Jules de Balincourt — There are more eyes than leaves on the trees
Exposition
Jules de Balincourt
There are more eyes than leaves on the trees
Passé : 2 juillet → 5 septembre 2020
Jules de Balincourt — Galerie Thaddaeus Ropac La galerie Thaddaeus Ropac présente dans son espace du Marais une exposition des dernières oeuvres du peintre Jules de Balincourt. Au sein de compositions comme autant d'îles régies par leurs propres lois se dévoilent des mystères qu’il nous appartient de résoudre, de décoder ou au contraire d’embrasser et de poursuivre par notre propre capacité d’invention. Un parcours qui invite à la liberté dans un imaginaire qui n’a rien pourtant de muet.L’exposition sera suspendue du 02 au 24 août pour une trêve estivale.
La galerie Thaddaeus Ropac présente une exposition de peintures récentes de Jules de Balincourt. Débutée il y a plus d’un an et achevée au début de l’année 2020, cette nouvelle série de paysages abstraits, qui mélange formats intimistes et de grande dimension, exprime un désir d’évasion physique et émotionnelle. La présence apaisante de la nature est manifeste dans de nombreuses toiles, représentant le besoin d’un refuge en retrait du monde dans lequel nous vivons. Créées pendant que Balincourt partageait son temps entre le Costa Rica où il vit en partie depuis 20 ans, et Brooklyn, où il a passé les derniers mois confiné, ces œuvres résultent d’une réflexion personnelle sur les possibilités d’une isolation.
Le titre de l’exposition Il y a plus d’yeux que de feuilles sur les arbres est tiré d’un proverbe costaricien vernaculaire, qui traduit l’idée que, aussi isolé que vous soyez, tout le monde est toujours au courant de ce que vous faites, même dans un petit village de pêcheurs perdu dans la jungle. Aux yeux de l’artiste, cete expression évoque également la domination de l’homme sur la nature dans un monde allant vers une catastrophe écologique.
Comme Jules de Balincourt l’explique : “J’étais curieux de voir ce qui se passerait si je peignais simplement un tableau — en éloignant la peinture de sa dimension narrative littérale. J’aime l’idée de placer le spectateur à ce croisement de la peinture, où sa réponse émotionnelle oscille entre le réalisme rationnel et la figuration, d’une part, et le subconscient abstrait ou primitif, d’autre part. En présentant la dualité de ces deux manières de penser et d’être, ces peintures permettent au spectateur de voyager du conscient et du reconnaissable vers le mystérieux et l’inconnu.”
Jules de Balincourt insiste sur la construction purement intuitive de ses œuvres. L’artiste, qui travaille sans croquis préparatoires, fait apparaître progressivement une géographie subconsciente constituée de zones de couleurs articulées les unes par rapport aux autres. L’unité spatiale que l’on trouve dans ses peintures, où une perspective ou un horizon semblent toujours structurer la composition, est donc construite à l’inverse du schéma pictural habituel. La juxtaposition de couleurs vives, ainsi que la présence d’une nature luxuriante, rappellent les caractéristiques visuelles qui ont défini au tournant du XXe siècle le Primitivisme et le mouvement Nabi, tout en offrant une méditation sur le sens de la vie contemporaine. Avec son style unique, Jules de Balincourt traite l’omniprésence enveloppante de la nature de manière à créer un sentiment d’intimité qui rappelle celui élaboré par Edouard Vuillard dans ses scènes d’intérieur.
La porosité entre l’extérieur et l’intérieur est un trope fréquent dans l’œuvre de Jules de Balincourt : les intérieurs sont souvent sans murs, envahis de plantes et les proportions démesurées à la manière surréaliste. Dans They Each Had Their Lesson (2020), une main géante pénètre de façon intrusive l’architecture stricte d’un bâtiment dont la structure, composée de neuf cubes ouverts, évoque les principes de l’architecture moderniste, établissant un parallèle entre les règles normatives de l’architecture et une expérience d’enseignement faite par Balincourt dans une école locale. Motif récurrent dans l’œuvre de l’artiste, l’île incarne une autre forme d’ambivalence. Évoquant la notion d’isolationnisme mais aussi celle plus utopique du refuge, du sanctuaire ou du paradis perdu, l’île est également un exemple clé de ce que le philosophe français Michel Foucault a appelé une “hétérotopie” pour décrire certains espaces culturels, institutionnels et discursifs qui sont en quelque sorte “autres” : dérangeants, contradictoires ou transformateurs. Les hétérotopies sont des mondes à l’intérieur des mondes, qui reflètent et déstabilisent ce qui se passe à l’extérieur.
L’artiste cite souvent les impressionnistes et les post- impressionnistes comme une influence importante sur son travail. Cependant, les peintres figuratifs actifs dans la baie de San Francisco dans les années 1960 et 1970, tels que Richard Diebenkorn ou Elmer Bischoff, ont joué un rôle tout aussi important pendant ses années de formation, puisque Balincourt a grandi en Californie et a étudié à San Francisco. Son travail révèle également l’influence des peintres modernistes américains du XXe siècle qui ont introduit l’abstraction dans la tradition de la peinture de paysage, comme Arthur Dove ou Milton Avery.
Cette nouvelle série témoigne d’un intérêt récent de l’artiste pour un détachement de la figuration, en quête d’une approche plus spirituelle ou existentielle de la peinture. Les lignes courbes façonnant le paysage naturel dans City People and Country Roads (2020) rappellent la composition du célèbre tableau La joie de vivre (1905- 06) d’Henri Matisse. Mais, là où Matisse peignait une fantaisie pastorale, Jules de Balincourt dépeint une scène plus équivoque dans laquelle les silhouettes solitaires n’interagissent pas entre elles. Tantôt directement politique ou frontale, tantôt plus introspective, l’œuvre de Jules de Balincourt se situe à un croisement où les possibilités oscillent entre deux réalités très différentes, laissant au spectateur le soin de déterminer son propre récit.
L’artiste
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Jules de Balincourt