Virginie Otth
Actuellement la définition d’une image photographique se traduit en un nombre de pixels ou de dpi… La précision du médium se veut technique, je préfère l’apprécier d’un point de vue sémiologique. Ce travail des « petites définitions » utilise « la qualité moindre » des téléphones portables des premières générations en relation à la tradition du portrait en peinture. Les sujets sont « illuminés » avec un écran d’ordinateur, donc des moyens d’une nouvelle technologie pour un rendu d’image qui fait référence aux portraits de la renaissance par la posture des sujets et la lumière directionnelle. L’autre référence à la peinture se traduit par le pixel agrandi (et conservé carré) qui ressemble à une « touche » de peinture; indéfinissable de près, le sujet se recompose de loin. La perturbation du signal, le bruit de l’image (mauvais jpeg) diminue la lisibilité du sujet et renvoie au médium, c’est ce qui m’intéresse particulièrement. Cette technologie à destinées populaire nous donne une vision peu réaliste du monde par la dégradation due à la technologie rudimentaire de l’objet et paradoxalement, elle nous renvoie à une image du monde beaucoup plus abstraite que prévu. L’esthétique de cette mauvaise définition est pour moi une excellente opportunité de questionner le médium et notre relation au réalisme des images. Le téléphone portable est censé nous donner la possibilité d’enregistrer facilement les petites et la Grande Histoire (si par hasard on a été là), elle nous en donne en fait une vision dégradée. J’utilise son esthétique pictorialiste et le peu de précision des images pour sublimer mes sujets et combler le manque de définition par l’imagination et les références à l’histoire de la représentation. Ce travail est directement daté par une étape de la technologie qui devient déjà obsolète, en effet la nouvelle génération de portable est de bien meilleure qualité et les fichiers s’approchent de la qualité photographique des appareils amateurs, la définition du monde est donc bien meilleure, beaucoup plus réaliste et « le trouble du jpeg » disparaît presque complètement. Je conserve donc une trace d’une étape de cette technologie comme une relique: ce très beau»bruit» d’image qu’elle nous a proposé par défaut.
Virginie Otth
Contemporain