Kevin Rouillard — Galerie Xippas
La galerie Xippas présente une exposition personnelle de Kevin Rouillard qui s’attache, depuis ses première œuvres, à reconstituer des variations géométriques et chromatiques à l’aide de matériaux transformés.
« Kevin Rouillard — Crafted Lines: Echoes & Assemblage », Galerie Xippas du 11 janvier au 1 mars. En savoir plus Après une très belle présentation organisée en 2022 qui confrontait la radicalité de son œuvre à la légèreté et à la finesse de Rolf Julius, figure de l’art sonore, de cet artiste, la galerie offre à ce jeune artiste une présentation d’envergure qui décline et module la question de la ligne. Dans sa recomposition d’un usage même de la matière, expurgée de sa fonction première (de contenants bien souvent à l’image de bidons métalliques devenus plaques travaillées de coups), l’artiste porte au regard les fractures matérielles de gestes puissants qui se contemplent en silence. Lignes et motifs sont perpétuellement sources de variations lumineuses et intensités qui laissent vivre, sous l’autorité apparente de leur poids, une indécision constitutive, un frémissement en interdisent la finitude.À la manière de l’horizon évoqué dans le texte accompagnant l’exposition, la ligne devient ici mouvante, perpétuellement tenue par la tension entre des éléments, jamais figée et rendue à une nature alternative, celle de l’accord entre les éléments. Crafted Lines offre à ce titre un panorama renversant et d’un lyrisme à la brutalité contenue qui constitue une expérience immersive totale. En conjuguant abstraction et impressionnisme à la faveur d’une radicalité toute personnelle, c’est une variation sensible sur le paysage qu’il fait ressusciter de ses rebuts.
La réflexion y passe de sa nature physique au long d’ondulation précieusement employées dans certains pans de tableaux à sa définition immatérielle, renvoyant à travers les compositions de l’artiste les échos entendus de la pratique du paysage.
Là, les échos formels à l’histoire de l’art et à la réalité sociale de l’industrie se croisent en compositions minimalistes qui dépassent leur bidimensionnalité. Les emprunts et références, de Rothko à Monet, servent ici un jeu d’invention qui reconstruit, avec ses propres moyens, les codes de la perception et d’une peinture à rebours, ordonnée après dépot (par d’autres) de pigments sur des matériaux qui leur ont préexisté. Un sentiment plus que jamais sensible dans l ’œuvre de l’artiste qui use ici pour la première fois de matériaux choisis pour leur teinte et réduit la part d’aléatoire dans sa méthode.
Pas moins novatrice pour autant, cette modulation installe une cohérence plus sensible encore et presque une connivence avec un spectateur capable de lire dans ces répétitions des variations plus personnelles. Et donnent, comme par effet miroir, un regard, un visage à la corporéité déjà renversante d’un œuvre qui se réinvente pour le meilleur.