Cabinet Da-End 08 — Galerie Da-End
Huitième volet d’un cycle d’expositions en hommage aux cabinets de curiosités, Cabinet Da-End 08 nous entraîne sur les traces d’un monde reliquaire. Un dialogue minutieux entre l’ancien et l’art contemporain qui s’attarde cette fois sur la notion de Primitivisme.
« Cabinet Da-End 08 », Galerie Da-End du 10 mars au 5 mai 2018. En savoir plus Fidèle à la définition du cabinet de curiosités, la Galerie Da-End rassemble « tout ce que la Création offre de merveilles et autres raretés. » Dans le prolongement de ces espaces d’objets précieux et hétéroclites nés au XVIe siècle, la galerie Da-End met en place une scénographie immersive et fourmillante d’objets soigneusement présentés, dans une pénombre intime qui fait la part belle aux œuvres ainsi propulsées au rang de fétiches.Comme face à l’incroyable gueule de l’ogre du jardin de Bomarzo en Italie, nous sommes au seuil d’un monde qui nous absorbe par son mystère. C’est donc curieux que nous pénétrons dans l’espace sombre de la galerie Da-End qui représente si bien son thème. Pour se fondre dans la reconstitution de l’expérience du cabinet de curiosités, le lieu prend dès ses débuts en 2010, ses distances avec le white cube et construit une scénographie qui prend le contre-pied de la galerie d’art contemporaine. Nichées dans des recoins et des alcôves labyrinthiques — comme les reliques d’un prophète gisant dans une crypte — la sélection d’œuvres s’offre à son spectateur sous la forme d’une quête. Non moins sacralisées, dans l’obscurité d’une impasse dont les murs sont rouge-sang, les œuvres de Daniel Horowitz trônent aux cotés d’une figure de supplicante en pierre (0 à 500 ap. J.-C.). Si ses détournements de gravures (Totem sans Tabou) convoquent parfaitement l’appropriation qui est au cœur du primitivisme, la peinture Flag of Mnemosyne intègre au sein même de sa narration une figurine sculptée datant de la période pré-colombienne. Daniel Horowitz développe ici une installation stratifiée qui conjugue espaces et temps : une rencontre entre l’occident et un art dit tribal, qui s’inscrit dans la lignée des artistes d’avant-garde du XXe siècle.
La pièce principale dispose d’un grand meuble étagé par des espaces-microcosmes qui accueillent des œuvres. Symbole de cette volonté de rendre hommage à une forme de monstration de l’œuvre et du savoir, ce mobilier propose un échantillon de la création contemporaine qui réfléchit — notamment dans le choix de ses matériaux, ses dimensions, son caractère fétiche ou d’objet de culte — sur le recyclage, la préservation ou la collection de l’art ancien. Autel de Gabriel Leger, Sitting on a rabbit de Magali Lambert ou Retrouve-toi de Marion Catusse sont autant d’installations-sculptures qui jouent avec ce lexique formel du cabinet de curiosités. Les œuvres minérale de Célia Nkala incarnent cette aura à la fois mystique et scientifique des chambres des merveilles. Éternel retour IV — structure conique et précieuse faite de marbre, cendre, laiton — évoque paradoxalement un temps fossile bel et bien révolu et la complexité du monde matériel dans une forme parfaitement… primitive.
Cette dernière édition de Cabinet Da-End soumet ainsi un parcours varié d’œuvres qui — on le sait — sont des artéfacts, mais qui semblent avoir été extraites à la Nature par des hommes d’une autre ère.