Charlotte Moth — Galerie Marcelle Alix
Plongée dans une lumière enveloppante dont la matérialité se découvre au fil du parcours, l’exposition de Charlotte Moth à la galerie Marcelle Alix alterne les gestes et les genres pour mettre en scène la tension organique de la pesanteur et de la légèreté. Une proposition extrêmement convaincante qui s’attaque à la notion d’espace et de geste en conjuguant sensibilité et intelligence.
De la lumière d’ambiance à l’installation d’objets décoratifs, de l’installation d’un miroir en contreplongée à l’étalement de plumes, de la révélation brute du mur endommagé à l’érection de barres métalliques aux allures de pièces de soutien d’architecture, le bâti et l’habité se conjuguent pour nous plonger avec une douceur éthérée dans un bouquet de réalités. Un instantané construit de longue date et plein des coïncidences aléatoires du présent, semblable au résultat d’un retour d’une balade en forêt, avec dans son panier un ensemble de gerbes végétales, fruits, plantes et autres curiosités glanées sur la route.
Or, il s’agit d’une vie, et la forêt d’un monde où extérieur et intérieur se confondent, où ce qui nous est extérieur pourrait bien être son intériorité à elle. En cela, chaque proposition de Moth, plus qu’une question du regard, est une remise en cause de l’exposition, un brouillage radical de la définition de l’artefact.
Car ce n’est pas tant la trace qui compte ici mais bien ce qui pourrait être un portrait du geste, un visage donné au glissement entre le « ramassé » et le « déplacé ». Une entreprise au long cours qui, une fois encore, surprend par l’efficacité de ce processus à mi-chemin entre radicalité et évanescence, où même lorsqu’on touche à l’expression explicite (la vidéo projetée) ou au monumental (une pièce entière au sous-sol dévolue à une seule œuvre), il est question de légèreté avec l’utilisation de plumes.
C’est ainsi l’espace même qui se voit réinventé pour s’accorder, le temps d’une exposition, une nature indissociable de ce qui le peuple et l’ancrer même parmi les protagonistes de cette excursion poétique où lui comme tout ce qu’il s’y passe participent d’un seul effort pour une infinité d’effets, celui du glissement des régimes.