 
               Isabelle Giovacchini — Cpif, Pontault-Combault
Tout au long de son parcours, l’exposition personnelle d’Isabelle Giovacchini, Plongées, fragments, répliques, porte ses images comme une respiration vibrant au rythme d’une double injonction visuelle et conceptuelle. Entre apparition et disparition l’artiste donne à voir l’émergence et le retrait comme deux faces d’un temps partagé.
Là, le symbole, le signe ou l’écriture se font rares ; demeurent des codes, chiffres techniques devenus à leur tour motifs, comme si le moyen d’apparition s’incarnait en sujet pour le dissoudre de son propre éclat. Jusqu’à laisser l’acte même, l’effort vers l’image, prendre la lumière et, partant l’écrire. Dans cette bataille entre le sujet de l’œuvre et le sujet de sa création (l’artiste comme sa technique), le spectateur est peut-être la seule issue…
Sans jamais se fondre en une synthèse… Privé d’appui narratif, le regard modifie son attention pour se rendre à la seule expérience sensible. Ses dispositifs, d’une richesse théorique souterraine, effacent leurs marques d’autorité, et déclinent à travers la souplesse de leur production une pensée qui se perçoit avant de se comprendre, qui se diffuse avant de s’imposer. Nous confiant à l’intuition, sa narration, elle aussi, s’invente à rebours. Tantôt parallèle à l’histoire, tantôt née de la manipulation d’images anciennes, elle surgit à la manière d’un souvenir qui se reforme sous les doigts. La manipulation, essentielle, épuise son champ des possibles entre altération et révélation.
Une manière là encore de réécrire avec d’autre lumières. Et des silences. L’installation reprend ainsi, dans sa composition architecturale, les codes de la fresque narrative ; lignes et formats d’image rythment l’aventure du lieu, comme une partition lente dont chaque image serait une note suspendue. À la guise du visiteur, choisissant de s’informer avant ou après des enjeux du processus de l’artiste, on s’enfonce ainsi avec ou sans garde-fou dans des compositions d’une précision rare qui se vivent pour elles-mêmes autant que pour leur charge. Si les trésors de l’histoire officielle gardent leurs secrets, l’aventure continue d’avoir lieu, elle se nourrit même de cette étrangeté qui n’est qu’un reflet de la magie du réel ; un principe à l’œuvre dans la série de lacs dissous dans l’acide au cœur de vallées mystérieuses.
Les paysages se consument à mesure qu’ils apparaissent. Du trop-plein au vide, de la capture à la disparition, le signe devient indice et la vérité, forcément effleurée par son reflet, reste fragile. La photographie n’est plus preuve mais passage, où chaque image hésite entre mémoire et invention.
Dans cet espace suspendu entre savoir et sensation, différences et répétitions tissent ainsi un passage du silence objectif, de la brutalité sèche de la concrétude du réel à la possibilité toujours reconduite du mythe. Un saut qui, plein d’une profondeur féconde sur la valeur de l’image, n’en est pas moins fertile sur la multitude de sens empilés par nos propres regards sur elle. Pointant peut-être par là, dans une subtile retenue et un esprit de décalage, la part d’absurde que chacun est prêt à y glisser.
 
	 
	 
	 
       
          
          
          
          
          
          
         