Françoise Pétrovitch — Semiose Galerie
Les murs de la galerie Semiose abritent une série d’œuvres récentes de l’artiste Françoise Pétrovitch. Une promenade éclairée dans l’univers toujours aussi énigmatique de l’artiste, peuplé de figures mystérieuses.
« Françoise Pétrovitch », Galerie Semiose du 9 septembre au 28 octobre 2017. En savoir plus L’épure du white cube et la densité narrative des œuvres de Françoise Pétrovitch dérivent ensemble et se retrouvent avec une délicatesse étrange. Les néons ont beau crier tous leurs lux, la lumière ne nous révèle rien de l’étrangeté que ses œuvres abritent. Les sculptures — deux présentées dans cette exposition — se cachent sous leur masque et les peintures révoltent l’espace immaculé avec leurs couleurs affriolantes. Il faut alors s’arrêter longtemps sur chacune des 13 œuvres pour y déceler la froide mélancolie car, à balayer la galerie du regard — comme lire en diagonale —, c’est un simple artifice de couleurs que l’on perçoit. Il faut faire l’expérience d’une déambulation solitaire, comme pour se mettre dans la peau des personnages que nous offre à voir Pétrovitch.Fidèle à la construction d’un univers introverti, les personnages de Françoise Pétrovitch — loin d’être expansifs — sont recroquevillés sur eux-mêmes. En position fœtale ou la tête baissée, ils sont les gardiens d’une histoire intime qui ne nous parvient que par bribes. Prosterné ou accablé, le personnage d’une œuvre (sans titre, 2017) se montre résigné, abandonné de sa propre volonté d’être. Les lignes morcelées qui le constituent paraissent aussi fragiles et instables que la psychologie que sa posture incarne. Ses mains roses et évanescentes peinent à recouvrir son crâne et son cou rouge vif est exposé à une violence d’origine inconnue.
Françoise Pétrovitch dessine une faune d’humain à l’identité trouble. Si Pétrovitch esquisse un scénario, celui-ci est parcellaire et devient ainsi énigmatique. Comme les contes qu’elle suggère, les corps qu’elle délivre sont tronqués et fragmentaires. Derrière le comptoir de la galerie, une huile sur toile sans titre déploie une figure amputée. Les mains relevées en bouclier à hauteur d’œil, le protagoniste protège son portrait inexistant d’une menace imperceptible. Si les couleurs des peintures animent les corps d’une énergie débordante, les postures de ces derniers nous renvoient à des archétypes bien plus sombres.
À l’abri des regards, les personnages se dissimulent et participent par leurs positions, leurs actions, leurs accessoires à l’oscillation d’un monde ambivalent. L’artiste propose des formes de vie hybrides qui sont à s’y méprendre. Difficile de dire à quel genre ou à quelle espèce appartient la créature qui est déployée devant nos yeux. Cette frontière fluctuante, Françoise Pétrovitch la brouille notamment avec la sculpture en bronze Fille au masque dont le déguisement ébranle nos certitudes. Si l’artiste dévoile ostensiblement dans le titre de l’œuvre de quoi il s’agit, ce n’est que pour mieux tromper son spectateur. Le masque de ce personnage, s’il est regardé de face, n’est autre qu’une tête de bovidé halluciné sur des épaules humaines.