Chiharu Shiota — Galerie Daniel Templon
Alors qu’elle vient d’être choisie pour représenter le Japon à la 56ème Biennale de Venise en 2015, Chiharu Shiota investit la galerie Daniel Templon avec « Small Room », une installation qui évoque l’étroitesse et les petits confins sans destiner à l’étouffement.
« Chiharu Shiota — Small Room », Galerie Templon du 7 juin au 23 juillet 2014. En savoir plus L’espace ici est mental. Le titre l’annonce d’emblée. Small Room nous met sur la piste de la littérature où la chambre est une métaphore des cloisons cérébrales. Kafka, dans son journal écrit entre 1917 et 1919, avançait que chacun porte une chambre en soi. Comprendre, un centre cognitif, un épicentre des émotions. Cette unité et ce lacis intime neuronal trouvent chez Shiota une expression matérielle à travers les toiles qu’elle tisse et dans lesquelles elle enferme des objets. Une chaise, une trompette, un kimono se trouveront tour à tour capturés dans un jeu de fils tendus, orchestré pour les maintenir statiques. Figés dans la mémoire, ils sont devenus des proies que l’on peut tantôt admirer, rejeter, haïr ou aimer. Ils ne bougeront plus, l’araignée a agi. D’habitude noire, les fines cordelettes en tension ont revêtu ici une couleur vive comme si le liquide cérébro-spinal avait changé, muté.Le regard que Shiota pose sur ces captifs n’est plus teinté de bile noire, la gaité a repris le dessus, la vie peut continuer. De même que l’installation de valises suspendues dans la plus grande salle, aussi sidérante qu’elle soit, n’indique plus le chemin des camps de la mort. Ses valises mises en mouvement et bondissantes évoquent un départ bercé d’espoir sur la route d’Ellis Island ou d’un ailleurs, ouvert et vierge. Les grosses cordes qui maintiennent les valises sont élastiques et rouges. Elles ne sont ni tendues ni radicales. Ni noires. La différence est capitale. Leur élasticité, de même, nous emmène plutôt du côté de l’univers du cirque ou des trampolines pour enfants.
Alors, certes, Shiota ligote encore et toujours, mais elle semble ouvrir les mailles, libérer les cordes, lâcher les amarres d’une réflexion moins obsessionnelle et moins rivée sur un passé figé. En somme, si les installations compriment encore la cage thoracique, elles n’étouffent plus le cerveau.