires, cauchemardesques ou grotesques, dont la propriété commune semble être d’absorber celles et ceux qui les regardent.
Yoshikazu Ebisu, Usamaru Furuya, Kanako Inuki, Suehiro Maruo, Junko Mizuno et Toru Terada : c’est à ces créateurs concentrés sur la puissance et les pouvoirs de leur art — le dessin — que cette exposition est consacrée.
1 Le mot Manga est employé dès le XVIIIe siècle. Son usage se popularise véritablement avec la publication des « Hokusai Manga », ouvrages en estampes du célèbre dessinateur japonais Hokusai (1760-1849). C’est au XXe siècle, et particulièrement après 1945, qu’apparaît le Manga moderne. Depuis lors, le mot désigne toute forme de bande dessinée.
Horaires
Tous les jours sauf le dimanche de 10h à 17h
Les artistes
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Yoshikazu Ebisu
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Usamaru Furuya
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Kanako Inuki
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Suehiro Maruo
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Junko Mizuno
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Toru Terada