Mario Giacomelli — Galerie Berthet-Aittouarès
La galerie Berthet-Aittouarès présente, du 03 novembre au 10 décembre, une exposition consacrée à la série Petits Prêtres de Mario Giacomelli. Une variation des sentiments qu’annonce la phrase mise en exergue par le photographe lors de la présentation de la série Je n’ai pas de mains qui me caressent le visage.
Dans cette nostalgie d’une vie mixte qu’ils ne pourront jamais expérimenter, les prêtres semblent s’adonner à un oubli d’un autre genre, marqué par les jeux et le divertissement dans un contraste qui formalise leur abstraction du monde. Tous affublés d’un même uniforme, chacune de leur activité se pare alors d’une étrange profondeur processionnelle et, sous les teintes d’un contraste extrême, d’une aura expérimentale.
En noir sur un fond blanc immaculé, les silhouettes se répètent et se détachent, installant une vision de la solitude démultipliée par l’incongruité d’un jeu d’adultes, d’une régression illusoire à l’innocence. Pourtant, à travers son écriture visuelle, ses cadrages et sa capacité à souligner différents éléments de l’image, Mario Giacomelli installe une complexité inattendue en variant les niveaux de lecture ; lumière et végétation viennent orner un quotidien ascétique d’une abondance sidérante, reflet trouble des ors de l’Eglise comme de la transcendance d’un quotidien dévoué.
Réussite formelle et esthétique indéniable, cette splendide série n’en perd pas moins sa vocation documentaire. Proche de ses sujets, l’empathie de Giacomelli se lit dans cette dualité d’une vie contrainte dont la libération pourrait advenir bien avant la fin. D’où son goût pour ces moments où les prêtres « enfreign[ent] les règles » et s’éloignent de l’idéal fantasmé d’une simple expiation. Dans cette Italie du début des années 1960, les images font scandale et rappellent la prégnance de l’ordre moral sur l’individu, quand bien même celui-ci s’en extrait.
Terrible et terriblement excitante, cette série fait vibrer la solitude impossible d’un ordre de vie qui exclut, soi comme les autres.