Édito Fiac et off-s : une semaine d’automne à Paris
À l’automne, Paris devient le centre de gravité du monde de l’art moderne et contemporain. Foires, salons, performances, vernissages et lancements, tous se donnent rendez-vous en cette rentrée artistique qui talonne la grand-messe londonienne du Frieze.
Depuis quelques années et le retour de la FIAC sous la nef du Grand Palais, l’effervescence ne cesse de croître. Si cette avalanche de propositions a pu faire saturer ces dernières années quelques observateurs, lassés d’une course au mètre carré qui oublie que pour vivre, une œuvre a besoin de respirer, voire d’être exposée avec ingéniosité. Mais ce serait négliger la qualité première de la foire, son essence mercantile et la possibilité pour tous d’être vus par tous. C’est que le marché de l’art n’a, en période de ventes intensives, guère besoin d’une légitimité critique. Alors c’est pour se démarquer que chacun rivalise d’ingéniosité pour organiser des événements à la hauteur de l’implication des artistes dans leur production. On observe ainsi une tendance à la spécialisation qui fait de chaque événement une promesse cohérente en phase avec l’évolution des pratiques artistiques. Hormis deux d’entre elles, les foires et salons parisiens d’automne poursuivent une expansion qui, cette année, fait de chacun d’entre eux un acteur incontestable d’une semaine artistique qui célèbre la création et en reflète un visage véritablement hétéroclite.
Lire notre présentation des foires de l’automne
« FIAC 2015 », Grand Palais – La nef du 22 au 25 octobre 2015. En savoir plus Si les années et l’augmentation croissante des budgets ont fait disparaître la folie et la liberté des premiers Off de la FIAC, l’offre s’est incontestablement enrichie et le nombre de galeries participant à la fête aussi. Mais ce foisonnement ne s’est pas fait sans pertes et fracas, il semble bien loin le temps où les galeristes et artistes sonnaient l’appel à l’alternative en créant, avec les maigres moyens dont ils disposaient, leur propre événement, défrichant et découvrant des lieux inédits à Paris, aujourd’hui devenus institutions. Mais si le marché de l’art, malgré les fluctuations pétrolières et autres coups de frein de la croissance chinoise, continue de faire montre d’une insolente vitalité, la semaine de l’art parisienne, qui se doit d’être une fête pour tous les amateurs et qu’il appartient à nous tous de créer un public capable de se l’approprier, semble paradoxalement à une année charnière. Derrière le faste et la multiplication des sponsors, chacun des acteurs a le devoir de présenter un projet dont, on le sait, la qualité et l’engagement pourront garantir la pérennité. « Officielle 2015 — Un événement FIAC », Les Docks - Cité de la Mode et du Design du 21 au 25 octobre 2015. En savoir plus On attend donc cette cuvée de foires avec quelques questions et notamment celle, brûlante, d’une FIAC qui, avec l’éviction cette année encore de certaines galeries excellentes et toujours aussi novatrices, pousse à se questionner sur la direction qu’elle emprunte et son rôle auprès de galeries qui la font vivre. Mais on peut penser aussi à la question de la pertinence d’un Off, Officielle organisé par cette même FIAC, acteur majeur de la saison qui, au-delà de l’ambiguïté de la démarche, trahissait l’an dernier une certaine froideur et surtout un déséquilibre manifeste entre les propositions des galeries, et ce malgré quelques très belles prises de risque et perles qui l’émaillaient. On ne peut cependant que se réjouir de la reconduite du projet Hors-Les-Murs, qui offre à tous les amateurs des œuvres formidables et intègre l’art à la ville avec une belle pertinence, quand il ne révèle pas, comme l’an dernier le fameux Tree de Paul McCarthy, la terrible nécessité d’en accélérer la diffusion pour en finir avec le conservatisme puritain d’un ordre fermé. « Paris Internationale », Paris Internationale du 21 au 24 octobre 2015. En savoir plus Le parcours hors-les-murs ; une idée adoptée par d’autres foires, à l’image de la cinquième édition de YIA Art Fair qui, d’année en année, s’est retrouvée par la force des choses à la place d’alternative sérieuse, même si le projet initial, assez singulier, l’en distinguait. Enfin, souhaitons également la bienvenue à Paris Internationale qui, sous ses dehors festifs et joyeux, recèle une sélection de galeries et de project spaces dont l’association pourrait bien apporter un vent de fraîcheur et de qualité salutaire sur l’automne artistique de Paris. Une saison artistique magique qu’il appartient à nous tous, malgré les doutes, de faire perdurer, d’en faire fructifier, comme disait Apollinaire, « les fruits tombant sans qu’on les cueille. »