Robert Polidori — La Mémoire des Murs
Exposition
Robert Polidori
La Mémoire des Murs
Passé : 7 septembre 2013 → 4 janvier 2014
Les nombreuses photographies exposées, des grands formats réalisés à partir de la fin des années 80, permettent de comprendre pleinement le travail de cet artiste canadien, fasciné par le temps et par les traces qu’il laisse autour de nous.
Toujours mélancolique qu’elle soit majestueuse ou en déclin, l’architecture photographiée par Polidori raconte de ceux qui ont habité ces salles et ces espaces dépouillés. Le passé revient sans arrêt, révoqué par un détail, une composition ou une perspective. Que ce soit au Château de Versailles, dont l’artiste a pu photographier les restructurations grâce à une permission spéciale, dans les villes-fantômes terrassées par l’ouragan Katrina ou encore dans les maisons de Pripyat pas loin de Tchernobyl, le vécu du lieu revient à la surface et plonge l’observateur dans un récit qui est à la fois personnel et chargé d’histoire. Le résultat est un véritable portrait d’intérieur qui dévient métaphore de la vie intime : l’ode à l’architecture, à ses voutes, ses escaliers et ses géométries se fait le prétexte pour dévoiler les squelettes de l’âme.
Profondément lié à la photographie argentique qu’il considère plus fidèle au réel et plus parlante, Robert Polidori part à la recherche de lieux secrets et cachés, normalement fermés aux regards extérieurs et sans doute invisibles à ceux fugaces. En réalisant des images connotées temporellement et pourtant capables d’une portée éternelle, l’artiste dirige les regards fuyants parfois trop rapides et aveugles aux détails. Guidé par l’œil du photographe le spectateur découvre ainsi les symétries, les perspectives et les correspondances qui risquaient de passer inaperçues et qui sont enfin immortalisées par la photographie.
Le concept de restauration est très cher à l’artiste : l’idée de faire revivre quelque chose, de la soigner et de la ramener à la vie est un aspect fondateur de sa recherche. Si les images de Robert Polidori nous invitent à contempler les restes d’une ancienne vie qui n’existe plus, elles stimulent en même temps l’envie de soigner les traces réelles de ces souvenirs. La série de Versailles, réalisée pendant les travaux de restructuration du Château dans les années 80, est l’occasion d’aborder le sujet du passage du temps de manière frontale. À travers un regard qui contemple plus que critiquer, Polidori observe les témoignages de ce passage et laisse que le spectateur en prenne conscience à son tour. Dans ce sens, les imperfections et les défauts des murs et des matériaux sont les signes rassurant d’un tout coulant éternel : les soulèvements de la couche picturale, le vieillissement des peintures et des stucs deviennent ainsi les rides d’une décadence progressive, inévitable et fascinante.
Avec une attention formelle extrême, Robert Polidori propose des images qui mènent le spectateur dans une autre dimension : le vaste des salles, l’épaisseur des velours, les traces des gestes et des évènements ainsi que l’immense silence dans lequel ses œuvres sont plongées nous amènent dans monde à la fois onirique et sensible. En jouant avec la perception du spectateur, qui est presque invité à toucher les objets habitants ses photographies, Polidori provoque une illusion tactile qui intrigue autant qu’elle désoriente. Cette ambivalence des œuvres, comme suspendues entre deux réalités, fait de Robert Polidori un véritable photographe de la synesthésie.
Robert Polidori est né à Montréal au Canada en 1951. Il obtient son diplôme à la State University of New York à Buffalo en 1980. Pendant sa carrière Robert Polidori a remporté plusieurs prix prestigieux tels que le World Press Award for Art en 1998, le Alfred Eisenstädt Award for Magazine Photography en 1999 et 2000 ainsi que le Deutscher Fotobuchpreis en 2007. Ses photographies ont été publiées entre autres dans les pages du The New Yorker, Vanity Fair et GÉO. Robert Polidori vit et travaille à Los Angeles.
L’artiste
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Robert Polidori