Paul Pouvreau — CPIF, Pontault-Combault
Comme nous retournons sur les traces de nos films favoris et de nos artistes fétiches, les images sont autant de refuges possibles chez Paul Pouvreau, photographe de situations qui semblent être les instantanés de voyages mentaux que nous faisons tous les jours.
« Paul Pouvreau — Le magazine des jours », CPIF — Centre photographique d’Ile-de-France du 19 janvier au 14 avril 2019. En savoir plus Sans être rétrospective sur les trente années de carrière de Paul Pouvreau (né en 1956 à Aulnay-sous-Bois), l’exposition Le magazine des jours propose un parcours d’œuvres d’époques très différentes, des années 1990 à nos jours. Cette sélection met l’accent sur une typologie d’images qui enracine les symboles les plus représentatifs comme les moins nobles du quotidien dans une poésie proche de la nature morte.Paul Pouvreau porte une attention précise et poétique aux objets banals. Il utilise la poussière pour faire image (Intérieur tamisé, 1991) ou capture l’aura maladroite de cartons et sacs plastiques. Comme pour nous parler de photographie, l’emballage (cet objet destiné à contenir, exactement comme le fait la photographie), se retrouve sur un piédestal flamboyant mais enfermé à son tour dans un statut dont il ne pensait pas faire l’objet un jour.
La poétique du sac plastique (Les Furies, 2016) que Paul Pouvreau souhaite mettre en place opère et s’active de manière éphémère. Le moindre manque d’attention fait perdre le fil et le sac plastique (évidemment on pense à American Beauty de Sam Mendes) que l’on croit voir s’animer s’arrête dans sa course et s’offre à nous de nouveau figé et brillant d’immobilité, comme la peau luisante d’un poisson d’une nature morte néerlandaise du XVIIe siècle.
Dans ce théâtre du quotidien — la maison, la ruine, la rue, le chantier, la périphérie —, Paul Pouvreau fouine. Avec son appareil, il décortique les angles bizarres, les rebuts, charognes, décombres (comme le fait aussi bien la photographe Julie Hascoët dans son livre du même nom), mais aussi les point de fuite absurdes, les paréidolies, tout cela afin de construire de nouvelles images. Avec ces perspectives qui ouvrent souvent sur quelque chose de loufoque, Paul Pouvreau bâtit un monde à la banalité sublime : les architectures se distordent et les figure hybrides se rencontrent dans une osmose brinquebalante.
Dans un ensemble de collages de 2016 (Mascarade, entre autre), Paul Pouvreau s’attache plus particulièrement aux signes et aux formes récurrentes de l’idéal commercial. Il assemble objet et humain dans une rencontre qui identifie l’impact de la publicité sur la psychologie (et la physiologie) du consommateur. Ce travail sur la désillusion, l’artiste en fait le leitmotiv de sa déambulation dans l’espace urbain. Affiches déchirées ou petits échecs du quotidien s’empilent comme autant de mensonges d’un monde idéal : la vue d’un parc verdoyant et de sa fontaine paisible ouvre finalement sur un chantier crasseux…
Dure réalité.