Théâtre du monde — La maison rouge
On aura rarement vu cette maison rouge là. Cimaises de couleurs chaudes, salles entières plongées dans la pénombre, travail sur la lumière époustouflant et délicat, alcôves conçues çà et là, rideaux sombres qui cachent puis dévoilent certaines œuvres, cloisonnement nouveau, objets suspendus au plafond… La révolution semble en marche. Plus de White Cube, mais un espace tout entier dédié au regard d’un collectionneur. Et plus que de regard il est question de vision aigüe mariée à une belle compulsion (David Walsh se dit lui-même compulsif), sans délaisser la trame intellectuelle et sensible qui guide ses acquisitions.
Cette exposition demande de regarder. Et d’apprendre. S’imprégner en tout cas des cultures diverses, naviguer entre les universaux et les particularismes. Walsh, autant que le TMAG, on le comprend vite en découvrant leurs choix, cherchent plutôt les similitudes que les différences. Aussi verra-t-on du Jan Fabre (Skull, 2001) et des jarres à sagou, du corail de Micronésie et du Francis Picabia (French Can-Can, 1936, 1938), des masques Heaume de Papouasie et du Sydney Nolan (Centaur and Angel, 1952).
Le dialogue fait ici toujours sens. Il émeut même. A l’image de cette salle ronde obscure où brille, seule, une bougie (Candle Describing a Sphere, Jason Shulman, 2006) d’où l’on sort, aveuglé, face à un tombeau où git Le Long Homme solitaire de Berlinde de Bruyckere. On se prend à rêver que ses jambes marbrées, inertes, froides comme le dernier souffle soient réchauffées par la chaleur de cette bougie.
Les deux collections traversent ainsi les grands thèmes de la vie sans jamais tomber dans des schémas faciles ou déjà empruntés. Force et émotion sont au centre de ce chemin entre vie et mort, de l’Antiquité à nos jours.