Géraldine Cario — Galerie Laure Roynette
Dans le prolongement du premier volet Réparation (2015-2016), l’exposition Réparation II de l’artiste Géraldine Cario à la galerie Laure Roynette, présente une mosaïque d’œuvres récentes qui nous transporte dans un théâtre d’histoires aussi intimes qu’universelles.
Géraldine Cario — Réparation II @ Laure Roynette Gallery from October 12 to November 19, 2017. Learn more L’esthétique du travail de Géraldine Cario évoque Christian Boltanski, à la différence près que Cario envisage son œuvre sur « la mémoire, les traces, le temps, l’absence, la perte » comme un processus dont l’aboutissement est ouvert, donc porté vers l’avenir. L’artiste s’attache à déployer une œuvre cathartique en s’appuyant sur l’emploi d’objets qu’elle convertit en reliques. Géraldine Cario réactive les mécanismes d’une histoire rouillée en bâtissant minutieusement des œuvres-vestiges à qui elle redonne vie. L’artiste-chineuse effrénée façonne ses trouvailles manipulées par le temps et les inconnus avec un fétichisme communicatif. Cette nécromancie des objets se traduit par l’utilisation de photographies anciennes, de cartes, de différents mécanismes d’horlogeries et d’objets divers (Armoire) qui ensemble construisent une définition personnelle — pourtant très universelle — du temps et de la mémoire.Ensemble, ses fragments d’objets re-constituent une généalogie de non-dits latents et vaporeux. Face à tant d’images et d’archétypes d’une mémoire troublante, le spectateur devient la passerelle de sens et d’interprétation. Il s’agit alors, clou par clou (Vénus Minkissi — Nkissi I) ou trou par trou (X-Ray I) de reconstituer le puzzle expiatoire de chaque assemblage. Sur quoi allons-nous tomber dans ce dédale d’objets chargés par un temps qui semble mortifère ? À chaque tournant, on a peur d’être dans l’impasse ou de faire face à une menace. À chaque angle mort, le Minotaure de l’histoire est prêt à bondir. Mais les compositions qui renferment les âmes meurtries de Géraldine Cario s’avèrent être figées — emprisonnées par le temps — à la manière du cadavre froid et grimaçant de Jack Torrance sur lequel la neige a eu le temps de se déposer.
Cette immobilité des formes est convoquée par le médium même de la photographie que l’artiste emploie très largement. Intégrées aux petites installations pendues aux murs, des images vernaculaires dévoilent des figures humaines dont la silhouette est délicatement perforée. De cette action iconoclaste et irréversible résulte une aura particulièrement captivante car Géraldine Cario dispose ses images sur des dispositifs lumineux. Dans la série d’installations Still ticking, l’artiste a intégré dans un mécanisme d’horloge des photographies anciennes aux bords dentelés où des inconnus poinçonnés prennent la pose. Derrière la strate d’engrenages immobiles, une lumière jaunâtre s’extirpe des trous et laisse les rayons lumineux former une image acheiropoïète1.
Plus qu’une mise à disposition, Géraldine Cario nous transmet des assemblages de savoirs et de mémoires. Un travail qui porte en lui la détermination cathartique du processus de cicatrisation et qui exclame, malgré son vocabulaire plastique violent, une pulsion de vie.
1 Littéralement « non faite par la main de l’homme ».