Myriam Mechita — Je suis le Phoenix ou l’amour en collier
Exposition
Myriam Mechita
Je suis le Phoenix ou l’amour en collier
Passé : 28 mars → 11 mai 2013
« […] et son esprit s’attardait sur eux avec cette sorte de plaisir physique que cause la contemplation d’objets brillants accrochés en plein soleil. C’est d’eux que toute vie semblait irradier ; les mots mêmes des livres baignaient dans cette splendeur. »
Virginia Woolf, Traversées, chap. XIII
Plaisir physique
Une galerie de portraits, imaginés et dessinés par Myriam Mechita, surplombe les visiteurs. Femmes droites, fières, sensuelles, pensives ; corps contorsionnés, meurtris, transpercés de lignes imaginaires ; visages isolés au regard dirigé ailleurs ou aux yeux fermés. Cette juxtaposition nous met face à une série de paradoxes et de contradictions, une multiplicité d’identités et de postures, d’états de corps comme autant de figures du plaisir physique ; des fables mystiques qui nous embarquent au cœur de la question insaisissable de la passion, où s’abîme notre plaisir au prix de la souffrance. Cette physique des corps est empreinte d’une violence couchée sur le papier sans retenue.
Contemplation
L’œuvre se dresse devant nous comme un grand animal, un phœnix. Fable de la ressuscitation, de la renaissance : blessé, mort une fois et né à nouveau, prenant un nouvel envol, en plein soleil. L’artiste est ce phœnix invisible, incarnée dans les retournements et les fractures de l’exposition. Si les spectateurs sont invités à pénétrer dans ce territoire fabuleux, c’est pour mieux les aveugler, alors que Myriam Mechita y contemple ses multiples vies, la nébuleuse de ses fantasmes, la constellation de ses désirs, la horde des femmes qui continuent de la tenir debout.
Objets brillants
A l’aide d’un simple crayon graphite, Mechita dispose ces figures féminines dans des paysages scintillants afin qu’elles absorbent mieux la lumière et le regard fasciné du spectateur. Elles s’élèvent au dessus d’un champ jonché d’objets brillants : céramiques couvertes de platine, traînées de perles, larmes de verre ou de quartz, petits objets en bronze. Entre transparence et aveuglement, les installations de Mechita composent avec la matière autant qu’avec la lumière : replis, reflets, réverbérations, disparition.
Vie
La vie et la mort ne sont que les deux faces d’une même réalité. La mort s’immisce dans tous les interstices de l’édifice puisqu’elle est le lieu où toute vie s’abîme, puisqu’elle est l’ultime expérience de la limite. La vie se construit toute entière dans cet écart avec la mort. La femme et l’animal, la femme en animal, l’instinct de reproduction et la nécessité de la jouissance. L’œuvre vivante de Mechita investit le paradoxe inhérent à ces oppositions.
Irradier
L’exposition nous met face à tout « un apparat de guerre ». La mariée est une guerrière qui porte ses bijoux comme des armes. Louve, araignée, mariée, amante : elles se préparent toutes au combat. Elles se dotent de parures de lumière pour séduire leurs proies et irradier leurs ennemis.
Livres
Myriam Mechita aime aussi se perdre dans le langage en se réappropriant les mots des auteurs à travers lesquels elle s’exprime à son tour. Vivre n’est possible que dans l’échange et le partage, au prix d’une possible perte de soi, ou d’une perte de l’autre. Affirmer son amour, s’oublier en l’autre pour se retourner à nouveau et refuser, provisoirement, cette irrémédiable solitude.
Cette splendeur
L’artiste
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Myriam Mechita