Jan Fabre à la galerie Daniel Templon
À l’occasion de l’exposition personnelle consacrée à Jan Fabre, la galerie Daniel Templon prend des allures de cathédrale de Saint-Denis amplement connue pour ses Gisants. Un parcours où se fond dans le marbre la vie et la mort, dans un souffle qui rappelle les heures fastes de la sculpture italienne du XVIIème siècle.
« Jan Fabre — Gisants — Hommage à E.C. Crosby et K.Z. Lorenz », Galerie Templon du 28 février au 20 avril 2013. En savoir plus Jan Fabre, habité par la mort depuis son coma, et touché par les vanités et autres memento mori avant même cet épisode personnel, développe ici encore un thème mortifère, celui des gisants, au nombre de deux, sculptés dans du marbre de Carrare. Un matériau noble, blanc, d’une pureté absolue, qui projette immédiatement dans un ailleurs, d’espace et de temps, puisqu’il fut notamment utilisé à Rome pour construire les demeures patriciennes sous Jules César. C’est également dans du marbre de Carrare que le Bernin sculpta le couple Apollon et Daphné, exposé aujourd’hui à la Villa Borghese et dont les jonctions fines rappellent la délicatesse du drapé de l’un des gisants présenté à la galerie. Fabre émeut et renvoie ainsi autant à la mythologie qu’à l’histoire. À l’histoire, il est certain, car le plasticien rend ici explicitement hommage à deux figures scientifiques,Élizabeth Caroline Crosby (1918-1983), une américaine neuro-anatomiste et Konrad Zacharias Lorenz (1903-1989), un biologiste et zoologiste autrichien. Pourquoi les avoir ainsi représentés ? D’une part pour leur ressemblance de physionomie avec ses deux parents, tous deux disparus, expliquera-t-il sincèrement. Et ensuite, plus spécifiquement pour leur apport scientifique à la connaissance sur le vivant et le cerveau, zone d’exploration privilégiée de l’artiste.
Le cerveau, amplement illustré par Fabre prend à cet égard dans ce parcours la forme d’une vingtaine de sculptures, toutes en marbre de carrare également, sur lesquels reposent, ici ou là, insectes et fleurs comme s’ils étaient venus s’y greffer. On connaît la légende familiale de Jan Fabre qui explique l’importance démesurée accordée aux insectes ; un père biologiste à Anvers et un grand père entomologiste. Mais ici, ces animaux, chenilles, papillons et scarabées recouvrent un autre sens, celui du passage de l’âme vers l’au-delà, à l’image des animaux psychopompes (guides des âmes en grec) représentés par des chiens le plus souvent au pied des tombeaux royaux.
Jan Fabre scellerait-il de façon durable par là sa croyance en la résurrection ? Il est permis en tout cas de croire que la sculpture se présente comme un médium lui permettant de dépasser notre insupportable finitude.