La Collection Courtauld — Fondation Louis Vuitton
Avec Le Parti de l’Impressionnisme, la fondation Vuitton accueille la collection du mécène Samuel Courtauld, un ensemble d’œuvres somptueuses acquises entre 1923 et 1929.
« La Collection Courtauld — Le parti de l’impressionnisme », Louis Vuitton du 20 février au 17 juin 2019. En savoir plus Véritable coup de projecteur sur un couple de collectionneurs modèles aux choix aussi sûrs que validés par l’histoire. Pour cet entrepreneur au protestantisme chevillé au corps (lui-même fils d’industriel reprenant l’usine de son père huguenot), la vocation sociale se confondait en une obligation éthique. Son choix de concentrer son mécénat sur la peinture de son temps répond ainsi à un désir de partager avec la société de son époque une sensibilité émancipée des canons bourgeois du XIXe siècle, celle des figures de l’impressionnisme français sur une terre marquée par la peinture anglaise, voire par l’absence même de connaissance visuelle de l’art de l’époque. C’est ainsi, dans le bouillonnement d’une Angleterre industrielle triomphante et s’affichant aux côtés de John Maynard Keynes qu’il développera son projet largement porté sur le partage et sur l’ambition de « reconnecter » une société marquée par la guerre.Il élabore ainsi, avec sa femme, une collection dont le reflet à la Fondation Vuitton montre toute l’audace, la lucidité, mais aussi cette tension impressionniste bien connue à magnifier le monde qui trouve ici une lecture particulièrement limpide. Si la beauté, la force esthétique relient toutes ces œuvres qui forment un ensemble procédant d’un même goût assuré, les formats différents témoignent d’une ouverture à la ligne, à l’art plus qu’au seul décorum.
Car même aujourd’hui, certains choix passionnent par leur décalage ; si de nombreux chefs-d’œuvre émaillent le parcours, quelques curiosités en font tout le sel et témoigne d’un regard d’abord amoureux des formes, de l’audace d’une peinture nouvelle en pleine révolution et expérimentation. Or c’est précisément derrière la litanie de chefs-d’œuvre (que l’on peut être heureux de revoir à Paris et dont on goûte avec délice la superbe) que la collection Courtauld enchante avec des perles de Degas (notamment La Femme à la fenêtre) un lumineux Renoir pas forcément le plus connu, d’incroyables pastels de Turner, le Vase de fleurs de Monet, abandonné par l’artiste durant quarante ans et première peinture à rentrer dans la collection, un foudroyant Vuillard (Intérieur au paravent) ainsi qu’une esquisse de valeur du Déjeuner sur l’herbe lumineuse de Courbet.
Proposant un parcours aéré et de qualité même si, collection personnelle oblige, les œuvres sont parfois inégales, l’exposition offre une scénographie osée avec ses couleurs marquées donnant à chaque salle une véritable identité avec, à noter, une excellente visibilité des tableaux grâce à un éclairage subtil (magnifiant même celles sous verre). Un pari réussi qui, en plus de son équilibre avec une centaine de pièces, s’attache réellement à travailler l’identité d’un collectionneur singulier et parvient à dessiner une perspective sur des œuvres ancrées dans l’imaginaire collectif.