Nefeli Papadimouli — Le Crédac, Ivry — Point de vue — Slash Paris

« Nefeli Papadimouli — Etoiles partielles », Le Crédac, Centre d’art contemporain d’Ivry du 21 avril au 2 juillet 2023. En savoir plus Ses drapés de tissus et autres matières cousues prêts à porter hantent les espaces que Nefeli Papadimouli investit en reliant l’histoire au mouvement pour inventer une architecture du geste qui ne perd jamais sa dimension plastique. Dans leur déplacement lors de performances, les structures agissent comme des augmentations et réductions massives et de notre propre perception, figurant dans l’espace et avec une rapidité analogue, les « zooms » et « dézooms » de focales mécaniques ou numériques, repensant alors les limites de notre propre rapport au corps de l’autre. Si l’avant-garde et le modernisme éclatent de prime abord dans ses structures lâches pensées pour contenir (plus qu’accueillir) les corps, les références évoquent également une continuité géographique qui emprunte à de multiples cultures à travers le monde pour évoquer des chimères humanoïdes singulières.

Invitée par le Crédac d’Ivry, elle y invente une installation monumentale marquée par l’histoire industrielle et sociale de la ville autant que par ses vélléités modernistes si riches. Ses Etoiles partielles tendent un miroir presque organique à l’architecture des bâtiments iconiques de la ville pensés par Renée Gailhoustet et Jean Renaudie, s’inspirant pour leur réalisation de leurs plans et motifs pour fabriquer les éléments vestimentaires d’une parade à venir.

Mais si elles sont bien en attente de corps, en « grève » ponctuelle selon l’artiste, les combinaisons et tentures, installées sur des mannequins minimalistes revêtent dans l’espace une qualité plastique poignante. Entre abandon et liberté laissée à ces formes flottantes, le tableau multiplie les motifs, les lignes fragiles et les zones aveugles qui en font une composition fantastique où l’être humain n’est qu’une option. La fonctionnalité, en trompe-l’oeil, apparait secondaire tant l’ensemble se tient par la seule force de la gravité. C’est alors au corps de s’adapter à ces costumes qui l’handicaperont plus qu’ils ne le vêtiront, résisteront à ses articulations naturelles pour l’enfermer dans un mouvement contraint.

Un choix riche de symbole qui fait vivre la dualité essentielle d’une installation dont l’essence précède l’existence ou, à tout le moins, qui étend sa plénitude et parvient à affirmer son indépendance face à un corps qui ne peut épuiser ses limites. Lequel, s’il le souhaite vraiment, peut alors renverser le paradigme et se « plier » au vêtement pour porter le poids tangible du décor et déplacer à son tour les perspectives.

Performance Étoiles partielles le samedi 3 juin, 19h, dans le cadre de la Nuit Blanche 2023, rendez-vous Place Voltaire à Ivry-sur-Seine. Entrée libre.