Sticky Objects — Marion Vasseur Raluy avec Hélène Carbonnel, cluelesS, Fang Dong, Frieder Haller, Rafael Moreno

Exposition

Design, film, livres, nouveaux médias...

Sticky Objects
Marion Vasseur Raluy avec Hélène Carbonnel, cluelesS, Fang Dong, Frieder Haller, Rafael Moreno

Passé : 28 avril → 7 juillet 2023

Un jour, un père meurt. Pour seul message, il laisse une lettre dans une commode. Malgré les recherches des enfants, la lettre n’est jamais retrouvée. A la place, la commode reste vide, sans explication. Elle continue à traverser les âges. Elle devient sans qu’on le sache l’objet d’un savoir jamais révélé, l’objet du secret. D’une génération à l’autre, l’histoire originelle de l’objet disparait mais ne cesse de nous accompagner. Ainsi, il y a dans nos existences des objets qui collent et qui restent accrochés à nos vies. Il y a des objets symboles chargés par la société (bijou de famille, vaisselle, cuillère en argent, vêtement, sacs à main). Il y a des objets qui annoncent des statuts, il y a des objets qui cachent leurs histoires. Il y a des objets salis par leurs usages, par les abus qu’ils ont permis. Ces objets collent à nos cœurs, à nos mains, parfois nous salissent, nous empêchent.

Sticky Objects propose de revenir sur l’histoire des objets et la relation étroite qu’ils entretiennent avec les émotions en explorant leur apparition dans les arts visuels. S’appuyant notamment sur l’essai Happy Object de Sara Ahmed, l’exposition s’intéresse à la charge émotionnelle des objets : dégout, attirance, joie, tristesse. Dans cet essai, la sociologue anglaise démontre comment certains objets sont assignés à une émotion (bonheur ou malheur), en prenant l’exemple de l’accomplissement personnel à travers le mariage symbolisé par une bague. Sarah Ahmed tente de déconstruire la représentation normative du bonheur. La question des affects est devenue un sujet sociologique à part entière depuis plusieurs années, Sara Ahmed tout comme Frédéric Lordon interrogent la place des émotions dans la société. Chez Frédéric Lordon, les affects sont orientés par la société capitaliste pour répondre aux demandes économiques : tristesse poussant à la consommation et dépression poussant à l’inaction. Ces injonctions m’ont amenée à m’interroger sur la charge émotionnelle des objets qui circulent dans l’art. Les objets traversent les usages, ils deviennent œuvres, se figent dans des espaces d’expositions. Ils reviennent ensuite parfois pour toujours, parfois fugacement des objets collants. Sans jamais nous appartenir, ils nous hantent, ils semblent nous avoir dit quelque chose que nous continuons à entendre. Est-ce que les objets d’art auraient une faculté magique à résister aux injonctions émotionnelles qui leur sont faites en provoquant l’apparition d’émotions inattendues ?

Dans Sticky Objects, les éléments composant l’exposition proviennent principalement du vocabulaire esthétique propre aux arts vivants : marionnettes, objets de décor et maquettes habitent l’espace des Bains-Douches. Cette invitation à faire écho aux arts vivants est un clin d’œil à la figure de Piero Heliczer, constante présence du centre d’art. CluelesS, Fang Dong et Rafael Moreno proposent à partir d’objets de produire des sculptures qui deviennent des petits objets de design ou de théâtre. Hélène Carbonnel déconstruit les discours entendus pour n’en conserver que les erreurs et les balbutiements, comme pour faire entendre derrière ce qui n’est pas dit, ce qui doit être réellement entendu. Enfin, Frieder Haller nous emmène avec son nouveau film dans l’univers de personnages symboliques qui cherchent à s’extraire de leur nature diabolique dans un décor en carton-pâte.

Les objets produit par les artistes parlent, s’émancipent, s’activent. Ils cherchent d’autres moyens d’exister que celui du souvenir et de l’héritage. Car si les objets sont collants c’est en les plaçant ensemble, que peut-être une autre symphonie peut se faire entendre et que leur nature collante peut devenir une étrange et nouvelle peau à partir de laquelle nous pouvons nous transformer.

Biographie des artistes

Hélène Carbonnel est née en 1989 à Paris. Elle est autrice, réalisatrice et programmatrice de podcasts, créations sonores et vidéos. Depuis 2017, elle travaille avec plusieurs studios et a notamment réalisé de nombreux Transferts. C’est à partir de la matière de 4 épisodes qu’elle a réalisé Trash Talk, l’œuvre sonore présentée dans l’exposition.  

cluelesS le duo de designers composé de Saloméja Jacquet et Clara Stengel — développe un répertoire d’objets à usage quotidien destinés à résoudre des problématiques du réel en créant un monde légèrement décalé du nôtre. « Être dans son monde » est peut-être la manière la plus juste d’interpréter le mot « clueless ». Contournant les traductions péjoratives, qui pourraient désigner quelqu’un·e d’ignorant·e, « clueless » devrait plutôt être entendu comme la position de celle ou celui qui défie la réalité. Clara Stengel est née en 1989 à Paris. Après ses études à l’ENSBA (Paris), elle obtient un CAP en ébénisterie en 2015. Avant de co-fonder cluelesS, elle a exposé son travail en France et à l’international. Saloméja Jacquet est née en 1994 à Paris. En 2017, elle est diplômée de la HEAD (Genève) en design de mode. Elle a notamment travaillé avec des designers tels que Bless et Mariel Manuel avant de co-fonder cluelesS.

Frieder Haller est né en 1987 à Fribourg-en-Brisgau. Il a participé au programme de résidence De Ateliers à Amsterdam de 2017 à 2019. Il a étudié la philosophie à l’université de Leipzig de 2008 à 2011 et la photographie à l’université des arts Folkwang d’Essen de 2011 à 2016. En avril 2023, il présentera sa première exposition personnelle en institution au Kunstverein Harburger Bahnhof à Hambourg. Il est co-fondateur de l’espace indépendant New Bretagne/Belle à Essen. Depuis 2018, il dirige l’espace d’artistes Root Canal à Amsterdam. En 2021, il a cofondé l’espace communautaire Cittipunkt à Berlin.

Fang Dong est né en 1991 en Chine. Elle vit et travaille actuellement à Bordeaux. Son nom signifie le sens parfumé en chinois. Ces deux caractères sont composés d’idéogrammes évoquant des herbes carrées et lourdes ; elle a pour autre pseudonyme heavy herbe (h2E3). Ses pièces, entre l’art et le design, offrent à nos sens une pluralité d’échelle, c’est un monde tactile, sensitif en perpétuel mouvement.

Rafael Moreno est né·e en Colombie en 1993, depuis sept ans iel vit et travaille à Paris. Iel à fait ses études aux Beaux-Arts de Paris puis à L’EHESS. Son travail a été récemment présenté à la June Art Fair (Suisse), Treize (Paris), à la galerie Valeria Cetraro (Paris), à Établissement d’en Face (Bruxelles) et à la galerie Gaudel de Stampa (Paris). À travers l’installation, la performance et le texte, Rafael Moreno propose des narrations fictionnelles autour de la relation entre le corps humain, les développements technologiques et les contextes socio-économiques actuels. Iel travaille souvent à partir d’objets trouvés choisis pour leur symbolique. Le collage et la manipulation de ces symboles lui permettent d’ouvrir et de développer les espaces de réflexion qui ont pour ambition d’aboutir à la déconstruction des rapports de domination culturelle.

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151, avenue de Courteille

61000 Alençon

www.bainsdouches.net

Horaires

Les mercredis, les samedis et dimanches de 14h à 18h30
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